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Sur les traces de Lévi-Strauss, Lacan et Foucault, filant comme le sable au vent marin...

L'Homme quantique

Le mythe et ses logiques

[#][#]

Case à palabres Dogon

Le 05/ 12/ 2024 :

- De mes amis Africains, j'ai acquis l'expérience de leur grande connaissance des rapports humains, et de leur aptitude à en user dans le domaine politique. Cette case à palabre Dogon, par exemple, illustre à mes yeux cette culture ancestrale de la discussion et de la négociation au sein de la tribu.

- Explique ?

- Ce toit immense fait de branchage isole l'assemblée de la chaleur ça, c'est pour le confort, mais remarque la faible hauteur de la case ne permettant pas de s'y tenir debout. Ça, c'est pour qu'un intervenant énervé ne puisse pas se lever dans sa colère pour agresser un contradicteur.

- Où veux-tu en venir ?

- Au fait qu'en remontant le cours de l'histoire, nous devons prendre en compte le fait que les liens interpersonnels étaient beaucoup plus étroits dans une tribu perdue dans un monde hostile, telle que celle des Jivaros en pleine forêt amazonienne. Les contraintes sociales y sont aussi prégnantes que pour un  salaryman (サラリーマン) à la Japonaise au sein de sa compagnie.

- Pour en venir au mythe ?

- Il répond à une nécessité très fortement ressentie d'assurer la cohésion sociale, c'est du moins la thèse que j'aimerais vérifier auprès d'ethnologues disponibles...

- Faute d'en avoir un sous la main, je te propose de continuer.

- Dans le dernier article ("Moi-Peau & forme canonique"), j'ai fait une supposition quand au contexte social Jivaro., sur laquelle je voudrais revenir en détail ici. Soit :

  1. La société Jivaro est établie sur un système totémique dans lequel la femme s'est vue attribuer l'oiseau engoulevent. Oiseau criard, perturbateur et de mauvaise compagnie;
  2. La femme est potière ce qui ne colle pas avec son totem;
  3. Pour la paix sociale, il ne faut pas toucher à la structure totémique ancestrale;
  4. Pour la paix sociale, il faut évacuer d'une manière ou d'une autre la contradiction logique entre ce qu'est la femme et ce qui la représente dans la société.

Mon hypothèse, donc, est que le récit mythique a un but social, et qu'il doit respecter une certaine logique pour recueillir l'assentiment de tous.

- Et tu en viens à ton histoire de logiques, au pluriel ?

- Oui, et c'est là que notre approche a pu nous aider dans la mise à plat de la structure du mythe, ce qui n'était pas explicite dans la forme canonique de Lévi-Strauss.

- Tu ne va pas tout reprendre ?

- Non, mais focalisons-nous sur les différentes logiques en fonction des modes ♧ ♢ ♡  et des niveaux [⚤] & [#] Imaginaires. (Note 1) Notons dans notre tableau :

  • (P∨¬P) : Principe du tiers exclu
  • (¬¬P=P) : Principe de non-contradiction 
  • L1 : Le respect de ces deux principes définit la logique du 1er ordre.
  [⚤] [#]
L1 (P∨¬P)
(¬¬P=P) (P∨¬P)
L1 (P∨¬P)

Nous nous intéressons particulièrement ici aux logiques propres au niveau syntaxique,♢ celui décrivant les relations. Il est peut-être plus simple de sentir l'évidence de ce tableau en utilisant une approche topologique, et en parlant de "bord".

- Encore ?

