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Sur les traces de Lévi-Strauss, Lacan et Foucault, filant comme le sable au vent marin...

L'Homme quantique

Des métaphores à la folie

Le 24/ 09/ 2024 en route vers La Rochelle

- Je repense à cette courte vidéo montrant un homme se donnant la peine de passer par le portillon d'un portail ouvert, alors que de toute évidence il eut été plus simple pour lui de passer tout droit.

- Il est dérangé, non ?

- La question est plutôt de comprendre en quoi son action te paraît déplacée...

- Il peut passer tout droit...

- Ah oui, et lorsque tu te déplaces dans une église, ou en contournant le pavé mosaïque d'une loge maçonnique, est-ce que tu le fais n'importe comment ?

- Tu ergotes, il n'est question dans la présente situation ni de lieu sacralisé, ni de rite ou d'une quelconque règle protocolaire.

- Et pourtant, il passe par le portillon...

- Où veux-tu en venir ?

- Samedi, j'ai eu le plaisir de discuter avec JP L de mes travaux et, lui rapportant ma question à Laurent Lafforgue : "est-ce que dans vos travaux vous utiliser explicitement la règle topologique selon laquelle un bord n'a pas de bord ?", il a eu cette réflexion : tu me fais penser à Guy Debord et au situationnisme, d'ailleurs au fond, ton besoin de rapporter la posture du Sujet à une surface Imaginaire, est en soi situationniste.

Bon, je garde ça dans un coin de ma tête, et ce matin, en ramenant ma voiture à Saintes pour l'y garer avant notre départ, j'écoute "Avec philosophie" sur France Culture, traitant du Surréalisme au regard du situationnisme, et se terminant par un court billet dont le sujet est "les métaphores sont mortelles" (à 55 mn de la bande son).

- Abrège...

- Bref je me suis dit qu'une métaphore consiste à extraire une structure syntaxique d'une situation (ou de sa représentation) pour l'appliquer à une autre situation, ou représentation.

- C'est un peu banal comme remarque...

- La question n'est pas d'être original, mais de comprendre la structure de nos mouvements Imaginaires.

En l'occurrence, une métaphore :

  1. part d'une approche de type "choses" (𓁝𓁜
  2. pour en extraire une structure syntaxique de type "mots" (♧𓁝𓁜♡)
  3. et l'appliquer à une autre situation (𓁝𓁜

Bien entendu cette structure reste très lâche, puisque je ne précise pas les niveaux auxquels se déploie cette gymnastique, mais l'important est d'avoir exhumé dans cette structure l'utilisation d'un passage des choses aux mots pour revenir aux choses.

Et je repense à l'exemple du chroniqueur de ce matin :

  1. (𓁝𓁜 Les cloportes (vus par les humains)
  2. (♧𓁝𓁜♡) doivent être éradiqués <=> c'est l'action liant les humains aux cloportes :
    éradiquation : humains → cloportes
  3. (𓁝𓁜) Les Juifs (vus par les nazis)
  4. (♧𓁝𓁜♡) doivent être éradiqués

Il y a comme une "projection" de divers situations sur une seule structure syntaxique.

- Et cet homme qui passe par le portillon ?

-  J'ai une théorie : il s'est dit "je vais sortir", dans un mode de penser (♧𓁝𓁜♡), qui reste dans son esprit associé à l'action de "passer une porte".

Autrement dit :

  • son intention s'est exprimée en mode (♧𓁝𓁜♡);
  • son attention est restée focalisée sur l'idée de "porte à franchir" sans se raccrocher à son environnement immédiat.

La confusion vient de ce que son environnement lui offre effectivement un "portillon" qui peut correspondre à l'action symbolique qu'il a en tête.

Je dirais qu'il reste en mode ♢, sans sortir de son rêve pour atterrir en mode ♧.

- En gros c'est un con ?

- Pas dans la définition que Francis Veber en donne par la bouche d'André Dussolier dans le film "Tais-toi":

Au contraire de notre ami rêveur dans la scène du portillon, le con de Veber ne plane pas en mode ♢, mais reste irrémédiablement rivé au mode ♧, dans l'incapacité même de s'en extraire, comme le montre à l'envie cette scène entre Dussolier et Depardieu autour des taches de Rorschach.

- Tu nous amuses ?

- Oui, un peu, mais comme tu le vois, il y a différentes façons de passer pour un con aux yeux des autres !

