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Sur les traces de Lévi-Strauss, Lacan et Foucault, filant comme le sable au vent marin...

L'Homme quantique

En roue libre

- En fait, j'ai besoin de ce blog pour décanter mes idées.

- C'est-à-dire ?

- J'écris sans brouillon, au fil de la plume, et la pensée se discipline au fur et à mesure de mes réécritures.

- Crois-tu être le seul ?

- Non pas, mais je ne sais trop pourquoi j'ai besoin d'écrire avec cette sensation d'être exposé immédiatement au regard d'autrui. Comme si la création impliquait une sorte d'impudeur.

- Sans doute parce que pour "exister" le discours doit échapper à son créateur?

- Il y a certainement quelque chose de cet ordre. Chaque article s'échappe de ma sphère privée, et une fois publié, en le relisant, j'ai un peu honte d'avoir été aussi imprécis, honte des à peu près, des erreurs, des maladresses, alors je corrige, encore et encore, jusqu'à l'article suivant, et puis, très souvent, je l'oublie après quelque temps, pour le redécouvrir au hasard, en m'apercevant qu'il a été relu par quelques-uns.

Et c'est dans cet exercice de relecture, que souvent l'idée juste jaillit.

- Exemple ?

- Dans le dernier article sur "les groupes d'homologie #2", j'avais un passage assez embarrassé, dans lequel je parlais de I'm et de I1, disant tantôt que Descartes situe son ego I'm en I1, tantôt que I'm est coincé entre I1<I'm<I01. Je sais bien que nous sommes ici à la limite du Réel, où la pensée du Sujet est à peine exprimable, mais ça m'agace, et au fil de mes raturages, j'arrive à  ceci :

 (I1I01 (I'mIm

D'un coup, ma pensée s'est cristallisée autour de cette image, et j'ai repris le fil de mon article à partir de là.

- En bref, tu es dans l'automatisme de répétition tant que tu ratures ton texte, et tu passes à la suite lorsque tu as trouvé le moyen de surmonter l'obstacle... Classique. Mais où veux-tu nous mener ?

- À cette image de tore que j'ai trouvée pour illustrer ce qu'est un foncteur représentable.

Elle est tirée d'un manuel d'électromagnétisme, ce qui m'a rappelé ma jeunesse avec le bonhomme d'Ampère et la règle des trois doigts de la main droite "champ/ chemin/ courant". 

Et depuis hier, je cogite autour de ces histoires d'orientation, et de trous. J'étais parti d'un rapprochement entre un foncteur F↓ représentable par un morphisme h↓ et la section carrée de ce tore, en disant que dans cette métaphore, le morphisme h↓ étant comme le trou de mon tore.

Or, à la réflexion, tout choque dans cette comparaison :

  1. d'une part un morphisme ne peut pas être comparé à l'objet initial ()∈I0,
  2. d'autre part, une transformation naturelle n'est pas comparable à la circulation d'un courant i dans la spire d'un solénoïde.

- Et donc tu abandonnes cette métaphore ?

- Non, car ma confusion signifie quelque chose. Il y a derrière cette cacophonie une harmonie à retrouver. Mais pour cela, il faut s'autoriser à lâcher prise, et divaguer pour retrouver son chemin.

- Pourrais-tu être un peu plus concret ?

- Commençons par nous intéresser au vide, et revenons à nos méditations cartésiennes à nous.

Lorsque je réifie mes deux morphismes ⇅ en les représentant en I01 par des éléments de graphes ⇆; je peux les imaginer comme délimitant un vide en leur centre. Bien, mais par ailleurs, j'ai déjà bricolé une représentation du vide à partir de considérations concernant le concept d'ensemble.