- Plus que jamais ! Je ne reviens pas en détail sur le fil de nos réflexions nous y ayant menés, mais en résumé :

  • En [#] :
    • dans la déconstruction homologique, dimension par dimension de l'objet, soit pour l'exemple un volume en 3D. Nous nous sommes longuement attardés au fait que la surface 2D qui le "borde" n'a pas de bord en 1D, mais il y a autre chose d'important : le bord 2D n'est pas au même "niveau de déconstruction" de l'objet que le volume 3D. C'est un moyen mnémotechnique de comprendre que le tiers est exclu de la description : la frontière 2D entre 2 objets 3D n'est pas un volume 3D.
    • Par contre, le principe (¬¬P=P) n'est pas forcément respecté : ce qui n'est pas une surface 2D peut être soit un volume 3D, soit une ligne 1D. Il faut d'ailleurs naviguer entre ces 3 niveaux de description de l'objet pour définir la surface bordant son volume.
  • En [⚤] :
    • La structure de groupe ne respecte pas le principe du tiers exclu : soit un état a, il y a un symétrique et un élément neutre tels que a.a-1 = e, et e, au même titre que a et a-1 fait partie du groupe de symétrie (a, a-1, e);
    • Par contre le principe de non-contradiction est bel et bien respecté dans ce groupe (a, a-1, e) : ¬a = a-1 et ¬a-1 = ¬¬a = a.

- Pas très évident...

- Il faut adopter le bon point de vue pour que ça le devienne. (Note 2)

  • En [#] : Ce niveau est proprement celui de la géométrie et de la topologie, où l'on distingue parfaitement comme "orthogonaux" entre eux, c.-à-d. sans rapport entre eux, des concepts de dimensions différentes. Je te rappelle que c'est ce qui nous a conduits à comprendre que le principe de répétition à ce niveau porte sur l'orthogonalité : on passe de 1D à 2D par D⊥D, puis 3D par D⊥D⊥D etc.
  • En [⚤] : nous sommes au niveau du discours et du discret, avec le concept de "successeur", sur une dimension unique : celle de la narration. La seule différence tient au mode :
    • En [⚤] : construction de ℕ indéfini;
    • En [⚤] : fermeture de l'Imaginaire sur la recherche de symétries : de ℕ ou passe à ℤ et des ensembles à la théorie des groupes, puis des catégories.

Et c'est là sans doute où tout se joue : cette "fermeture Imaginaire" en [⚤] est l'expression discrète d'une frontière au sens de la topologie en [#]. Fermeture de toute équation par un zéro : (...)=0, que l'on retrouve sous forme d'élément neutre dans un groupe, frontière commune à tous les sous-groupes d'un groupe (puisque e est commun à tous les sous-groupes), et c'est au cœur du théorème de Lagrange. En bref : ici, la frontière "e" est du "même niveau descriptif" que les autres éléments a & a-1 de la structure.

- Cela revient à dire que dans le passage [⚤][#] il y aurait une sorte d'écrasement de la perspective topologique ?

- Exactement, et c'est au cœur du passage homologie/ cohomologie, nous y reviendrons en détail car c'est fondamental pour bien sentir ce qui est en jeu dans ce schéma [⚤][#].

- Nous sommes loin des Jivaros.

- Eh non justement ! Tout nous y ramène.

  1. La structure sociale de nos Jivaros est en [#], et c'est elle qu'il faut préserver. C'est un choix de société déterminé par le mode ♡, je te renvoie à "Moi-Peau & forme canonique" pour les détails. Dans cette logique de "castes", la femme est associée à son totem, et pas à un autre. En particulier, il n'est jamais question qu'elle passe sous celui du fournier (oiseau antithétique de l'engoulevent), ce dont s'étonne Lévi-Strauss.
  2. Il y a un hiatus sur deux modes :
    • En [⚤]♧ : la femme est potière, et c'est une fonction réservée aux femmes chez les Jivaros;
    • En [⚤] : la femme est jugée "jalouse" comme son totem est criard.

Note que ce hiatus est "évident" parce que la logique attachée aussi bien à l'observation qu'au jugement est du 1er ordre.

Et c'est là toute la beauté de la pensée mythique, digne des plus grands politiques ! D'un ordre strict (le tiers exclu), tu te sers du terme embrassant (ici le totem engoulevent), pour, en le tuant symboliquement (la déesse Engoulevent), créer un groupe avec la femme en élément neutre, (Engoulevent, Engoulevent-1, femme), c.-à-d. "à la frontière" entre les deux termes.

