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Sur les traces de Lévi-Strauss, Lacan et Foucault, filant comme le sable au vent marin...

L'Homme quantique

Gesticulations Imaginaires.

De John Dykstra

- Cette oeuvre de John Dystra exprime parfaitement l'idée que chacun d'entre nous s'enferme dans son propre monde.

- Tu veux parler de notre Imaginaire, je suppose ?

- Exactement, et figure-toi que malgré ma résolution de ne pas perdre trop de temps sur Blender, après avoir mis en cage notre petite Suzanne (voir ici), il m'a semblé utile d'animer un peu le tableau de l'Imaginaire que tu dois commencer à connaître : 

[∃] [⚤] [#] [♲] [∅]
[∃] [⚤] [#] [♲] [∅]
[∃] [⚤] [#] [♲] [∅]
[∃] [⚤] [#] [♲] [∅] 

Ça m'a demandé beaucoup de temps pour reconstituer mes petits hiéroglyphes dans Blender, car j'apprends en même temps ! Rien d'extraordinaire pourtant... Bref, j'arrive à ceci :

Avec l'idée que les niveaux appréhendés ex ante 𓁝, comme le Symbolique ☯ ne peuvent qu'être évoqués ou connotés, comme un mythe, ce que je marque en vert, quand ce qui est appréhendé ex post 𓁜, est ressenti aussi concrètement que le traumatisme du Réel , que je marque en rouge.

Facile à dire, mais il m'a fallu quelques jours pour arriver à représenter cette évolution d'un Sujet dans son Imaginaire. Mouvement ascendant, noté S↑ en l'honneur de Spinoza :

(nota : je ma sois amusé à faire bouger la caméra et orienter un spot (un peu grossier) sur notre cobaye, afin de souligner la présence de l'auteur—metteur en scène dans cette représentation du Sujet).

Le rendu n'est pas très bon (Veedee), car j'ai limité la qualité de l'image pour ne pas y passer la journée, mais bon...

- Et je suppose que le mouvement inverse S↓ s'obtient juste en inversant le défilement de la vidéo ?

- Ah! Voilà une bonne question. Dans cette vidéo, faut-il juste inverser les changements vert/ rouge des images, ou bien doivent-elles conserver leur couleur rouge? Est-ce que dans un mouvement tel que ([⚤]𓁝⇅𓁜[#]⏩[⚤]𓁝⇅𓁜[#])𓂀, le Sujet "oublie" ou "occulte" vraiment [#] d'où il vient ?

- Dans un langage mathématique, oui. Par exemple, en [⚤]𓁜, tes raisonnements ne doivent pas s'appuyer sur l'hypothèse du continu exprimable en [#]. Le Sujet choisit de ne pas utiliser cette hypothèse.

- Certes, mais il y a bien une différence entre oublier ce que l'on "maîtrise" dans une descente  S↓ et n'avoir aucune idée du continu en [⚤]𓁜 dans une démarche immanente S↑.

- Tu en reviens à la réminiscence de Socrate, lorsqu'il fait découvrir à l'esclave de Menon que l'aire d'un carrée de 4x4 est 4 plus grand que celle d'un carré de 2x2, et non 2 fois comme il l'exprime spontanément. Nous en avions discuté il y a déjà un bout de temps ! (voir "Le Menon").

- Il s'agissait en l'occurrence du passage (𓁝[♲]𓁜⏩𓁝[♲]𓁜)𓂀 lorsque l'élève 𓁝 suit le maître (...𓁜)𓂀. D'ailleurs, cette différence entre un élève qui progresse en S↑ face au maître qui vient à sa rencontre dans une démarche S↓ nous renvoie à nos considérations sur les 4 discours de Lacan (voir ici) comme à la domination de classe si bien décrite par Bourdieu (voir ici). On pourrait même cadrer une lutte d'ordre politique ou sociale à partir d'une différence de posture entre deux camps opposés,...

- Oui, je me souviens de ta lecture du bouquin de Pierre Corcuff "La grande confusion", voir ici....

- À moins, à moins d'en rester tout simplement à JP Changeux : la prise de conscience se fait lors de la rencontre entre nos deux mouvements S↑ et S↓ !

- Sans parler des possibilités de "sauter" de mode, en revenant à Suzanne dans sa cage (voir ici)...

  =>  
     
       

- Bref, je me suis bien amusé à tenter de faire une vidéo sur Blender, mais tu vois bien que cela ne suffit plus : il faudrait passer à un logiciel de jeu.

- À suivre donc...


Le 11/ 01/ 2024 :

- À la réflexion, je m'étonne de toute cette digression faite hier autour de la réminiscence et de la rencontre entre le maître et l'élève, qu'avais-tu en tête ?

- Oh, c'est très ténu, mais oui, j'ai deux anecdotes à te raconter.

La première concerne la construction de mon tore en 3D dans Blender.

J'ai fait plusieurs essais avant d'arriver à une construction élégante (qui tient ici à l'économie des moyens). À un moment donné, j'ai pensé utiliser un cylindre avec une définition minimum, ce qui donne un prisme à 3 faces, puis de le tordre sur lui-même (twist) et ensuite autour d'un point extérieur (bend).

Et c'est là où j'ai eu une réaction idiote en faisant un twist de 60° qui laisse un triangle isocèle inchangé. En faisant ensuite l'opération "bend", j'ai vu tout de suite que cela ne collait pas : il fallait faire un twist de 120° : je m'étais trompé de référentiel de pensée !

- Tu veux dire que tourner de 60° est une réponse correcte dans une géométrie plane (ton prisme vu en bout), mais fausse en 3D ?

