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Sur les traces de Lévi-Strauss, Lacan et Foucault, filant comme le sable au vent marin...

L'Homme quantique

La querelle des Universaux - Alain de Libera / Notes de lecture # 5

"fécondation in vitraux" - Les chats de Geluck

Nota : La signification et l'usage de mes glyphes, comme le schéma général de l'Imaginaire du Sujet, sont présentés ici: "Résumé"

([∃]𓁝⇅𓁜[⚤]𓁝⇅𓁜[#]𓁝⊥𓁜[♲]𓁝⇆𓁜[∅])𓂀

J'ai situé certains concepts Japonais, tels que Mu 無, Ma/Aïda 間, espace
空間 et temps 時間 dans cette grille de lecture, ici : "L'espace-temps / Ma"

([∃]𓁝⇅𓁜[時間]𓁝⇅𓁜[空間]𓁝⊥𓁜[間]𓁝⇆𓁜[無])𓂀

Pour le schéma développé de l'imaginaire voir: "Mettre un peu d'ordre dans sa tête"

𓂀          
  [∃] [⚤] [#] [♲] [∅]
  [∃] [⚤] [#] [♲] [∅]
  [∃] [⚤] [#] [♲] [∅]
  [∃] [⚤] [#] [♲] [∅] 

- Après le temps qu'il m'a fallu pour comprendre que la dialectique est à prendre au sérieux pour aborder la scolastique, (voir #4), il est temps de revenir à notre lecture.

- Deux mots, quand même, pour situer tes dernières réflexions ?

- Volontiers :

1/ J'ai compris que, sous forme "objective" (les mots représentants des concepts tels qu'existence, subsistance, esprit, sujet connaissant etc.), l'alternative :

"les genres et les espèces :

  • ont-ils une existence réelle («subsistance») au titre de formes séparées ou;
  • existent-ils seulement dans l’esprit du sujet connaissant",

exprime (ou réifie), deux mouvements Imaginaires du Sujet, qui donneront chez Spinoza les entendements de 1e et de 2e espèce, que je symbolise pour nos besoins par S↑ et S↓;

2/ La dispute se situant au niveau du discours [⚤], avec la logique du premier ordre, les protagonistes doivent choisir exclusivement l'une ou l'autre des branches de l'alternative, il n'y a pas de moyen terme, ni coexistence possible des deux mouvements S↑ et S↓.

S↑ : ([∃]𓁝⇅𓁜[⚤]⏩[∃]𓁝⇅𓁜[⚤]⏩[⚤]𓁝⇅𓁜[♲]⏩[⚤]𓁝⇅𓁜[♲]⏩[♲]𓁜)𓂀
S↓ : ([♲]𓁝⇆𓁜[∅][♲]𓁜)𓂀

À partir de là, nous pouvons continuer.

"Il suffit de présenter ainsi les alternatives de Porphyre : 􏰀

  1. les genres et les espèces sont
    1. des réalités subsistantes en elles-mêmes ou
    2. de simples conceptions de l’esprit ;
  2. 􏰀les genres et les espèces sont
    1. des corporels ou
    2. 􏰀des incorporels ;
  3. les genres et les espèces sont
    1. des êtres séparés
    2. des êtres subsistant dans les choses sensibles ;

pour voir se former la structure qui a porté toute l’exégèse néoplatonicienne tardive, puis, à travers elle, une partie de l’exégèse arabe et latine, par des voies que l’on peut identifier historiquement et sur lesquelles on reviendra plus loin." p. 47

Comme tu le vois, tout ceci est très linéaire :

1/ Subsistance/ concept :

Nos deux mouvements S↑ et S↓ tournent autour de [♲], et les concepts "subsistance" et "concept" sont à ce niveau.

2/ Corporel/ incorporel :

Je comprends "corporel" comme rattaché à la posture ex post 𓁜, du contact au Réel, 𓁜, du choc ressenti dans l'Imaginaire [∃]𓁜, de son identification en [⚤]𓁜, et in fine de sa "subsistance" en termes platoniciens en [♲]𓁜, à l'origine de S↑.

Par opposition, "incorporel" se référerait à la posture ex ante, soit 𓁝, soit 𓁝[∅], à l'origine du mouvement S↓. 

La transcription en termes de catégories est simple :

  • Incorporel : le Sujet 𓁝 orienté vers l'objet initial 
  • Corporel : le Sujet 𓁜 orienté vers l'objet final (*)

3/ "Êtres séparés" ou "dans les choses sensibles".

