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Sur les traces de Lévi-Strauss, Lacan et Foucault, filant comme le sable au vent marin...

L'Homme quantique

De Grothendieck au soliton

- Qu'est-ce que c'est que cette histoire de "soliton" ?

- Mon attention s'est portée là-dessus à la suite d'un enchaînement de circonstances qui tourne autour de l'intérêt de quelques-uns pour Grothendieck. Jeudi dernier, au cours d'échanges sur Zoom avec un petit groupe de psys ouverts à ce que pourrait leur apporter le langage mathématique, et les concepts qu'il manipule, on en vient à évoquer un autre séminaire pour le lendemain concernant "Les portes de l'univers", texte annexe à "Récoltes et semailles" de Grothendieck, auquel il serait possible d'assister en tant que visiteur discret.

Je m'y invite donc, et ce matin, en voulant tirer quelque leçon de ces échanges, je regarde un peu sur le net le CV de l'organisateur de ce séminaire.

Il a une formation de mathématicien orienté vers la mécanique quantique, complétée d'une formation de philosophe. Bigre, j'en suis impressionné, mais en lisant le thème de ses travaux, je tombe sur le terme de "soliton" qui m'est totalement inconnu.

Je file donc sur Wikipédia pour en savoir un peu plus, et je découvre tout un monde totalement nouveau...

- Si tu nous passais les préliminaires ?

- OK, je te la fais courte, style "marabout/ bout de ficelle/ selle de cheval..." Du soliton, je me focalise sur le soliton optique : 

"Le soliton naît d'un équilibre entre deux effets qui se compensent. Dans le cas d'un soliton optique, ces effets sont essentiellement l'automodulation de phase et la dispersion anormale." Wikipédia

L'automodulation de phase : en gros, une impulsion ultra-courte traversant un milieu matériel (en pratique une fibre optique) induit une variation de l'indice de réfraction (effet Kerr), et donc, une modulation de la fréquence de l'impulsion, d'où ce schéma : 

Par Emmanuel Boutet — own work

"Tracer ω(t) montre la variation en fréquence de part et d'autre de l'impulsion.

  • Le front de l'impulsion est décalé vers les basses fréquences ("décalage vers le rouge"),
  • la traîne est décalée vers les hautes fréquences ("décalage vers le bleu"),
  • et le sommet du pic n'est pas décalé en phase."

La dispersion : L'indice de réfraction d'un matériau est fonction de la longueur d'onde du rayon incident. C'est ce qui donne la dispersion chromatique d'un prisme, ou l'arc-en-ciel.

"La dispersion anormale décale vers le front de l'impulsion les hautes fréquences, les basses fréquences se retrouvant à la traîne (le rouge se propage ici moins vite que le bleu, contrairement au cas d'une dispersion normale)."

Il y a donc deux processus antagonistes qui, dans des conditions bien précises, permettent la propagation d'une onde sans perte d'énergie, autrement dit, nous avons ici un phénomène de conservation. C'est ce que l'on observe dans les phénomènes de mascaret, ou de tsunami :

Par Alessio Damato — Travail personnel,

- Mais où veux-tu nous mener ?

- Nous avons ici une conservation résultant de deux processus antagonistes, ça ne te rappelle rien ?

- Suzanne dans son tore Imaginaire ? (voir ici)

- Eh oui ! Reviens à notre petite vidéo d'un parcours S↑ du Sujet 𓁝𓁜:

Nous avons ergoté un bon moment autour de la caractérisation du trajet inverse S↓, mais nous sommes d'accord avec Spinoza, pour comprendre que l'entendement de 3è espèce doit marier les deux processus immanent S↑ et transcendant S↓. Tout cela est bel et bon, mais quelle est la "nature" de ce petit homoncule 𓁝𓁜 qui se trémousse d'un niveau à l'autre, d'un mode à l'autre dans ce tableau de l'Imaginaire ?

- Ou de Suzanne dans son tore :

- Exactement. J'avais dans l'idée qu'il ne fallait pas représenter le "Sujet" lui-même, inaccessible en soi, mais son ombre portée, son "Moi" en quelque sorte, dans cette représentation de son Imaginaire.

Or, cette idée de soliton, m'amène à penser que l'existence même du Sujet n'est que la stabilisation de ce double processus. Comprends-tu pourquoi ce matin j'ai accroché si vite à cette notion de soliton ?

