Sur les traces de Lévi-Strauss, Lacan et Foucault, filant comme le sable au vent marin...
13 Décembre 2023
- Cet article a pour objectif de situer le concept de "topos" dans le triptyque :
que Pierre Cartier développe dans son article "Un pays dont on ne connait que le nom", en guise de présentation des travaux de Grothendieck à un public de non spécialistes. Article recoupant cet autre "Quelques idées maîtresses dans l'oeuvre de Grothendieck". de Deligne.
- Si tu faisais un point de la situation avant de continuer ? Parce qu'entre nous, ton article sur les schémas est un peu longuet...
- Tu as raison, d'autant plus qu'avec le topos, nous sommes au coeur de notre problématique; à savoir si notre représentation de l'imaginaire tient le choc ou explose en vol ! Je vais partir de notre mise au point précédente, et baliser le terrain jusqu'aux schémas, que nous venons de voir.
Sur notre tableau de l'Imaginaire, notre hypothèse est que la croix formée du mode ♢ et du niveau [#] est un développement de l'Imaginaire, prenant conscience de lui-même à partir des travaux de Galois. Prise de conscience dont on peut retracer la gestation en remontant à Galilée.
[∃]♡ | [⚤]♡ | [#]♡ | [♲]♡ | [∅]☯ |
[∃]♢ | [⚤]♢ | [#]♢ | [♲]♢ | [∅] |
☯[∃]♧ | [⚤]♧ | [#]♧ | [♲]♧ | [∅] |
Nous avons vu en premier que l'homologie et la cohomologie nous précisent de quelle façon l'on peut lier ensembles [⚤]♢ et [#]♢, au centre du dispositif (voir "Cohomologie #3"), ce qui nous amène à ce schéma :
𓂀♢ | |||||
𓁝[⚤]G | [#]𓁜 | ∆n+1 | |||
δn ↑ | ↓ ∂n+1 | ||||
Cn=Hom (Cn,G) | 𓁝[⚤]𓁜 | 𓁜←𓁝 | 𓁝[#]𓁜 | ∆n | |
Hn=Ker∂n/ Im∂n+1 | |||||
Hn=Kerδn/ Imδn-1 | |||||
𓁜→𓁝 | |||||
δn-1 ↑ | ↓ ∂n | ||||
𓁝[⚤]G | 𓁝[#] | ∅ | ∆n-1 |
Où l'on visualise assez bien deux démarches, l'une constructiviste en [⚤], l'autre, au contraire, de déstructuration de l'objet en [#], qui trouve à chaque étape de construction/ déconstruction ∆n de l'objet, une expression algébrique des groupes d'homologie Hn et de cohomologie Hn associés à cette dualité d'approche. (Note 1)
Ensuite, l'idée a été, à partir de la démarche cohomologique, de passer d'une structure de groupe à celle d'un anneau, permettant ainsi de concevoir, algébriquement [⚤] (démarche S↑), des objets n'ayant pas de représentation géométrique en [#] (issus d'une démarche S↓). (Note 2)
Cette réflexion passe par la nécessité de définir l'objet le plus élémentaire à savoir le "point"; et la réponse diffère, selon qu'on le définisse topologiquement en [#] ou algébriquement en [⚤]. La même question d'ailleurs se pose concernant l'objet lui-même. Bref, je te la fais courte, pour arriver au schéma suivant :
[⚤] | [#] | 𓂀♢ | |||
topologie étale | X⚤ | X# | topologie | ||
morphisme étal |
↓ f |
← homologie cohomologie→ |
↓ F |
||
S | B |
Où en [#] on définit un Faisceau F : X#↓B et en [⚤] un Schéma f : X⚤↓S.
- Et comment recolles-tu ces deux schémas ?
- Ils sont orthogonaux entre eux et s'articulent autour de la charnière en vert. Nos S et B ont des structures algébriques d'anneaux, qui correspondent dans la cohomologique classique aux groupes Hn et Hn. (Note 3)
Voilà, nous en sommes là. Maintenant, tentons de voir, et c'est un test vital pour ma représentation, de quelle façon situer notre topos.
