Sur les traces de Lévi-Strauss, Lacan et Foucault, filant comme le sable au vent marin...
10 Juin 2014
En repensant au phénomène d'adhérence, je me demande s'il n'y a pas là quelque parallèle à tenter avec le déclenchement de la crise névrotique. En effet, il semble y avoir, dans ce déclenchement comme un effondrement de deux niveaux Imaginaires l'un sur l'autre.
Je m'explique: le névrosé construit un mythe autour du nom du père en Ik+1, (cf. par exemple le mythe individuel du névrosé de Lacan) qu'il n'arrive pas à bien mettre en place au niveau Symbolique (S le plan de l'Autre, celui du registre de la Loi). Il est donc (Is) en position ex-ante par rapport à ce Symbole qui lui échappe, et bien entendu, dans la répétition du mythe. Ma position personnelle, pour en parler étant en DM. Nous avons donc:
Ik+1 < Is < S < DM (1)
Au cours de son existence (voir l'"Homme aux rats") une situation particulière dans laquelle il est impliqué (au niveau de sa réalité, Ik) lui semble correspondre au mythe en question, avec Ik < Ik+1 < Is => Ik = Ik+1 < Is (2).
Contrairement au spectateur découvrant une pièce au fur et à mesure de sa représentation, le névrosé connait la pièce, qu'il met en scène plus ou moins consciemment, et l'effet de l'effondrement Ik/Ik+1 n'a pas du tout le même résultat chez l'un ou l'autre. Là où le spectateur se laisse porter par le metteur en scène, pour découvrir une histoire, Ik = Ik+1 < Is => Ik < Ik+1 < Is (3), le névrosé reste bloqué dans la situation (2).
Le spectateur s'élève de Ik => Ik+1 (3), le névrosé tombe de Ik+1 => Ik (2).
Je pense que le déclenchement de la crise est lié à cette phase d'effondrement des deux plans Ik & Ik+1 l'un sur l'autre parce qu'il implique, comme nous l'avons vu, une mise entre parenthèse du Moi. Or, cette perte de contrôle (ou incertitude voir "L'Homme Quantique") lui est insupportable parce qu'elle affecterait sa maîtrise de son obsession, cette construction Imaginaire qu'il a érigée comme défense, pouvant lui échapper durant cette phase.
Je pense en effet qu'il faut comprendre et traduire ainsi les indications rapportées par Freud à propos de l'homme aux rats (voir ici les références):
"Aux moments les plus importants du récit, on remarque sur son visage une expression très singulièrement composite, dans laquelle, si je l’analyse, je ne puis voir que de l’horreur devant son plaisir (Lust) à lui-même inconnu."[8]
"Freud emploie ici le terme Lust qui signifie davantage « plaisir », que « jouissance » contrairement à ce que choisissent certains traducteurs. Dans le plaisir il y a l’idée d’une perte de représentation, d’une perte de maîtrise qui est à la source de l’angoisse chez l’obsessionnel. L’angoisse est toujours du registre de la dissolution du je et de la perte de l’activité de représentation : je ne pense rien, je suis face au vide. Lacan disait que l’angoisse est sans objet, et j’ajouterai qu’elle signe l’abolition du je et du sujet."[9]
Au mon sens, le plaisir ainsi défini, correspondant à une dilution, peut s'exprimer en termes d'entropie croissante (cf. "L'Homme Quantique"), quand la jouissance marquerait proprement le moment de bascule ex-ante/ex-post (cf. le phénomène d'adhérence); qui précisément n'a pas lieu dans la névrose (voir l'article sur névrose et psychose).
Pour confirmer la validité de ce discours, il faudrait vérifier en particulier l'activité de la zone prenucleus (perception du moi) dans ces phases de troubles névrotiques.
Nous n'avons certes pas épuisé les phénomènes névrotiques, mais je pense que nous avons là un fil directeur assez solide pour avancer dans l'analyse de la dynamique de la psyché.
Bonne méditation
Hari