Ce soir 27/ 09/ 2024 à Tokyo

- Métaphoriquement, puisque c'était le sujet du jour, on pourrait passer d'une représentation topologique de nos deux Sujets, celui qui passe la porte pour suivre son idée et l'autre, incapable de voir autre chose dans une tache, qu'une tache, deux approches orthogonales entre elles ⊥; à une métaphore mécanique où cette différence serait comme les 2 états du spin d'un électron : deux états quantiques superposés dans l'Imaginaire du Sujet....

Le Sujet sain serait alors celui qui superpose les deux états quand le fou serait exclusivement dans l'un des deux, incapable d'arriver à cet état "intriqué" vu alors comme la "normalité" du Sujet.

- Belle pirouette pour retrouver le titre de ton livre "L'Homme Quantique"...

- Crois-le ou non, en scrollant sur Facebook pour m'endormir, je tombe sur une vidéo de 3mn présentant le fonctionnement d'un calculateur quantique et l'idée m'a sauté dessus. Je devais la scotcher au vol sur le blog avant d'aller récupérer du jet lag...

Ne trouves-tu pas l'image magnifique ?

  • L'Homme sain est dans un état intriqué entre (𓁝𓁜) et (♧𓁝𓁜♡);
  • L'homme malade sort de cet état, pour se fixer dans l'un des deux :
    le malade est un homme décorrélé..

Ça prolonge de beaucoup ce que nous avions remarqué depuis longtemps (Note 4) en disant que :

  • Le paranoïaque est fixé en posture 𓁜;
  • Le névrosé est fixé en posture 𓁝.

- Il y a beaucoup à développer, mais je retiens pour l'instant que la connerie se présente comme une "mesure" du Sujet, qui le fige dans une certaine posture en décalage par rapport à son environnement.

- Oui, de ce point de vue, la connerie est dans l'oeil de celui qui en juge, celui qui rapporte la scène (𓁝𓁜)𓂀. D'ailleurs, Audiart lui-même parle de la connerie comme d'une "mesure" :

 - D'où l'expression "on est toujours le con de quelqu'un"...

- Merci de le rappeler, cela évitera au lecteur de me la servir à l'occasion! 😉


Le 26/ 09/ 2024 - Roissy CDG

- Tu nous amuses, tu nous amuses, mais tu ne peux pas évoquer la Shoah comme ça, juste en passant. Si ton approche peut éclairer les dérives de l'Imaginaire, alors c'est ici l'occasion de t'y essayer.

- Oui, évidemment. Revenons donc à notre topologie de l'Imaginaire, orientée de façon à mettre l'accent sur l'attention du Sujet portée, tantôt aux choses, tantôt aux mots: (Note 5)

Les choses Les mots

Nous avons déjà pas mal cogité autour de la notion d'habitus de Bourdieu (Note. 1), et nous avions situé la question des "classes sociales" en [#]; ce qui se comprend assez intuitivement dans la mesure où "classer" va avec :

  • l'idée d'appartenance (donc le connecteur  propre à l'expression en  [#]);
  • l'idée d'orthogonalité ( propre au principe de répétition qui caractérise [#]);
  • l'idée que nous nous intéressons ici aux relations entre classes (donc en mode ♢).

Après ce que nous avons vu des topos et des schémas ces derniers temps, nous pouvons comprendre l'expression linguistique [⚤] d'un sentiment d'appartenance [#](de type topologique) comme un schéma [⚤][#]. À partir de là, tu peux déjà comprendre ce schéma comme un mécanisme extrêmement réducteur des différences (bonjour Deleuze) entre individus, et des rapports du Sujet à l'Autre.

Maintenant Passons aux deux modes ♧ & ♡ dont le mode ♢ n'est qu'une possible articulation. Nous avons déjà vu qu'en bouclant notre surface Imaginaire comme une sphère S2, autour du point projectif [#]; nous pouvons retrouver le discours de Descartes (Note 2), mais que pourrions-nous dire de plus universel encore à propos du bouclage final entre [∅] et [∃] ?

- Je sens que tu vas nous sortir une grosse Lapalissade, je me trompe ?