Pour mémoire:

  • On identifie le singleton (*) à l'ensemble possédant un et un seul élément E={*}, que je peux écrire sans ambiguïté {1} ou 1;
  • Ensuite je définis le concept de "parties d'un ensemble" P(E) avec l'axiome fondamental que P(E) est lui-même un ensemble;
  • Enfin, en considérant la partie de E qui est le complément de son unique élément 1, je dis que ce complément est vide et je le représente par 0. Ce qui nous donne P(E)={0,1}. C'est l'objet discriminant de la catégorie Ens des ensembles.

- Tu reviens vraiment à la base de la théorie des Ensembles ! En fait tu tournes en rond.

- Pas du tout, au contraire, je te présente un tour de magie !  

- De quoi parles-tu ?

- Suis-moi attentivement. En écrivant Id : (*)∈I1{1}∈I01; avec I1<I01<Im, nous sommes pleinement dans la pensée rationnelle logique, le regard tourné vers l'objet final et avec pour seul outil l'automatisme de répétition, c.-à-d. la notion de successeur pour meubler notre Imaginaire en I01, à partir d'une suite de morphismes, ce qui correspond au concept de produit et à la multiplication.

Maintenant, le matheux introduit cette notion de "partie" d'un ensemble, et là, avec cette notion liée à l'addition, nous sommes ipso facto dans une approche de l'élément vide, en I0, avec Im<I0, et donc en dehors de la pensée rationnelle.

- C'est pourquoi l'on parle d'axiome.

- Oui, mais ce faisant, il te faut bien t'appuyer sur I'm avec I'm<I01<Im<I0, pour rationnaliser ton discours, lui rapportant un "élément", en l'occurrence le concept de vide de niveau I0 au niveau I01.

- Mais nous savons déjà que I01 est le lieu de rencontre entre les deux points de vue logique/ topologique.

- J'avoue que je n'avais pas encore interrogé cet axiome sur les parties d'un ensemble de la théorie des Ensembles, en ces termes. 

- Soit, mais en quoi est-ce utile ici et maintenant ?

- J'ai le sentiment que l'on a tendance à se focaliser sur le processus "immanent" de la structuration de l'Imaginaire, à partir de R<I1<Im, dans une approche rationnelle logique, à partir de l'objet final (*). C'est d'ailleurs celle que j'ai privilégiée dans l'Homme Quantique".

Mais l'approche complémentaire, "transcendante", à partir de l'objet final ( ) dès que l'on a atteint le stade du miroir, avec I'm<Im<I0<S n'est pas moins importante. Cette dernière est plus longue à cerner, pour la bonne raison qu'elle naît en commençant par les couches les plus structurées de l'Imaginaire. Il s'agit donc, au sens que Foucault donne à ce mot, d'un travail d'archéologue du savoir. 

- Tu nous ressors tous tes poncifs: Spinoza, Foucault, Changeux ...

- Oui, je sais, désolé. Je n'ai qu'une très modeste culture, et je tourne toujours autour des quelques bribes de discours que j'accroche avant de refermer un livre, car je suis très très fainéant... Et en plus, doté d'une mémoire de poisson rouge... Mais bon, je fais avec.

Toujours est-il que ce rappel de l'axiome des parties P(E) est pour moi, le signe manifeste qu'en me donnant les moyens de construire la logique en I01, du même coup, j'accepte implicitement de recourir à une approche topologique pour y arriver.

C'est dire que I01 est le point d'aboutissement, au fond de l'Imaginaire de ce concept vide, qui tutoie la voute céleste en I0<S.

- Et je présume que la question suivante est de repérer la trace de cette dégénérescence en IR et en I#, n'est-ce pas ?

- Pas seulement, car avec notre analogie objet/Sujet résumée par (I1I01⇅ (I'mIm), la question concerne le Sujet lui-même.

- Soit, mais quel rapport avec ton article précédent ?

- J'en reviens toujours à la difficulté de représenter un co-morphisme h↓, et à la différence identification/ idempotence.

Cette descente ↓ est toujours comme l'ombre portée de la montée ↑, et je cherche mes mots pour en parler le plus clairement, le plus évidemment possible. 

