Sur les traces de Lévi-Strauss, Lacan et Foucault, filant comme le sable au vent marin...
12 Décembre 2008
Le bouddhisme apprend à être attentif au monde, à recevoir nos leçons des circonstances, des évènements les plus quotidiens. Il est dit que si l’on y est attentif, Bouddha, pour nous conduire à l’éveil, peut se manifester sous n’importe quelle forme.
Me vient en mémoire cette histoire zen:
Un moine commence sa leçon, lorsqu'un oiseau se pose à la fenêtre et se met à chanter. Son chant est si mélodieux que le maître se tait, tous écoutent en silence, puis l'oiseau s'envole. Le maître dit alors que la leçon est terminée.
Il me semble, mais l’impression est aussi évanescente qu’un rêve au réveil, qu’il m’a été donné il y a peu de recevoir une telle leçon.
Depuis l’été, j’avais décidé et payé ma participation au grand festival Kadampta, qui c'est tenu début novembre à Paris. Occasion surtout de voir, pour sa dernière apparition publique hors d’Angleterre, le Vénérable Guéshé Kelsang Gyatso. A ce désir, s’ajoutait d’autres intérêts personnels, qui faisaient de ce séjour à Paris à cette date particulière, quelque chose de très précieux.
Or, depuis septembre, j’étais très occupé sur le chantier d’Abidjan, et j’avais renoncé à ce voyage. J’avais également renoncé à assister un peu avant cet évènement aux essais d’un transformateur à Zagreb, laissant le soin d’y assister à d’autres. Mon renoncement était donc complètement assumé, bien que j’en fusse désolé.
Cependant, et je ne sais pourquoi, quelque chose me disait que je serai à Paris à cette date.
Pour garder trace de ce sentiment, je me suis même ouvert de cette certitude à certains "autres intérêts personnels" cités plus haut; histoire d’avoir un témoin.
Et puis, le jeudi, le transformateur en question présente une avarie, qui m’oblige à aller à Zagreb, et dans la foulée, m’a donné l’opportunité d’assister en partie au festival etc…
Vous me direz qu’il n’y a là rien de bien extraordinaire, et c’est parfaitement vrai : simple histoire de circonstances et de hasard. Mais là n'est pas l’important.
Ce que je voudrais approfondir c’est, pendant le temps de ce festival, ce sentiment vécu d’être «en phase», d’être en harmonie avec le moment, dans le sens du courant. De ne pas «être» face aux évènements, mais faisant partie d’une trame. Ni gai ni triste, juste là, sensible à la vibration du moment. Je n'ai pas considéré la situation comme un voeu exaucé, manière détournée d'imposer ma volonté aux circonstances, (je n'ai pas souhaité cette avarie, en fait) mais comme une harmonie: j'étais là où il fallait, point barre. Toute autre disposition aurait été "tordue" en quelque sorte.
En ces circonstances "apaisées", j'étais plus attentif, sensible, qu'à l’ordinaire.
En cette occasion, j’ai recueilli comme signes certaines paroles qui furent dites, tel un banal conseil de lire un livre - donné en passant, hors de propos, presque, par notre responsable de centre Mahayana de Nouméa revu à cette occasion - que je reçu comme un indice précieux.
J’ai compris alors ce que je venais d’entendre de Guéshé Kelsang Gyatso: Bouddha peut être présent dans le geste le plus futile, mais il faut y être attentif pour le capter.
L’image que j’ai de mon sentiment d'alors, est celle d’une surface d’eau calme. J’ai ressenti furtivement à quoi doit ressembler la contemplation de la vacuité.
Il faut se calmer pour aiguiser sa sensibilité au Monde. On ne goute pas un grand cru sur un quai de gare bousculé par la foule, mais plutôt à l’ombre dans un chai, entre amis.
Image qui me renvoie à Lacan, pour qui la conscience est une telle surface réfléchissante, perturbée, gauchie par notre «Moi». Et je retrouve encore cette grande proximité conceptuelle entre Lacan et le Bouddhisme. Et je comprends l’utilité qu’il y a à «décrocher» de son «Moi»; à liquider au mieux toutes les petites saletés, petites lâchetés quotidiennes qui nous raccrochent par les basques et nous scotchent au Monde. Pour mieux voir, sentir, aimer, il faut se détacher.
C'est finalement assez bien que ce blog reste là tranquillement ignoré, blotti douillettement au fin fond d'Overblog: il me sert de carnet de route, presqu'un journal intime (presque).
Ami du hasard, bonsoir.
Hari