Ce changement de logique [⚤][⚤] et  [⚤][⚤] "magique" par la médiation de ce mythe en [⚤], utilisant une logique affaiblie, laisse soigneusement dans l'ombre toute remise en cause d'une structure profondément ancrée dans les mœurs et qu'il n'est pas question de remettre en cause.

Qui a dit que l'homme est avant tout un animal politique ?

- Aristote je crois.

- Décidément, nous ne sortirons jamais de la pensée Grecque ! 


Le 09/ 12/ 2024 :

- Je crois que nous tenons ici quelque chose d'intéressant, et trouve ses prolongements jusque dans les mathématiques d'aujourd'hui.

- Nous n'en finirons donc jamais ? Et d'abord de quoi veux-tu parler ?

- Des deux bouts de la chaîne qui part de la pensée mythique pour aboutir à la logique contemporaine;

Tout d'abord, concernant la chute de la Déesse Lune pour donner la terre à poterie, j'ai un doute quant au vocabulaire utilisé par Lévi-Strauss-Strauss et son emploi du mot "potière"..

- Quoi de plus facile à comprendre ?

- Suis le schéma en détail :

Engoulevent tombe et meurt La femme est jugée La femme est observée    
𓁝[⚤]𓁜←𓁝[⚤]𓁜 𓁝[⚤]𓁜←𓁝[⚤]𓁜   Le Sens donné 𓂀
  Le jugement  
Autre [⚤]𓁜 Objet 𓁝[⚤]𓁜 Les relations 𓂀
  ↑ L'observation  
[⚤]𓁜   Objet[⚤]𓁜 L'objet 𓂀
Sa dépouille se disperse en terre à poterie relation à
l'Autre
relation à l'objet    

Comme tu le vois ce n'est pas la même chose de juger la femme ou de l'observer dans son rapport au quotidien; et donc, puisqu'elle est associée à son totem, il n'est pas indispensable de caractériser son activité en la réifiant d'un mot tel que "potière": on peut en rester au constat "elle fait de la poterie". Et c'est pourquoi j'aimerais bien voir si mon hypothèse se vérifie en interrogeant un linguiste - ethnologue qui aurait quelques notions de Jivaro.

- Et tu en as trouvé un ?

- Deux noms ressortent, je tenterai d'entrer en contact. (Note 3)

- Bon, OK, mais là tu fais dans le pointillisme.

- À l'autre bout de l'histoire, si je puis dire, je me demande si nos matheux modernes ont beaucoup avancé dans leur rapport aux logiques déjà mises en œuvre dans les "sociétés froides" selon le terme de Lévi-Strauss.

- À quoi penses-tu ?

- Souviens-toi de la définition que l'on donne de l'objet classifiant de la catégorie des Ensembles, à partir de quoi l'on définit la logique du 1er ordre : c'est "l'ensemble des parties" du singleton {*}, c.-à-d. l'ensemble vide et lui-même, soit : P={{ };{*}}. Cette "partir vide" { } étant présentée comme ce qui est "entre"

  • l'élément singleton "*",
  • l'ensemble qu'il forme {*}, précisément avec les accolades qu'on lui attribue pour en parler.

- Autrement dit la structure d'ensemble { } est comme la peau du singleton {*} et "il n'y a "rien" entre l'élément et cette frontière ? Je te sens critique ?

- Un peu, oui, car cette présentation booléenne, tirée d'un point de vue topologique, implique des changements de logique qui ne sont pas très explicites. Reprends notre tableau : 

  [⚤] [#]
L1 (P∨¬P)
(¬¬P=P) (P∨¬P)
L1 (P∨¬P)

Le logique booléenne en [⚤] apparaît ici comme un "oubli" d'une structure mythique s'exprimant en [⚤]. impliquant l'exclusion du tiers à la frontière entre l'être et le non-être. (Note 4)

L'acte créatif consiste à tuer Engoulevent, pour définir la place vide qui fait système avec le totem engoulevent, et placer la femme à la frontière...

