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Sur les traces de Lévi-Strauss, Lacan et Foucault, filant comme le sable au vent marin...

L'Homme quantique

Moi-Peau & forme canonique

Gilganesh

Le 03/ 12/ 2024 :

- Tu m'expliques ?

- Ne t'énerve pas et essaie de suivre le fil. En relisant mon dernier article sur le "Moi-Peau", par association d'idées, j'en suis arrivé à comparer la relation Sujet/ Moi à celle que certains théoriciens ont établie entre un trou noir et son horizon, où toute l'information du trou noir est inscrite, c.-à-d. sur la surface d'une sphère S1, dont le rayon est donné par la formule de Schwarzschild. De là, je me souviens en avoir déjà parlé sur ce blog, dans deux articles au titre évocateur : "L'univers holographique : un mythe moderne #2".

Et je me retrouve encore une fois à la case départ : la forme canonique des mythes de Lévi-Strauss, dont je parlais déjà dans "L'Homme Quantique" il y a bien une dizaine d'années.

- Et cette image de Gilganesh ?

- Ne voulant pas reprendre pour la nième fois l'exemple de la Potière Jalouse des Jivaros, je me suis dit que nous avions là le plus vieux texte relatant une épopée mythique; et si tu y penses bien, Gilganesh, qui recherche la source d'immortalité au Liban, revient bredouille dans sa bonne ville d'Uruk, pour y régner en paix et avec sagesse.

- Bref, tu retrouves en lui la figure de l'Oedipe de Colone de Lacan, d'où tu étais parti dans ton texte "Oedipe déconne".

- Oui, l'un comme l'autre deviennent "hommes" à la fin de leur épopée, de leur discours.

- Bon, d'accord sur l'illustration, mais encore ?

- Toute la série d'articles écrits dernièrement pour aboutir à ce "Moi-Peau", a démarré par un questionnement : quel philosophe a-t-il pris en compte, dans ses constructions, ce fait banal que "un bord n'a pas de bord". Banal dans son évidence, mais qui ne relevant d'aucune dialectique, a permis l'essor de toute la topologie, jusqu'à se retrouver dans les groupes d'homologie et de cohomologie, bref, à la racine des topos de Grothendieck.

Par ailleurs, il y a une répétition dans la façon que j'ai de toujours revenir à cette forme canonique qui est l'indice d'un manque de ma part : quelque chose dont je n'ai pas encore senti l'évidence.

- OK, d'un côté, l'aboutissement d'une démarche topologique, de l'autre un échec répétitif quand à la forme canonique, et alors ?

- Rien de ce que j'ai pu dire de cette forme canonique jusqu'à présent n'est d'ordre topologique. La création mythique se présente comme une façon de surmonter une contradiction dialectique.

- Pour la faire courte : tes développements aboutissant au Moi-Peau sont en [#] quand tes commentaires sur la forme canonique se cantonnent à une répétition [⚤]𓁝𓁜[#] ?

- Voilà, et une fois exprimé ainsi, on peut dire, comme en maths, que "le problème est bien posé".

- C'est-à-dire ?

- Pour avoir une chance de correctement rendre compte de la pensée mythique, il faut faire le saut 𓁝[#]𓁜 ⏩𓁝[#]𓁜, et considérer cette forme canonique d'un point de vue topologique. 

- Concrètement ?

- C'est là qu'il faut réfléchir un peu...

- Bon, tu en étais ici ce matin : 

"- Au moins, y a-t-il une congruence dans toutes ces représentations, soit en mode ♡, où le Sujet cherche un sens à sa vie, soit en mode ♧, dans lequel les physiciens pataugent joyeusement ces temps-ci en jonglant avec leurs concepts "d'énergie du vide" ou "d'énergie noire" [...], mais quid du mode syntaxique ♢?
- Si tu te réfères au langage de la théorie des catégories c'est évident : tu en reviens à la propriété universelle attachée à l'objet initial le plus général, à savoir le vide ∅.

  • Mode ♡ :
    •  Komdalani/ Sujet
    • Sujet/ Moi
  • Mode ♢ :
    • Objet initial / Catégorie
  • Mode ♧ :
    • Vide/ Univers (Big Bang)
    • Trou noir/ horizon (Rayon de Schwarzschild)

- Il y a là un motif que se répète dans cette collection de type (𓁝𓁜).
- Ce qui nous force à l'examiner dans une approche (♧𓁝𓁜♡), examen nous menant tout droit à la forme canonique des mythes..."