- Juge-en par toi-même : le principe le plus profond, sur lequel est basée toute notre approche occidentale du Réel, nous vient de Maupertuis et de son principe de moindre action, d'où découle en particulier, la notion d'entropie. C'est tellement basique, et prégnant que je le mets en [♻], avec la notion de quantité conservée du triptyque d'Emmy Noether, d'ailleurs en y réfléchissant, tu verras qu'ils s'appellent l'un l'autre.

- Bon, soit, et alors ?

- Si je l'applique à ma propre personne, ou au groupe auquel je m'identifie, tu comprendras que l'ordre qui permet à celui-ci de subsister, se nourrit plus ou moins directement de l'énergie récupérée en dehors de cet îlot de résistance locale à la croissance générale de l'entropie.

- Ordo ad chao, ce n'est pas neuf...

- Heureusement ! Mais voyons maintenant les implications que cela entraîne en mode ♧, et même pratiquement au contact du Réel : [∃][⚤]𓁜, dans une logique limitée au 1er ordre, avec le tiers exclu et le principe de non-contradiction : "après moi le déluge" comme disait Louis XV.

Autrement dit, je peux user et abuser de ce qui n'est pas "Moi", ou "la patrie", ou "la tribu" ou "la famille" ou "le parti" ou "la race".

- Donc, l'instinct de conservation est là, extrêmement primaire, et même antérieur à l'Homme...

- Bien entendu. Notre représentation topologique se devait de respecter cet instinct primitif. Maintenant, il faut rentrer dans le mécanisme, et nous intéresser à la représentation, voire la manipulation de cet instinct en mode ♢.


Le 20/ 09/ 2024 - Tokyo :

- Avec le recul, je me rends compte de la difficulté de l'exercice.

- Vas-y par étapes...

- En mode ♢ :

  1. notre opération initiale de "classement" du milieu dans lequel je me représente se fait en [#];
  2. la substance de ces "classes", c.-à-d. ce qui se conserve; se pense en [♻];
  3. l'expression de ce classement s'exprime en [⚤] par une structure de groupe.

- Qu'entends-tu par cette structure de groupe ?

- Que l'orthogonalité entre les éléments des différentes classes définies en  [#]; nécessite la définition d'un élément neutre pour être exprimable en [⚤].

- Je ne vois toujours pas.

- Si par exemple je me définis comme Français, en opposition à la possibilité d'être Anglais ou Chinois, il me faut un élément neutre pour clore l'ensemble de ces sous-groupes : je me compare à "être Anglais" ou "être Chinois" mais pas à "être une machine à coudre" ou "être un papillon". L'élément neutre, c'est ce qui fait "lien" entre les sous-groupes, comme 𓂀 fait le lien entre  𓁝 & 𓁜, ou le 間 (Ma) fait lien entre les kanjis.

- Tu en reviens à notre discussion sur la logique du niveau [⚤], qui n'utilise pas le principe du tiers exclu ?

- Voilà, tu y es. Le non-dit, implicite en [⚤] c'est que tous ces "groupes" sont "Humains". Or, et là nous en venons à la culture occidentale, particulièrement Allemande dans laquelle s'est imposée la pensée nazie : le terreau culturel pré-nazi est Chrétien, avec un impératif d'ordre sémantique ♡(éthique en l'occurrence): "tu ne tueras pas ton prochain".

- À quel niveau faut-il le situer ?

- Puisque cette injonction concerne indifféremment chaque individu que le Sujet peut identifier, je dirais que:

  1. C'est un choix éthique s'appliquant directement au plus proche du Réel 𓁝[⚤]↓[⚤]𓁜;
  2. Quel que soit le choix G fait pour classer les individus, le passage par [⚤] respecte cette injonction :
choix d'une structure G 𓁝[⚤]  
   
𓁝partie de G 𓁝[⚤]𓁜 Structure G
   
  [⚤]𓁜  élément𓁜 de G

- Autrement dit, pour un Allemand, de culture Protestante, tout individu, qu'il soit Juif ou "Aryen", selon la classification nazie G, doit être respecté en tant qu'Être Humain ?

- Voilà, c'est ce schéma que les nazis ont cherché à détruire dans la société Allemande. D'où le rôle de la métaphore : "les Juifs sont comme des cafards" (quelle horreur de devoir écrire cela pour démonter ce mécanisme).

On ne s'attaque pas directement à une éthique fortement ancrée 𓁝[⚤]↓[⚤]𓁜; mais on va juste dire que "les Juifs", n'entrent pas dans le groupe général constituant l'Humanité.