Mais cet acte représenté en [⚤], laisse un vide je peux l'habiller par n'importe quoi, comme le rapport de la femme à la terre à poterie... N'est-ce pas ainsi que l'on définit la propriété universelle de la catégorie des Ensembles, qui est précisément cet ensemble vide { } ?

- Pas très clair, essaie une autre approche.

- En pensant à J.P. Changeux, on peut décrire ainsi l'acte créatif consistant à tuer Engoulevent :

  1. [⚤]𓁜𓁝[⚤][∅]​​​ : Je crée une situation d'attente 𓁝[⚤][∅]​​ d'un concept, à la frontière de toutes les autres relations possibles, en particulier de la jalousie (relation de la femme aux Autres);
  2. [terre]𓁜𓁝[potière] : Je comble cette attente 𓁝𓁜, par la relation de la femme à la poterie, c'est le percept.
le mythe le meurtre symbolique   La femme est observée    
𓁝[⚤]𓁜←𓁝[⚤]𓁜 [Engoulevent]𓁜       𓂀
    concept  
𓁝[Engoulevent-1][∅]​​​ 𓁝𓁜 𓁝potière[⚤]𓁜   𓂀
    percept  
[⚤]𓁜     [terre]𓁜   𓂀
terre à poterie          
Schéma 1

- Autrement dit, le progrès actuel n'est rien d'autre qu'une prise de conscience d'un mécanisme déjà là depuis toujours ? 

- N'est-ce pas le but de toute notre démarche, dans les pas de Michel Foucault : une archéologie du savoir...


Le 11/ 12/ 2024 :

- En faisant le schéma ci-dessus, j'ai quelques difficultés à représenter simplement le mécanisme, car l'utilisation de mes glyphes n'est pas encore définie par une syntaxe bien assurée.

- Vérifie au moins que tu représentes correctement la double inversion de la forme canonique, reviens à la base : (voir "Le mythe de la Potière jalouse")

Fjalousie (engoulevent) : Fpotière (femme) : : Fjalousie (femme) : Fengoulement-1(potière)

Il faut déjà comprendre les éléments du discours, à savoir les "fonctions" dont il est question ici.

- Tu as raison, reprenons tout depuis le début.

1 / Fjalousie (engoulevent) et Fjalousie (femme) :

La "fonction jalousie" se rapporte au jugement que la tribu porte sur la Femme et l'engoulevent.

- Autrement dit, c'est 𓂀 qui parle ?

- Non, nous sommes, nous 𓂀, ici et maintenant les Auteurs de cette représentation d'un mythe millénaire,  et représentons l'esprit de cette tribu par le Sujet 𓁝𓁜Jivaro, dont nous allons définir les changements de posture au fur et à mesure que se déroule le récit.

- Mais le récit est raconté par un conteur particulier ?

- Restons dans la situation où le conteur ne fait que répéter une histoire, le soir au coin du feu, une histoire connue de tous. Il n'est alors que l'expression de toute la communauté.

Dans cette hypothèse, nous pouvons comprendre la "fonction jalousie" de Lévi-Strauss comme un jugement de la tribu, et pour respecter notre structure générale, le représenter par un "choix", c.-à-d. l'actualisation en ♢, d'une potentialité en ♡ : 

  𓁝Jivaro[Éthique]𓁜 𓂀
Jalousie / Criard⚤  𓁝𓁜  
  𓁝[Femme / engoulevent]𓁜Jivaro 𓂀

Et les deux "objets" de jugement sont la femme et son totem, l'engoulevent. Ce qui permet de les associer concrètement dès que l'on prend conscience de cette correspondance, dans le mouvement : 