- Ça passe ou ça casse ?
- Exactement, comme à chaque nouveau concept que nous rencontrons, rien de nouveau dans notre exploration de l'Imaginaire... Sauf qu'ici j'ai l'impression que nous atteignons un acmé.
Topos :
- Pour tout dire nous avons bien quelque idée sur le topos, tout d'abord cette formule de Grothendieck : "le topos est le lit du discret et du continu", ou encore cette présentation de Laurent Lafforgue, qui nous suit depuis déjà quelque temps...
Mais je te propose de revenir au texte de Pierre Deligne, puisque nous y avons trouvé cette filiation schéma-topos-motif, qui nous sert aujourd'hui de guide.
- Pourquoi tourner autour du pot ?
- Pour t'indiquer ma problématique : de quelle façon ce topos va-t-il faire le lien entre [⚤]♢ & [#]♢. Est-ce en [♲]♢ , sans changement de mode, ou bien faudra-t-il passer en mode ♡ ?
- Probablement les deux mon capitaine : nous ne sommes pas dans une logique binaire. Déjà, pour définir l'objet X⚤ comme limite projective, tu flirtais avec le mode ♡, non ?
- Sans doute. Je te livre le passage en entier :
"Soit u: S′→S un morphisme de schémas, le "morphisme de changement de base". La théorie de la descente [Grothendieck FGA, Séminaire Bourbaki 190, 1959-60] considère des problèmes des types suivants.
Si S' est la somme disjointe des ouverts (Ui)i∈I d’un recouvrement de S, le changement de base à S' est essentiellement la restriction à chaque Ui, et les problèmes précédents sont des problèmes de localisation sur S et de recollement. Recoller exige typiquement la considération des intersections deux à deux des Ui∩Uj, et en termes de u: S′→S, la somme disjointe des Ui∩Uj est simplement le produit fibré S′×SS′.
La théorie des topos permet de transposer en théorie de la descente l’intuition topologique. Pour u: S′→S, un morphisme de changement de base d’un type considéré en théorie de la descente, par exemple fidèlement plat et quasi-compact (fpqc), le changement de base de S à S' devient une localisation. Unes donnée de descente est l'analogue d'une donnée de recollement.
Un antécédent à la théorie de la descente est la descente galoisienne, correspondant à S, spectre d'un corps k et S', spectre d'une extension galicienne. Ici S′×SS′ est comme de copies de S' indexées par Gal(k'/k). La démonstration, et en particulier la théorie de Galois, sont toutefois plus simples dans le cadre plus général de la théorie de la descente. Selon le mot de Cartier : Grothendieck prouve la théorie de Galois, et la descente galoisienne, par la descente galoisienne.
L’outil qu’est la théorie des topos a permis la construction de la cohomologie étale des schémas, et c’est là son succès le mieux connu. Un faisceau sur X pour la topologie de Zariski est un foncteur contravariant de la catégorie des ouverts de Zariski de X dans celles des ensembles, avec une condition de recollement pour (Ui)i∈I, un recouvrement ouvert de Zariski de U. En topologie étale, le site Zariskien, considéré plus haut, est remplacé par le site étale : la catégorie des ouverts de Zariski est remplacée par celle des f : U→X étales sur X, et les recouvrements par les familles couvrantes (Ui)i∈I : un morphisme surjectif de schéma sur X de la somme disjointe des Ui dans U. Un antécédent : l’introduction par Serre de la notion d’espace principal homogène isotrivial (= localement trivial pour une topologie proche de la topologie étale). Dans ses articles à Kansas [1955] et au Tôhoku [1957], Grothendieck avait montré que, une catégorie de faisceaux étant donnée, une notion de groupes de cohomologie en résulte. La topologie étale fournit ainsi la cohomologie étale. Que les groupes H1 obtenus soient raisonnables n’est pas surprenant. Le miracle est que les Hi supérieurs soient eux aussi raisonnables.