J'ai eu plus de difficulté à comprendre de quoi il s'agit. Tout d'abord, de Libera introduit le terme "être", hors contexte... Passons.

En partant du fait que la pluralité est concevable en [⚤], et qu'un universel est un concept de niveau  [♲], on pourrait raisonner sur l'exemple "cheval" :

  • En [∃] on expérimente un objet sensible : "cheval", objet final du discours;
  • En [⚤] on l'identifie, puis l'on compte "des chevaux",
  • En [♲] on a le concept de "caballéité" (au terme de S↑ ou S↓)

- Ça me rappelle ma fille N. , qui n'arrivait pas à comprendre que le pluriel de "cheval" était "chevaux", et toute heureuse nous surprit un jour en annonçant fièrement: 

"j'ai compris : il y a le cheval, les chevals... et les chevaux !"

- J'ai l'impression que la question est du même ordre : ici tout est écrasé, puisque la scolastique ne parle aucunement de la façon de représenter la nature dans l'Imaginaire du Sujet, mais d'une nature, qui s'offrirait sans fard à l'Université, comme à dieu.

S'il s'agit "d'êtres séparés", nous pouvons étaler dans le Réel, et sans problème un être "cheval" à côté de l'être "10.000 chevaux" et d'un autre être "caballéité".

Maintenant, la question reste de savoir si "caballéité" subsiste dans "cheval" ?

- Comment veux-tu entrer sérieusement dans ce questionnement?

- C'est toute la difficulté du travail de Libera.

Je comprends le questionnement comme ceci : comment puis-je avoir autant d'êtres séparés tels que "cheval", "10.000 chevaux" et "caballéité", côte à côte, dans la nature, et par ailleurs dire que l'être "caballéité" est dans chacun de mes 10.000 chevaux.

Dans un discours limité à la logique du 1er ordre, "caballéité" est exclusivement:

  • soit à côté et donc hors de l'être "cheval"
  • soit  dans les concepts "cheval", "2 chevaux", .... "10.000 chevaux".

- Mais c'est une pensée folle ! Un peu comme ton vitrail de Geluck ou "fécondation in vitraux" renverrait à "fécondation in vitro" sans aucune distance, sans clin d'oeil ! Un gars qui mangerait le ticket de pain au lieu du pain irait de nos jours directement à l'asile, non ?

- Ah, et que pourrais-tu me dire de la transsubstantiation dans l'Eucharistie, qui entre dans le dogme lors du Concile de Latran en 1215 ?

Non, mon ami, on discute ici de choses sérieuses à l'époque, certains sont montés au bûcher pour avoir mal pensé; et c'est à partir de ces discussions que la pensée moderne s'est développée.

- Tout ça parce qu'il n'y a juste pas de niveau [#] à partir duquel exprimer les classes...

- Là, c'est très très raccourci ! Mais puisque nous y sommes, j'aimerais terminer le chapitre sur Porphyre par cette image :

"Une figuration célèbre de l’Arbre de Porphyre, modelée directement sur le texte précédent, est celle que propose le commentaire de Julius Pacius (Giulio Pace, 1550-1635), un des principaux commentateurs d’Aristote à l’Âge classique. L’accent étant mis sur la hiérarchie verticale du genre et des espèces, les différences n’apparaissent pas (figure A)." p. 53

Figure A

J'attire immédiatement ton attention sur ceci : pour toi comme pour moi (ainsi que pour Giulio Pace) cet arbre de connaissance se comprend comme  "vertical", avec une hiérarchie sous-jacente, qu'il n'est pas possible de comprendre à l'époque où nous nous situons : au Moyen Âge, elle est "à plat". La perpendicularité ⊥ immédiate pour nous, est liée au niveau [#] qui nous est naturel.

- Mais, Giulio Pace lui-même serait donc en rupture avec cette pensée médiévale ?

- L'auteur le situe à l'Âge Classique, et je note qu'il s'était converti au Protestantisme, ce qui lui valu quelques difficultés. Il commence à fuir l'Italie pour la Suisse en 1575. En peinture, nous sommes déjà dans la période classique de la Renaissance, et la perspective est bien maîtrisée. Quant à Galilée, il quitte sa carrière écclésiastique en 1579...

Donc, tu vois, même la simple lecture d'un schéma n'est pas évidente !

À demain,

Hari

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