- Exactement.

- Ça nous ramène à une discussion de comptoir, après une séance à l'atelier de logique catégorique d'Anatole Khélif... En fait tu n'évolues pas beaucoup...

- L'âge mon pauvre ami, la sclérose du cerveau... Mais ce n'est pas le propos : concrètement, mon esprit était limité à 2D, quand mon univers était en 3D. Pour comprendre mon erreur, il m'a fallu réaliser un changement de posture 2D/ 3D.

La seconde anecdote est celle d'un blanc dans une discussion sur Zoom jeudi dernier.

Je ne sais plus trop comment cela m'est apparu évident, mais à un moment donné, j'ai exprimé l'idée qu'un discours pourrait être vu comme la frontière d'une espace Imaginaire de dimension supérieure. Et il y a eu un blanc très sensible dans l'échange, puis l'orateur a continué son exposé: il ne savait visiblement que faire d'une telle proposition.

J'avais en tête le schéma d'une décohérence, d'un passage ♢↓♧, en faisant le parallèle avec ce que nous avons vu en homologie en [#]. L'idée m'était d'autant plus évidente que j'ai une formation d'électricien, avec, bien ancrée dans le cerveau depuis plus de 40 ans, l'image d'un lien entre la circulation d'une intensité dans une boucle (1D) et un flux à travers une surface (2D) quelconque délimitée par celle boucle.

- Si je te suis bien, la parole de l'analysant racontant un rêve à son psy préféré suivrait ce schéma :

   [#] 𓂀
   
[⚤]♧     [#]  

- Oui, mais tu vois bien que l'image tient à la posture de l'Auteur 𓂀♢ en mode ♢, quand mon interlocuteur est en [⚤]𓁜.

- D'où, à ton avis, le blanc en réponse à cette proposition ? Mais ce n'est qu'une interprétation de ta part : ([⚤]𓁜)𓂀.

- Bien entendu, mais considère ceci : toute l'approche Lacanienne tient à cet aphorisme que l'inconscient est constitué comme un langage. Ce qui évoque une approche immanante S↑ de l'inconscient à partir de ce que l'on observe, de ce qui se décante en paroles devant le psy.

Lacan insiste énormément sur l'importance de la langue qui façonnerait notre Imaginaire (Lalangue) et c'est indéniable; nous en avons discuté en prenant l'exemple du "Ma" 間 propre au Japonais (voir "Voies pour la culture et la pensée Japonaise").

Mais est-ce tout ? Autrement dit, l'Imaginaire est-il limité à un discours intérieur, forgé par Lalangue, ou, au contraire, cette dernière ne serait-elle que le moule permettant à une pensée plus large de s'exprimer — au sens où l'on "exprime" le jus d'un citron à l'aide d'un presse-citron?

Lorsque tantôt je me suis trompé en twistant mon prisme de 60° au lieu de 120°, j'ai pensé "quel con" en constatant mon erreur ! Mais cette expression verbale — éminemment française au demeurant — ne se référait à aucun processus articulé : j'ai tourné dans ma tête un triangle isocèle, puis en le tordant tête-bêche de 360° j'ai vu mon erreur sans aucun recours au langage.

- Pourtant tu viens d'en parler, ou tout au moins de décrire la scène...

- Après coup, pour en discuter, dans un échange au ras des pâquerettes, en [⚤]. Mais dans mes manipulations, j'étais bien en [#], et le changement de posture tenait au saut (𓁝3[#]𓁜⏩𓁝3[#]𓁜)𓂀, que je te raconte après coup : (...⏩...)𓂀.

- Si ce n'est la langue qui forge l'esprit, que serait-ce ? Les archétypes Jungiens ? (voir "Freud - L'interprétation des rêves #4... et Jung ?")

- Ah ! C'est une vaste question ! J'ai plutôt le sentiment que nous sommes le produit de notre nature animale, et qu'il faut chercher dans nos développements les plus hauts, la répétition de mécanismes neurologiques très archaïques. 

- Tu t'es déjà vu reprocher tes fréquentes références à des neurologues, comme JP Changeux ou Stanislas Dehaene (voir ici).

- Je le sais bien, mais pour répondre à ta question, le questionnement de certains psychanalystes, à la recherche de nouvelles pistes, en particulier du côté de Grothendieck afin de décrire le Sujet comme un topos, doit nécessairement les conduire à revoir leur propre posture concernant le langage.

- Mouais, pas gagné...

- Eh non ! 

- Mais dis-moi, en quoi cette idée est-elle intéressante ?

- J'espérais pouvoir initier une réflexion à partir de cette idée d'un discours vu comme "bord" de l'Imaginaire. 

Tout d'abord, en considérant qu'il se déroule dans la dimension unique qu'est le temps, cette métaphore exprime assez évidemment que tout discours fini (i.e.: dans la mesure où il échappe à l'automatisme de répétition) doit nécessairement avoir un "bord double", et ça c'est une contrainte de type cohomologique.

- Tu es restes donc à R/ I/ S, avec R et S comme bords sans dimension d'un discours à 1D ?

- Exactement, et d'un objet sans dimension, tu conviendras aisément que l'on ne puisse dire grand-chose, à part exprimer son existence. La chose la plus intéressante étant que ces "objets" R et S étant les bords du discours, n'ont eux-mêmes par de bord : il n'y aurait nécessairement entre eux qu'un vide.

- Cette distance vide revenant à dire, sans doute, qu'ils ne diffèrent l'un de l'autre que par la posture du Sujet qui en parle ?

- Voilà, tu as bouclé la boucle, si je puis dire.

- Amen !

Hari

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