Et puis, je dois bien te l'avouer, cet Imaginaire en forme de tore me ramène au concours d'entrée à mon école d'ingénieurs. L'épreuve de physique portait sur la stabilité d'un faisceau de particules dans un cyclotron... Je me disais bien, en manipulant ce tore dans Blender, que ça me rappelait quelque chose!

- Et Grothendieck ?

- Ces expressions S↑ et S↓ souffrent d'une limite majeure : elles sont exprimées sont forme narrative, en termes de progression du type (...⏩...)𓂀. Autrement dit, pour parler des 3 modes ♧ ♢ ♡, je me limite au premier d'entre eux...

Or, Grothendieck, dans le schéma final résumant ses cogitations nous offre une autre caractérisation de cette double circulation :

Les deux flèches que l'on y voit se réfèrent à une évolution duale entre "vers plus de Yin" et "vers plus de Yang".

N'est-ce pas ce à quoi correspondent nos deux processus S↑ et S↓; en te souvenant que :

  • La posture ex post  𓁜, orientée vers le Réel est Yang;
  • La posture ex ante 𓁝, orientée vers le Symbolique est Yin.

- Ce serait donc là une caractérisation de mode ♡ ?

- Oui, et ça me semble beaucoup plus élégant, non ?

- Il resterait à trouver la formulation intermédiaire en mode ♢.

- Sans doute le plus difficile, où il faudrait marier les deux attitudes 𓁝𓁜...

- Tu penses au topos comme "lit commun du discret et du continu" ?

- Oui, pour ne rien te cacher, mais ça reste un axe de recherche, il y a encore tellement à faire pour y arriver !

- OK, restons-en là pour l'instant, mais quoi d'autre au sujet de cette lecture rapide des "portes de l'univers" de Grothendieck ?

- Il faudrait y revenir en détail, mais n'ayant pas le texte original sous les yeux, difficile d'avancer beaucoup plus.

Quelques points de satisfaction — mais sans étonnement — avec en premier : 

  • L'aspect fondamental d'une démarche duale s'articulant entre deux principes correspondant au Yin Yang. C'était à la base de ma propre modélisation d'un Sujet entre Réel et Symbolique : (𓁝𓁜[]).

Perspective dans laquelle il faudrait restituer l'idée toute platonicienne d'un rapport de l'unicité derrière la multiplicité, en s'appuyant sur des remarques faites en séance :

  • La quête d'unité mathématique a une forte dimension Yin;
  • Cette quête concerne ce qui est commun à l'infinie profusion du particulier où le Yang serait du côté de ladite profusion;
  • généralisation et abstraction sont deux choses différentes
  • La reconnaissance qu'avant d'arriver à la rigueur d'une pensée achevée, le chercheur évolue par moments "dans le vague".

Un point d'étonnement : a priori (il faudra vérifier dans le texte), Grothendieck ne retient pas la dualité qui me semble absolument fondamentale : élément/ partie.

- Sans doute parce que toute la pensée de Grothendieck se développe à partir des travaux d'Évariste Galois, et de la notion de groupe, autrement dit à partir du mode ♢.

- Il est vrai que stricto sensu, l'élément apparaît en ([∃][⚤]𓁜)𓂀quand le Sujet se voit comme objet dans le miroir, qu'il rapproche du regard que sa mère lui porte :
(𓁝Sujet[♲]𓁜mère⏩[⚤]𓁝⇅𓁜Sujet[♲]𓁜mère)𓂀

Ensuite, dans une pensée plus élaborée (avec l'introduction du niveau [#] et du mode ♢), l'élément s'efface devant son groupe : on passe de x parmi  ℕ (qui n'a pas de structure de groupe) à ℤ :

élément 𓁝[⚤] 𓂀
     
  [⚤]𓁜 élément
𓂀

- L'oubli est donc tout à fait compréhensible...

- Oui, mais c'est dommage, parce que cela viendrait compléter son tableau des dualités, en précisant la caractérisation des postures élémentaires :

  • 𓁝 <=> Yin ;
  • 𓁜 <=> Yang.

Mais dans l'attente d'avoir lu de plus près le texte en question, je crois plus sage d'en rester là pour l'instant !

- Amen.

Hari

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