Nous sommes évidemment dans une approche (♧𓁝𓁜♡), cherchant à identifier une structure syntaxique, en mode ♢...

- Ça, nous le savons, et donc ?

- Nous sommes nous-mêmes en mode ♢, marqué par la théorie des groupes en [⚤], qui est par essence une "circularité" (voir "Une idée collante #3"). 

- Et donc, tu cherches un lien  entre l'essence d'un bord, qui en [#] "n'a pas de bord", et se traduirait en [⚤] par cet aspect "circulaire" ? En bref, un schéma [⚤][#] extrêmement primitif.


Le 04/ 12/ 2024 :

- J'ai l'impression que tu prépares un terrain de rugby pour un tournoi de ping-pong...

- C'est par précaution. Effectivement, on pourrait se dire que si l'Imaginaire où l'on joue Platon se réduit à 

 

il n'y a peut-être pas besoin d'ouvrir le mode ♢ et le niveau [#] pour présenter la pensée mythique :

𓂀   𓂀
      [∅]   [∅]   [∅]      
                 
[∃]   [⚤]   [#]   []   [∅]
                 
[∃]   [⚤]   [#]   []   [∅]
                 
[∃]   [⚤]   [#]   []   [∅] 
                 
    [∃]   [∃]#   [∃]    
𓂀   𓂀

avec la fermeture que l'on connaît :

- Par précaution ?

- Oui car ne connaissant rien à l'ethnologie, je ne sais pas a priori où se joue la partie. En particulier à quel niveau situer le système totémique ?

- Il s'agit d'une partition de la tribu, je dirais au niveau [#] ?

- Tu vois : nous ne sommes déjà plus dans le schéma Platonicien. Par ailleurs, si le récit mythique est bel et bien un moyen de faire coller le sens en ♡ à l'observation en ♧, cette médiation est le propre du mode ♢, dans une approche (♧𓁝𓁜♡).

- Comment expliquer qu'une pensée primitive s'inscrive dans un Imaginaire plus complexe que toute la philosophie Grecque ?

- La philosophie, et non la structure sociale. Pense au rôle des esclaves dans la cité Grecque. Sous réserve d'inventaire bien qu'ils soient indispensables à la marche de la cité, leur place n'est pas théorisée dans la cité idéale de Platon, pourtant gouvernée par les philosophes. De même qu'il y a une grande différence entre la pensée consciente et inconsciente.

- Et lorsque tu parles de "révolution" galoisienne ?

- Il faudrait effectivement relativiser ce terme, en précisant que la théorie des groupes est plus une prise de conscience de symétries déjà là que d'une pure "création" sortie ex nihilo de l'esprit de Galois. Il a permis d'identifier des mécanismes jusque-là non théorisés, voire inconscients.

- Soit, revenons-en à notre forme canonique.

- Et à nos chers Jivaros. Tentons de situer le problème posé par le totem attribué à la femme dans cette société.

1/ Position sociale de la femme Jivaro :

Dans un premier temps, shuntons toute médiation : nous sommes dans la relation ♡=>♧ de notre schéma.

  • La femme est identifiée par son totem : l'engoulevent, en [⚤];
  • Sa classe est déterminée par son appartenance à son totem en [#];
  • Le jugement porté sur le totem "Engoulevent" est en [♻].

Ce qui donne quelque chose comme ça :