  𓁝Jivaro[Femme ? engoulevent]𓁜 𓂀
identification ⚤  𓁝𓁜  
Totem 𓁝[équivalence]𓁜Jivaro 𓂀

C'est ce que Lévi-Strauss écrit sous la forme : 
Fjalousie (engoulevent)  : : Fjalousie (femme)

2/ Fpotière (femme) :

Si la première fonction est descendante (nous passons d'un concept à ses conséquences), cette seconde fonction est tirée de l'observation (le percept) du travail de la Femme au sein de la tribu, ce que représente le mouvement ascendant ♧♢, à partir de la perception en ♧ de deux "objets". 

  • La terre à poterie;
  • La Femme.

Le Jivaro fait le lien en ♢ : la Femme est potière :

  𓁝Jivaro[Femme ? Terre]𓁜 𓁝𓁜 𓁝[Potière]𓁜Jivaro 𓂀
       
  𓁝[Terre& Femme]𓁜Jivaro     𓂀

3/ Fengoulement-1(potière) :

Nous arrivons maintenant au mythe lui-même, à sa fonction créatrice, et pour bien comprendre le mécanisme, il faut garder en tête la liaison de nos 3 modes :

Nous avons vu, et c'est le point important de l'article, deux effets distincts de la mort de la Déesse Engoulevent :

  1. Le don de terre à poterie, en ♧;
  2. Un mécanisme de "symétrisation" Engoulevent / Engoulevent-1 en ♢, qui laisse une place pour la Femme "entre les 2", avec tout ce que nous avons pu dire à ce sujet.

Et c'est le moment de nettoyer notre schéma 1 ci-dessus. 

Nota : faute de place : le "niveau [⚤]" qui est commun à tout le schéma est éludé dans la représentation, et j'ai utilisé les abréviations suivantes : 

  • E : pour Engoulevent : sa mort est symbolisée par "¬Eng" (dans une logique du 1er ordre)
  • e : pour engoulevent; son symétrique est symbolisé par "eng-1" (dans une structure de groupe)
  • F : pour Femme
  • P : pour Potière
  • 𓁝J/𓁜J pour les Jivaros 
le mythe le meurtre symbolique   Jalouse Potière  
𓁝J[¬E]←[E]𓁜j [E]𓁜J     𓂀


 
     
𓁝[e-1]<=>[P]𓁜J [F ∈ eP]𓁜J 𓂀
     
[terre à poterie]𓁜J     𓂀
Schéma 2

Que la femme soit jalouse et potière, ne peut se comprendre que dans une logique [⚤], non contrainte par le tiers exclu, contrairement aux 2 niveaux  [⚤] et [⚤].

- Retrouves-tu la double inversion notée par Lévi-Strauss ? 
Fpotière (femme) : : Fengoulement-1(potière)

- Pour cela, il faudrait s'entendre sur le vocabulaire. 

  • Fpotière (femme) : ne pose pas de problème : "faire de la poterie" est une mise en relation entre la Femme et la terre à poterie (ou à la poterie elle-même, selon les variantes du mythe), et donc nécessairement en mode ♢. En ce sens , potière est bien une "fonction", et nous pouvons assimiler cette écriture Fpotière (femme) à notre représentation [P]𓁜Jivaro.
  • Fengoulement-1(potière). Ici, c'est plus confus.
    1. En toute rigueur, c'est Engoulevent qui meurt, d'où le [¬E]qui donne l'inversion d'engoulevent, [e-1].
    2. En parallèle [¬E]donne la terre à poterie (ce qui est éludé dans la formule) qui, ensuite, revient en mode ♢, où le terme de potière n'est pas un substantif (au même titre que la Femme totémisée engoulevent), mais indique une relation de ladite Femme à la poterie.

- Au final, ça revient au même, non ?