- Et, si je te suis bien, à toute une structure de représentation des groupes sociaux se déployant entre ([⚤][⚤][♻]), ce que tu désignes par une attention portée sur "les choses", les nazis vont en substituer une autre propre aux cafards ?

- Oui, or dans cette dernière — i.e. "les nuisibles" — notre injonction éthique ne s'applique pas ! (nota : ça ne marcherait pas avec des Bouddhistes bon teint).

Dans l'affaire, la manipulation consiste à remonter ♧↑♡ par étapes :

  • En [⚤]:  : d'une équivalence entre signifiants : "Juifs = cafards", avec une logique du 1er ordre qui respecte le tiers exclu : si c'est un cafard ce n'est pas un humain.
  • En [⚤]: à un changement de syntaxe : il s'agit de passer du rapport entre Humains (tu ne tueras point) aux rapports entre Humains et vermine (à exterminer);
  • En [⚤]: en ne touchant pas à l'éthique : "respecter ses semblables".

- Pour en revenir au rôle de la métaphore ?

- Il y a un effet pernicieux dans son utilisation qu'il faudra approfondir, mais tient me semble-t-il au passage d'élément𓁜 à 𓁝partie : [⚤]𓁜𓁝[⚤]​​​, impliquant nécessairement un 𓁝choix du groupe G dans lequel s'inscrit ladite 𓁝partie𓁝[⚤]𓁝[⚤]𓁜 et n'est pas forcément explicité par celui qui propose (ou impose) l'équivalence initiale des signifiants.

Comme tu le vois, il y a bien une bascule entre approches selon "les choses" ou "les mots", mais c'est un peu plus complexe que je ne l'imaginais au départ!

- Discussion à poursuivre donc...

Hari

Note 1 :

Voir les 3 articles :

Il faudrait y revenir pour intégrer nos nouveaux développements, bien entendu.

Note 2 :

Note 3 :

Voir Suzanne tourner dans son Imaginaire comme un écureuil en cage :

Note 4 :

Voir :

- L'article date de 2014, c'est dire qu'à l'époque je n'avais pas encore l'idée des différents "modes". Autrement dit j'étais moi-même dans une perspective purement de type (), sans articuler les 3 modes ♧ ♢ ♡ entre eux.

- Tu pourrais donc, avec le recul, te décrire comme figé en mode ♧ et voir les développement récents comme dus au développement de ta représentation de l'Imaginaire en mode ♢ ?

- Exactement. Cette mise en perspective nous permet alors de voir que dans cette évolution de ma propre représentation, la folie apparait toujours comme un "blocage".

  • Soit comme initialement et dans une perspective limité à (𓁝𓁜), comme le Sujet figé en 𓁜 ou 𓁝;
  • Soit en distinguant nos deux perspectives  (), et (♧♡) comme une fixation sur l'articulation des mots ou des choses.

Il faudrait rapprocher tout ceci de l'approche psychanalytique pour en comprendre les perspectives cliniques...

- Tout un programme !

Note 5 du 03/ 10/ 2024 - Tokyo :

- Toujours et scrollant sur Facebook avant de m'endormir, je tombe sur ceci qui aidera peut-être à sentir la différence entre porter son attention en (𓁝𓁜) ou en (♧𓁝𓁜♡);

J'ai effectivement mal lu la ligne du haut, car mon attention était en (♧𓁝𓁜♡), autrement dit :

  • Je cherchais le sens 𓁝[⚤]
  • des mots [⚤]𓁜
  • en analysant la syntaxe de la phrase [⚤]𓁜

qui est effectivement en décalage par rapport à ce qu'une attention porté aux objets (𓁝𓁜) m'aurait donné à voir.

Et c'est après avoir "compris" le sens de la phrase (𓁝[⚤]𓁜⏩𓁝[⚤]𓁜)𓂀, que j'ai modifié mon attention, pour vérifier a posteriori, qu'effectivement, je n'avais pas lu ce qui était écrit.

- Tu me sembles bien attentif à ce genre de gymnastique ?

- D'être au Japon m'y aide fortement ! Je ne voudrais pas porter de jugement hâtif après si peu de temps passé ici, mais je suis impressionné par la quantité de signes qui balisent le parcours d'un quidam lambda (comme moi), dans les rues de Tokyo, les couloirs de métro, voir les explications détaillées quant à l'usage des toilettes, de la façon de se laver les mains. 