  [⚤]   𓁝[#]𓁜
engoulevent
𓁝→𓁜 𓁝[♻]𓁜
criard
𓂀
         
  [⚤]𓁜
femme
𓁝→𓁜 𓁝[#]𓁜
totem
𓁝→𓁜 𓁝[♻]𓁜
jalouse
𓂀

Pour rappel,

  1. Le connecteur propre au niveau [#] est l'inclusion : femme⊂totem⊂tribu Jivaro;
  2. La logique propre au niveau [#] :
    • respecte le tiers exclu (un individu ⊂ à un totem exclusif)
    • n'utilise pas le principe de non-contradiction (il y a plus de 2 totems T dans la tribu et ¬¬T n'implique pas T).
  3. Les postures 𓁝 en mode ♡ représentent des choix (ici de société)
    • 𓁝[#] : Choix de représenter la classe des femmes par l'Engoulevent;
    • 𓁝[♻] Choix du jugement porté sur le totem:  "criard".
  4. Les postures 𓁜 en mode ♧ correspondent à une identification :
    • [⚤]𓁜 la femme;
    • [#]𓁜 son totem engoulevent;
    • [♻]𓁜 la quantité conservée :  "toutes des jalouses" c'est 
      • tiré de l'observation : (les femmes [#]𓁝𓁜[♻]𓁜)([♻]𓁜 jalouses)
      • conforme au jugement sur le totem dans le mouvement 𓁝[♻][♻]𓁜

Maintenant l'observation :

"les femmes sont potières" repérées en [⚤]𓁜, ce qui va à l'encontre des caractéristiques du totem engoulevent.

La réaction "sociale" : 

  • (𓁝𓁜) Dans l'approche objective : on ne touche pas à la structure sociale, pas question de changer de totem,  de prendre comme totem le fournier (à l'opposé de l'engoulevent, comme le remarque Lévi-Strauss).

  • (♧𓁝𓁜♡) Cependant, il convient de médiatiser le hiatus entre jalouse et potière par un récit mythique.

- D'où ton idée que le mythe est en mode ♢ une réflexion sur une approche (♧𓁝𓁜♡) de l'Imaginaire, ici de la société Jivaro.

- Oui, difficile à exprimer simplement, mais oui, et la recherche de cohérence passe par le récit, en [⚤].

- Si je te suis bien :

  • Dans le schéma on passe de ♡=>♧ à ♡=>♢=>♧;
  • Le rafistolage se fait "du bout des lèvres" en [⚤].

- Effectivement, il n'y a pas de remise en cause du jugement général porté sur les femmes : elles restent des "jalouses". Il s'agit juste de faire entrer dans le cadre leur rôle de "potières" qui est du domaine de l'observation en [⚤].

- OK, donc le mythe est un récit en [⚤]. Et maintenant ?

- C'est le moment de mettre notre propre syntaxe à l'épreuve :

2/ Discours sur la femme - jalouse au sein de la tribu :

Le récit en [⚤]♢ est une transcription de la position sociale de la femme en [#](pas forcément représentable en [#] par les Jivaros eux-mêmes). 

Il faut tout de suite remarquer que le passage [⚤]←[#] implique deux choses : 

  1. Le connecteur propre au niveau [⚤] est l'appartenance : femme∈totem∈tribu Jivaro;
  2. La logique propre au niveau [⚤] :
    • Ne respecte plus le tiers exclu.

- Et pourquoi ?

- L'introduction d'une structure dont la plus simple est une structure de groupe, introduit un élément neutre, qui par définition participe à toutes les partitions en sous-groupes.

- Cette idée de structure de groupe est-elle pertinente dans l'étude des sociétés premières ?

- C'est en tout cas ce à quoi était parvenu Lévi-Strauss qui, grâce à son ami André Weil, identifie un groupe de Klein dans les structures de la parenté de certaines tribus amérindiennes. Dans le cas qui nous occupe, il convient de concevoir la femme comme "jalouse" ⋃ "potière".

- Ce qui te conforte dans l'idée que cette médiation est bien en [⚤]♢ ?

- Exactement.

Engoulevent  Déesse  𓁝[⚤]  domaine des dieux 𓂀
  choix totem  
F. jalouse  totem   𓁝[⚤]𓁜 engoulevent oiseau 𓂀
  identification femme  
  [⚤]𓁜 femme 𓂀

Nous avons la première partie de notre forme canonique : la femme est comme l'engoulevent au regard de son caractère.

3/ Observation de la potière :

Ce qui remonte de l'observation n'est pas conforme au caractère de l'engoulevent.

Engoulevent ∈ Dieux  𓁝[⚤]  domaine des dieux 𓂀
  choix totem  
F. potière  totem   𓁝[⚤]𓁜 engoulevent 𓂀
  identification femme  
  [⚤]𓁜 potière 𓂀

- Autrement dit la Femme ∈ et ∉ à son totem.

- Oui, et c'est envisageable en [⚤] !

- Et ça te mène où ?