- Plus ou moins : je trouve, avec le recul, et après m'y être frotté à de très nombreuses reprises, depuis l'écriture de l'Homme Quantique, il y a plus de 10 ans, que cette formule passe un peu à côté d'un mécanisme essentiel, à savoir le passage d'une dichotomie à une structure de groupe

À partir de ce changement de point de vue, j'ai la nette impression que notre horizon s'élargit de façon très appréciable, nous aurons tout le temps d'y revenir !

- Soit, mais avant de brasser de grandes idées, un lecteur attentif aura sûrement relevé que si tu t'attardes sur [e-1], en revanche, tu ne dis rien de l'oiseau engoulevent pris pour totem de la Femme.

- Aïe, c'est vrai, je suis trop focalisé sur mes histoires de tiers exclu et de frontières. Et puisque c'est jour de grande lessive, finissons là dessus.

  1. On peut faire l'hypothèse que les Jivaros ont collé ce totem au front des femmes, bien avant que leur condition de potière fasse problème. Disons même qu'il s'agit d'un rapprochement direct entre modes ♡ et ♧, un peu comme une bande de gamins dans une cours de récréation affuble le petit gros de la classe du sobriquet de "Bouboule". 
  2. C'est repris dans le mythe sous la forme suivante : en tombant, Engoulevent:
    (Nous sommes toujours au ras des pâquerettes, en mode ♧.)
    • Donne la terre à poterie;
    • Donne son nom ou devient l'oiseau engoulevent.
  3. C'est en remontant en mode ♢ que l'existence de l'engoulevent en [e] se heurte au manque de Engoulevent  [e-1].
  4. C'est entre [e] et [e-1] que la Potière va trouver sa place.

Sur notre schéma, cela donne : 

Choix du totem Le mythe   Jalouse Potière  
𓁝J[Éthique] 𓁝J[¬E]←[E]𓁜j     𓂀
choix

 
     
𓁝[e-1]<=>[P]𓁜J [F ∈ eP]𓁜J 𓂀
     
[F=e]𓁜J [poterie & engoulevent]𓁜J     𓂀
  Schéma 3

- Et la Femme dans tout ça ?

- Excellente question, qu'il faudrait poser à un ethnologue. A priori, si je ne déforme pas mes souvenirs de lectures, une femme Jivaro ne parlerait pas d'elle-même en disant "Je", mais en se référant au regard ou à la parole de l'Autre : "on m'appelle une telle", "je suis du totem de l'engoulevent", "je suis la mère de..." etc.

- Donc plutôt dans le relationnel, en mode ♢, à définir ses différentes articulations au sein de la tribu ?

- Ce n'est qu'une hypothèse à vérifier.

- On est loin du "Je pense donc je suis" ?

- Même à notre époque, beaucoup en restent bien loin !

- Amen.

Hari

Note 1 :

Pour mémoire la logique du 1er ordre respecte :

  • Le principe du tiers exclu
    stipulant qu'une proposition est soit vraie, soit fausse, sans possibilité d'un état intermédiaire. En d'autres termes, pour toute proposition P, il doit être vrai que P ou ¬P, ce qui se résume par la formule latine "Tertium non datur" (le tiers n'est pas donné) : noté (P∨¬P)
  • Le principe de non contradiction :
    stipulant qu'il est impossible qu'une même proposition soit à la fois vraie et fausse. En d'autres termes, si une affirmation est vraie, sa négation doit être fausse. Pour toute proposition P, il ne peut pas être vrai que P et ¬P soient toutes deux vraies en même temps. Un système logique qui respecte le principe de non-contradiction est dit consistant, (i.e. : il ne contient pas d'antinomies). Cela garantit que les conclusions tirées au sein de ce système sont valides. En particulier ¬¬P=P.

Note 2 :

C'est en écrivant cela que je reçois un message concernant la mathesis de Foucault.