Pour Grothendieck, l’importance de la Théorie des topos dépasse de beaucoup le seul cas de la topologie étale. Le titre donné à SGA 4 en est témoin : "Théorie des topos et cohomologie étale des schémas".
Il faut commencer par comprendre ce qu'est une "descente de Grothendieck"
Descente :
Soit u: S′→S un morphisme de schémas, le "morphisme de changement de base."
- Nous sommes donc ici confinés en [⚤]♢ ?
- Ce qui n'aurait pas grand intérêt, car après tout nous cherchons une représentation géométrique d'une construction algébrique.
- Il faudrait donc décrire un passage [⚤]♢→[#]♢ ?
- Oui, mais à la réflexion, je fais l'hypothèse que la discussion concernant les changements de bases se développe en mode ♡, plus précisément en [⚤]♡ et que le passage de mode ♡↓♢ doit être vu comme une sorte de décohérence, où s'opère une différenciation quant à la perception de l'objet.
- C'est ce que tu avais décrit comme une appréhension :
- Oui, ça nous donnerait quelque chose comme ça :
produit fibré S′×SS′. | 𓂀♡ | ||||
S'→S | [⚤] | ||||
↓ | ⇘ | ||||
Ens | [⚤] | → | [#] | k | 𓂀♢ |
Ui∩Uj | → | recouvrement (Ui)i∈I |
Toute la discussion sur la descente tirerait alors son sens d'une "descente finale" de mode ♡↓♢ qui permettrait de mieux situer le problème de la localisation.
Tu vois tout de suite l'expression algébrique soit forme de restriction (Ui∩Uj), que l'on retrouve dans les co-chaînes, en relation avec une expression sous forme d'union d'ouverts ((Ui)i∈I) qui nous renvoie directement à Galois, ce que Cartier met en exergue de tout : "Grothendieck prouve la théorie de Galois, et la descente galoisienne, par la descente galoisienne".
- Je vois en gros, mais l'enjeu justifie une revue de détail, non ?
Changements de base et recouvrements :
- Soit. Commençons par ceci :
"Si S' est la somme disjointe des ouverts (Ui)i∈I d’un recouvrement de S, le changement de base à S' est essentiellement la restriction à chaque Ui, et les problèmes précédents sont des problèmes de localisation sur S et de recollement. Recoller exige typiquement la considération des intersections deux à deux des Ui∩Uj, et en termes de u: S′→S, la somme disjointe des Ui∩Uj est simplement le produit fibré S′×SS′.
Il y a déjà l'idée d'une somme disjointe de recouvrements. Songe encore une fois à cette vidéo sur le triangle de Penrose : pour qu'il soit possible de construire en 3D le triangle suggéré par U1, U2 et U3, il faudrait que A1, B1, C1 collent respectivement à A2, B2, C2. la cohomologie traite de ce genre de problème, dans la liaison [⚤]→[#].
Maintenant, en disant "la somme disjointe des Ui∩Uj est simplement le produit fibré S′×SS′", on change de point de vue et de mode par la même occasion.
- Précise.
- Je te renvoie à Wikipédia pour la définition du produit fibré, que nous avons déjà approché pour définir l'objet X⚤ sur notre schéma (voir ici dans "géométrie analytique - arithmétique").
Nous avions situé f : X⚤↓S en [#]♢, et donc ici, en définissant S lui aussi comme produit fibré nous remontons tout d'un cran, en mode ♡. Du coup, si je puis dire, notre f doit s'exprimer en termes de transformations naturelles.
Le 14/ 12/ 2023 :
- J'ai mis par écrit ce dont j'ai rêvé cette nuit, à la lecture de Deligne, pour y revenir à loisir voir "Le Sujet comme topos #2".
Le 19/ 01/ 2024 :
- Je ne sais trop pourquoi, mais j'ai eu besoin de faire une pause avant de continuer.