- Une fois la situation exposée de cette façon, la réponse est immédiate :

la Femme est à la frontière entre Engoulevent et non-engoulevent

La pensée mythique fait preuve ici d'une grande subtilité politique : 

  • en [#] : la femme appartient au totem engoulevent ;
  • en [⚤] : ce qui n'est pas incompatible avec sa fonction de potière.

- Soit, mais comment exprimer ce ∈ et ∉?

- Pour délimiter cet espace de respiration de la femme, entre l'être et le non-être de l'engoulevent, il faut commencer par le tuer symboliquement le totem ...

- Où tu retrouves cette mort d'Engoulevent, pour donner naissance à la potière jalouse ?

- C'est tout du moins à cette perspective que nous conduit notre représentation topologique de l'Imaginaire. En exercice, je te laissesvérifier que ça colle parfaitement à l'expression qu'en donne Lévi-Strauss (voir "Le mythe de la potière jalouse", grosse évolution dans mes explications)!

Pour préciser la séquence qui conduit à la formation du mythe : 

[⚤] Engoulevent mort de Engoulevent   𓂀
     
[⚤] engoulevent non
engoulevent
  Femme 𓂀
     
[⚤] jalouse potière terre à
poterie
  𓂀

Le mythe proprement dit, qui raconte la chute d'Engoulevent provoquant sa mort et le don de la terre à poterie dans la dispersion de son corps:

  •  shunte le mode ♢, dans la chute ♡=>♧ pour expliquer la terre à poterie;
  • renforce l'existence du totem pour identifier la femme à son totem dans la descente ♡=>♢.

Avec le recul, la structure mythique apparaît admirable ! Digne de nos meilleurs Jésuites !

- Ça ne te rappelle pas la déconstruction de Derrida ?

- Interrogeons Perplexity (j'ai coupé au plus court) ::

 "🤖 : [...] Imbrication des oppositions :
La déconstruction révèle comment les oppositions binaires (comme présence/absence, homme/femme) sont souvent hiérarchisées, avec un pôle privilégié au détriment de l’autre. En déconstruisant ces oppositions, Derrida cherche à montrer leur interconnexion et leur dépendance mutuelle."

On retrouve effectivement un pôle privilégié au détriment de l'autre (l'un est la mort de l'autre), et l'interconnexion, qui renvoie à la frontière entre les deux.

- À propos de frontière, si tu bouclais cet article là-dessus ?

 - Tu vois bien qu'en inscrivant le mythe (qui est un récit, de niveau  [⚤]), dans un contexte plus vaste, topologique, cette structure mythique apparaît comme un discours autour d'une "frontière".

Et pour créer cette "frontière", le mythe propose de passer  nier un concept "a", afin d'en voir la frontière entre "a" et "non a".  

Pour en revenir au "Moi-Peau" tu as, bien entendu, le Moi à la "frontière" du Sujet, qui nécessite quelque part d'en nier l'existence...

- Le Sujet comme chat de Schrödinger ?

- Pas con !

- Et la terre à poterie dans tout ça ?

4/ Le vide comme objet initial :

- Dans sa chute de la Déesse Engoulevent se disperse au sol pour donner la terre à poterie. On peut le voir comme une métaphore d'une mort symbolique : [⚤]𓁜𓁝[⚤], tournée vers 𓁝[∅], suivi d'une "chute directe en mode "objectif" ♧ où s'observe la terre à poterie, 𓁝[⚤]↓[⚤]𓁜 au plus proche du Réel [∃][⚤]𓁜.

Maintenant, cette "mort" permet en mode syntaxique ♢, d'envisager la femme comme "au bord" de Engoulevent et non-engoulevent, ce non-être ne demandant qu'à être habité.

- C'est là que tu vois ce vide comme objet initial d'où "tout peut advenir" ?

- C'est une façon commode de se le représenter. De ce point de vue, nous aurions notre terre à poterie promue comme élément d'une structure de groupe en ♢, dans une montée : [⚤]𓁜𓁝[⚤], à la place laissée vaquante par non-Engoulevent.  

- En résumé, d'une opposition stricte, dans une logique du 1er ordre en mode ♧ entre "potière" et "jalouse", cette médiation syntaxique ♢ permet d'articuler les deux termes dans une "symétrie" dont la femme serait l'élément neutre, à la frontière des deux ?

- C'est une façon élégante de se représenter la chose, non ?

- Amen

Hari

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