Il me semble en avoir fait un point assez précis en termes de catégories dans l'article "Matrice", à partir des concepts de produit et de coproduit, eux-mêmes définis à partir de la propriété universelle. De cette dernière nous avons également abondamment parlé (voir ici), mais je pense que notre retour à Descartes, nous a poussés à aller au fond des choses, en revenant au fait que toute catégorie C n'a qu'un et un seul morphisme h la portant vers le singleton h: C↓(*); ce qui va avec un axiome d'existence en I1, qu'il me semble difficile d'ignorer, quoiqu'en disent certains matheux...

D'une certaine façon, le vide c'est ce qui n'est pas actualisé, resté enfoui dans le cortex, et donc il s'agit de pensées potentielles. Et l'ombre dont je parlais, c'est tout ce qui n'est pas actuel. Et, oui, pour en revenir à Changeux, I01 serait le niveau Imaginaire miroir où un morphisme ↑ issu de I1, et un morphisme ↓ provenant de IR sont le reflet l'un de  l'autre.

J'ai donc une première image, avec en I01 la réification ⇆ d'un mouvement (I1I01) et cette seconde, qui voit I01 comme le lieu de confluence entre deux mouvements I1↑I01 et I0↓I01 pointant vers 0.

- Il est à souhaiter que ces deux images du vide coïncident !

- La question n'a rien de trivial.

Nous avons déjà discuté de la conjonction en I01 des concepts de produit et coproduit (voir "Matrice"), et compris qu'il s'agissait, pour I'm situé en I01 d'une rotation lui permettant de se référer tantôt à l'objet final, tantôt à l'objet initial.

Mais lorsque nous avons discuté du cogito (en I'm) de Descartes (en Im), nous en avons conclu qu'en qualité qu'objet de son discours, il se situe en  I1. Le Sujet de ce double discours, leur échappant, peut être vu à la verticale de I01, comme se projetant en I01 au ventre de l'oscillation I'm ⇆Im.

Autrement dit le premier discours, construit à partir d'axiomes ayant un sens mathématique se rapproche d'un discours "orienté objet"; quand le discours du philosophe serait quant à lui "orienté Sujet".

- Tu penses à la distinction faite en relativité entre grandeurs de "genre temps" et de "genre espace" ? 

- Oui, cela y ressemble. Il nous est proprement impossible de dissocier complètement le Sujet de l'Objet, mais notre attention est orientée vers un genre ou vers l'autre, et cette incertitude (ou liberté du Sujet) entre les deux approches serait au coeur même de ce que j'ai appelé la relativité seconde dans mon schéma d'ensemble  (I1I01 (I'mIm).

Mais je peux forcer le discours en utilisant un axiome à ma façon, selon lequel il n'y aurait qu'un seul objet initial vide, qu'il s'agisse d'un discours de type objet ou de type Sujet, de même qu'il n'y a qu'un seul élément final, renvoyant à l'axiome d'existence, qu'il s'agisse d'un objet (i.e.: de l'objet pour moi) ou de la prise de conscience du Sujet (i.e.: de moi pour moi).

Tout ceci pour dire qu'il y a deux façons de repérer la trace de l'objet initial par 0 en I01

- Te voilà bien avancé ! 

- Désolé, mais j'avais besoin de faire le ménage. Ce qui nous intéresse, en fait, c'est l'étape suivante, en IR.

Mais ce sera pour une autre fois: il fait un temps magnifique et j'ai besoin de prendre l'air.

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Retour du jardin,

- En ratissant l'herbe coupée il y a quelques jours, qui étouffe ma pelouse en la jaunissant, je ruminais tranquillement ce que je venais d'écrire lorsqu'une idée simple s'imposa à moi.

Je parlais du "volume" dans mon article précédent ("Les groupes d'homologie du Sujet #2") comme de l'oeuf philosophal de l'alchimiste. Mais en fait, je le connais déjà cet oeuf. 