- Peut-être la peur d'arriver au bout d'une démarche ? Il faudrait analyser la chose...
- Oui, sans doute le besoin d'un peu de recul... Et puis, je désirais visualiser, concrètement, le Sujet circulant dans son Imaginaire. Question de "représentation" qui n'est pas simple, et m'a fait me perdre dans un logiciel graphique : Blender...
Bref, fini les vacances et ce matin, reprenant cet article en déshérence, je n'ai rajouté que 2 notes (1 & 2) concernant les schémas, avant d'entamer le passage sur les topos... Content de bien me retrouver dans le concept de schéma, mais j'ai du mal à me concentrer sur celui de topos, quand nous sommes sur le départ pour le Pérou ! Juste cette évidence que les questions de "descentes" — de propriétés, de morphismes ou d'objets — se posent en mode ♡ : qu'est-ce qui "persiste" dans mon observation, à travers mes différents changement de posture, de grilles de lecture.
- Ce serait le Motif derrière l'objet ?
- Ou plutôt cet "objet" comme Topos liant un Motif à des Schémas ?
[⚤]𓁝⇅𓁜[♲] ℕ ℚ ℤ ℝ ℂ ℍ ℵ § ⋀ ↦ ⟼ ←→ ↓↑ ∈ ⊂ ⊃ ⋂ ⋃ ∀ ⌣⏜
♤♡♢ ♧ ♤ ♡ ♢ ♧ ♢ ♡ ♤ ⏩ . •⟲ ≤ ∣. ≥. ∥ ∆. ⊳ ≠ √. ∛
(☯[∃]𓁝⇅𓁜[時間]𓁝⇅𓁜[空間]𓁝⊥𓁜[間]𓁝⇆𓁜[無]☯) 𓂀♧♢♡♤. (...) ⇅𓂀♧
(☯[∃][⚤]𓁝⇅𓁜[#]𓁝⊥𓁜[♲]𓁝⇆𓁜[∅]☯) 𓂀♧
α β 𓁝[α]𓁜 [β] ε ρ θ γ δ ε ζ μ π ν ω Ω ψ χ φ . ∂
∈ ∞ ↦ {} ⇅ ∫ ⇆ ≅↓↑ ≤ ⟼ ←→
R (〈I1|〈I'm|I#|Im〉|I0〉) S ⊗
⇘⇙⬂⬃
♡ | => | ♢ | ||
⇘ | ⇙ | |||
♧ |
Note 1 : Le 19/ 01/ 2024 - S-P
Les ensembles de groupes Hn & Hn fournissent ensuite, au niveau [♲]♢ les moyens de caractériser l'objet étudié, par des "mesures", telles que :
Note 2 :
D'où cette idée, très générale que la cohomologie restreint les possibles envisagés par 𓁝n[#] à ce qui est observable par n[#]𓁜, grâce à une relation algébrique portant sur la dernière dimension n. C'est très exactement de cette façon, par exemple, que l'on montre l'impossibilité du triangle de Penrose. Voir plus loin dans le texte.
Note 3 : Le 01/ 02/ 2024 - Arequipa
- Comme cela arrive souvent, les réponses que je m'adresse à chaud, comme ici, précèdent, ou plutôt, induisent une pensée qui cherche à "sortir".
- En l'occurrence ?
- Cette idée d'orthogonalité m'est venue spontanément, parce que le concept me travaille depuis que j'ai caractérisé ainsi l'objet de la répétition au niveau [#]♧; et je l'ai écrit ici dans un souci d'esthétique, comme on met une cale sous un pied de table banale. Mais, en relisant mon texte ce matin, l'orthogonalité en question m'apparaît enfin dans toute sa simple nudité :
Elle est là mon "orthogonalité" : c'est celle entre "niveaux" et "modes", tout simplement. Curieux que je n'ai pas fait le lien en rédigeant la Note 1 !