Comme c'est un peu vieux dans ma tête, je vais vite fait sur Perplexity pour me rafraîchir les idées avant de répondre :

🤖: La "mathesis" chez Michel Foucault désigne une approche philosophique qui se concentre sur l'établissement d'un ordre systématique dans la connaissance. Dans son ouvrage *Les Mots et les Choses*, Foucault décrit la mathesis comme une "science universelle de la mesure et de l'ordre", qui permet d'organiser et de classer les connaissances, même celles qui ne sont pas directement mesurables[1][4].

Caractéristiques de la Mathesis

  • Ordre et Classification :
    La mathesis est perçue comme un moyen d'établir une succession ordonnée entre les éléments de connaissance, facilitant ainsi leur analyse et leur compréhension[1]. -
  • Méthode Universelle :
    Foucault suggère que cette approche peut être appliquée à divers domaines, tels que la grammaire, l'histoire naturelle et l'économie, sans se limiter aux mathématiques traditionnelles. Elle représente une méthode universelle pour appréhender l'ordre des choses[1]. -
  • Émergence de Nouvelles Disciplines :
    La recherche d'une mathesis a conduit à l'apparition de nouvelles disciplines empiriques qui n'avaient pas encore été formées ou définies, élargissant ainsi le champ des connaissances humaines[1].

En résumé,
la mathesis selon Foucault est une réflexion sur la manière dont les connaissances peuvent être structurées et ordonnées, transcendant les limites des mathématiques pour s'appliquer à l'ensemble des sciences humaines et naturelles.

Sources :
[1] Définition de MATHESIS https://www.cnrtl.fr/definition/mathesis
[2] Mathesis universalis - Wikipedia https://en.wikipedia.org/wiki/Mathesis_universalis
[3] L'idée de mathesis universalis dans La Philosophie de l'algèbre I et II

de https://journals.openedition.org/philosophiascientiae/2517
[4] Mathesis - Wikipedia https://en.wikipedia.org/wiki/Mathesis

Il vient tout de suite que nous nous intéressons ici aux niveaux [⚤] et [♻] de l'Imaginaire :

  • [⚤] : l'ordre et la succession (avec un bémol tenant à la différence entre [⚤] et [⚤])
  • [♻] : la mesure.

Quant à l'aspect topologique [#], ou géométrique de la représentation, elle sont dans la taxinomie (nous en parlions il y a peu : voir "Topologie Imaginaire et taxinomie"), dont Foucault parle en parallèle avec sa mathesis.

Le point de vue dont nous parlons ici permettrait d'embrasser ensemble ces deux aspects "mathesis" et "taxinomie".

- Ce qui nous ramène au topos ?

- Je ne te le fais pas dire, enfin si, d'une certaine façon...

Note 3 :

Voici ce que donne Mistral :

🤖: 

  • Philippe Descola : Anthropologue français, il a mené des recherches approfondies sur les Achuar, un sous-groupe des Jivaros. Ses travaux portent notamment sur les relations entre les humains et la nature, ainsi que sur les cosmologies amazoniennes.
  • Anne-Christine Taylor : Ethnologue et directrice de recherche au CNRS, elle a également travaillé sur les Achuar et les Jivaros. Ses recherches portent sur les systèmes de parenté, les rituels et les représentations du monde chez ces peuples.

Ne rete plus qu'à trouver leur contact, que mon email ne passe pas pour un spam, et qu'ils aient un peu de temps pour répondre....

Note 4 :

- Où l'on retrouve, bien entendu, la fondation de la recherche philosophique en réaction à la pensée mythique, avec en particulier Parménide pour qui "ce qui n'est pas n'est pas", et toute la difficulté qui s'ensuit pour lutter contre les Sophistes, qui jouent précisément avec la parole. En ce sens, on peut comprendre historiquement l'avènement de la logique classique, du 1er ordre, comme un "oubli" d'une forme de pensée plus riche, se traduisant par un "foncteur d'oubli" en langage catégorique.

- À rapprocher de la forclusion en psychanalyse ?

- De là à considérer le développement de la philosophie comme une psychose... tu ne vas pas nous faire que des amis ! 

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