- Tu es très fort !

- Absolument pas. Il suffit de me connaître un peu, ou de parcourir ce blog qui garde la trace de mon évolution depuis 2006, or qu'y a-t-il au coeur de ma démarche ?

- Je me souviens qu'en 2006 tu fréquentais le Centre Bouddhiste Mayana Kailash de Nouméa, et que tu as gardé quelques liens, même après ton départ pour Abidjan (voir "Le hasard et la nécessité"), mais tu n'as jamais vraiment accroché, tu es resté "à côté", ce qu'en termes communistes on appellerait un compagnon de route...

- Tout à fait: le folklore des dieux, démons et demi-dieux m'indisposait. Cependant, s'il y a une chose que j'ai retenue dans cette aventure, c'est l'idée que la vacuité du Moi (un simple discours) s'étend au Sujet lui-même. Et toute ma recherche peut se résumer à mon désir d'atteindre à cet instant où, en suivant ma propre voie, je prendrai vraiment conscience de ma vacuité.

- Oui, je sais tout cela, y compris que ton désir vient d'une angoisse enfantine très ancienne, que tu as eue en comprenant à sept ans que tu étais mortel, d'où ton questionnement perpétuel concernant le temps.

Tout ceci pour nous dire quoi ?

- Pour te rappeler que ma propre vie spirituelle, mon système Symbolique S, avec Im<S, est tendu vers cette aspiration au vide. Ce qui explique sans doute pourquoi j'ai accroché si facilement à la théorie des catégories lorsque j'ai lu dans "Conceptual mathematics" de Lawvere cette idée d'objet initial, vide, que je me suis empressé de nicher en I0, au plus haut que je puisse atteindre dans mon Imaginaire, à savoir Im=I0<S.

- Oui, oui, je sais tout cela, et alors ?

- Alors, pour moi, dans cette position idéale, je ne peux rapporter tout concept situé en I# qu'à un objet vide. L'oeuf philosophal, le concept clef de I#, doit nécessairement, pour moi en tout cas, se révéler vide en I0.

- Et alors?

- En I#, nous malaxons le temps et l'espace (i.e.: la norme de Minkovski (ct,x,y,z)) pour leur rendre une certaine plasticité, (voir "Aspects de la géométrie") avec la "conservation" d'un objet en D4 qui est la vitesse: v.v=c2 (voir "La mesure de toute chose").

- Et ?

- Et bien le passage I#/I0 doit se caractériser par la disparition de cet objet, de ce volume en 4D.

- Qu'as-tu en tête?

- Cette idée qu'une bouteille de Klein en 4D est une surface qui n'enferme que du vide. Autrement dit, non seulement j'ai les bornes de ma chaîne d'homologies du Sujet: en I0 comme en I1 mes "objets" sont de dimension nulle, mais également une représentation de ce que signifie la réification en Ik+1 de chaque saut diachronique Ik/Ik+1.

En particulier: le passage de IR à I# va consister à transformer notre tore en cette bouteille de Klein.

- Waouh ! C'est compliqué !

- Penses-tu. Souviens-toi de la représentation topologique de notre tore par une surface :

Et bien, imagine que pour la bouteille de Klein, il suffit de coller l'un des bords "a" en tournant la bande de papier d'un demi-tour, comme pour faire un ruban de Moebius.

Tu vois tout de suite, je l'espère, de quelle façon tout ceci nous renvoie à une question de commutativité ou non-commutativité, (ou du passage de à ⇅) ce qui est au coeur de la recherche de Poisson. En fait, nous ne nous sommes pas tant éloignés que ça des questions qui agitaient déjà Lagrange et ceux qui l'ont suivi... 

Je pense que nous avons là une bonne base pour parler enfin plus concrètement des groupes d'homologies du Sujet !

À suivre, donc.

Hari.

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