Un exemple pour te situer l'ambiance : nous étions avec Midori sur l'impériale d'un car à ciel ouvert pour visiter  Tokyo. Il se trouve que nous étions au 5è rang, quand seuls les 2 premiers étaient protégés d'un petit auvent comme la pluie. Bien entendu la conductrice - accompagnatrice - nettoyeuse - seule maîtresse à bord du car, nous avait distribué des survêtements de pluie légers en prévision.

Avant le départ, Midori avait demandé à se mettre à l'avant, vu que les 3 premiers rangs étaient vides. Refus de la conductrice, expliquant que les places étaient distribuées en fonction des réservations, et que ces places étaient donc achetées par des personnes, même si elles ne s'étaient pas présentées au départ.

Après l'exposition de la scène, le drame : une pluie légère vient à tomber. Nos survêtements, mais Midori toujours frileuse (ainsi d'ailleurs que deux voisins qui semblaient Japonais) se disent que c'est trop bête de rester au froid, quand il y a de la place à l'avant, et tous trois s'y installent.

Aussitôt, la conductrice avertie par la caméra de surveillance interrompit son commentaire pour les rappeler à l'ordre. De plus, outrée de tant de sans-gêne, elle profita du premier feu rouge pour les ramener dans le droit chemin, c'est-à-dire à leur place.

Vois-tu la différence entre les deux points de vue ?

- Je crois que oui :

  • Midori a acheté "une place", et dans tous les pays que nous avons traversés sur la planète —et il y en a quelques-uns !— les gens "s'adaptent" à la situation : ils sont dans une approche (𓁝𓁜).
  • Ta chauffeuse quant à elle me semble plutôt focalisée en (♧𓁝𓁜♡) sur son interprétation de "l'achat d'un billet", et les normes de placement en fonction de la place dans la liste d'attente lors de la réservation, sans s'occuper de la réalité de la situation, et surtout sans chercher le moins du monde à s'y adapter... 

La chauffeuse me semble un peu dans la situation de notre passeur de portillon, non ?

- Ah ! C'est là ton regard d'Occidental ! Elle te paraît à côté de la plaque selon tes critères, mais dans une culture japonaise, n'a-t-elle pas eu raison d'intervenir ?

- Comment ça ?

- Lorsque Midori s'est levée, je ne l'ai pas suivant parce que j'ai senti que ce n'était pas approprié. Il y avait autour de nous une trentaine de personnes qui aurait pu faire mouvement vers ces six malheureux sièges à l'avant et, à la limite (imagine une bande de gamins du 93), ça aurait pu conduire à une foire d'empoigne. Le respect d'une règle, fût-elle en décalage par rapport à la réalité des choses, permet de limiter les frictions entre individus, et de baisser leur niveau de stress du à la collectivité : ils ne sont pas en compétition entre eux, mais s'astreignent à une règle commune...

- Mouais, il y a malgré tout des libertés à la marge. Les cyclistes font du slalom entre les piétons, et tout le troupeau de piétons n'attend pas 5 mn de passer au vert lorsque la rue est déserte à 10h du soir...

- Heureusement qu'il y a encore un peu d'huile dans les rouages, sinon toute cette belle mécanique serait complètement enrayée. Comme en tout, il faut savoir passer de (𓁝𓁜) à (♧𓁝𓁜♡) !

Je te propose ceci : le passage de (𓁝𓁜) à (♧𓁝𓁜♡) peut être vu comme un accélérateur d'ordre.

- Oui mais alors l'ordre pour l'ordre : c'est sans doute un moyen de gagner en efficacité, mais certainement pas un gage d'efficience., et là je te renvoie à tes souvenirs de jeunesse et à Jean-Louis Lemoigne.

Et puis, si ton plaisir de touriste est de te laisser surprendre par ton environnement (𓁝𓁜), en t'y pliant au grès d'une intention fluctuante, cette obsession de l'ordre devient vite pesante.

- Oui, comme se faire refouler de la salle de petit déjeuner pour ne pas avoir prévenu la direction la veille de ton intention, ou encore devoir choisir ton repas sur une machine à l'entrée du restaurant, avant d'en discuter avec un serveur, ou de demander conseil à une agence de voyages sourde à ta demande car elle ne sait que prendre des billets de train à ta place.

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