Sur les traces de Lévi-Strauss, Lacan et Foucault, filant comme le sable au vent marin...
14 Septembre 2014
Afin de mettre à l'épreuve toutes les belles idées que je développe ici, dans ce blog, bien au chaud et à l'abri du vent, j'ai décidé, il y a une quinzaine d'aller prendre l'air sur Mediapart, pour voir ce qui pouvait accrocher ma réflexion. Et butant sur cette élection écossaise, je me laisse aller à postillonner des commentaires ici et là. Des billets qui donnent plus à voir mon humeur que ma réflexion.
Honte à moi.
Pourquoi passer tant de temps à disserter sur l'incomplétude des Objets, la relativité de notre discours, l'importance de notre position par rapport à notre discours, à caractériser névrose et psychose en référence à l'Objet pour me répandre aussi lamentablement en platitudes, sans même réfléchir un instant à cet Objet d'un discours que serait l'Ecosse.
Le choc salutaire vint à la lecture d'un article du journaliste Ravanello :
"Nous sommes peu nombreux (5 millions). Nous sommes riches. Pourquoi continuer à payer pour les autres ?", dit-on à Edinbourg. La ritournelle est connue. C’était déjà celle des Lombards de la Ligue et des Italiens du nord. Celle des Flamands. Des Catalans dans une Espagne à genoux économiquement. La crise rend égoïste. Les Catalans ne veulent plus participer à l’effort budgétaire commun. Logique de petit-bourgeois assis sur leurs acquis et qui, dans un monde qui se mondialise, se rétractent sur eux-mêmes.
C'est le terme "petit-bourgeois" qui fut le déclic, selon un mécanisme analogue à l'adhérence, dont nous avons déjà exploré le mécanisme. Pourquoi? Parce que ces billets d'humeur dont je parlais plus haut, avaient pour arrière fond, cette structure fractale que j'ai en tête depuis longtemps, une conséquence de la théorie que je développe ici. Mais cette structure est décrite "ex-post", sans réflexion sur un processus (nécessairement ex-ante) de son émergence. Or la réflexion du journaliste mettait l'accent sur le processus en cours dans le cas de l'Ecosse, et par contre-coup, débloquait ma réflexion d'ordre général sur la structure sociale. Mais, restons-en pour l'instant au cas écossais.
Procédons par ordre, en rappelant ici les 3 niveaux définis dans "L'Homme Quantique" comme nécessaires à la description d'une société:
Avec Ip > Ie > If.
Et pour rendre compte de la complexité de notre Objet d'étude, nous devons au minimum prendre en compte ces deux niveaux.
Supposons qu'une minorité seulement d'écossais soit politiquement orientée, les uns souhaitant l'indépendance, les autres rester dans l'Union. Il est à parier que la majorité soit sans avis tranché sur la question, politiquement "amorphe", plus intéressée par son niveau de consommation ou d'épargne que par toute autre chose.
Autrement dit, suivant ces hypothèses, les premiers sont conscients des niveaux Ip et Ie, tandis que la conscience des seconds est limité au niveau Ie.
La situation actuelle se caractérise par un niveau Symbolique du niveau Ip, occupé, d'une façon ou de l'autre par l'UK. La question posée est de savoir si les écossais sont prêts à changer ce niveau Symbolique, qui ne serait plus occupé que par une certaine idée de l'Ecosse. Un tel changement présente la structure d'une action mythique, qui s'articulerait autour de la disparition de l'Angleterre de ce système Symbolique. Et ce processus mythique devrait procéder d'un état révolutionnaire, ce qui n'est pas ici le cas...
L'Ecosse n'est certainement pas dans un état révolutionnaire: son niveau de vie est relativement confortable (meilleur qu'en France par exemple). L'idée de l'indépendance a fait petit à petit son chemin, portée par quelques uns qui y croyaient, sans grande résistance de l'Angleterre. Développement progressif qui n'a rien d'une explosion comme en Tunisie en 2011.
Et puis il y a Alex Salmond, qui, par son action et son charisme risque fort d'obtenir l'indépendance écossaise.
Mais comment peut-on caractériser son action pour arriver à ses fins?
Parions, là encore, que les gens politisés changent difficilement d'idée, ce n'est donc pas son coeur de cible. Non, il lui faut porter attention au ventre mou, et c'est là que l'on retombe sur nos "petit-bourgeois". Autrement dit, il faut leur montrer que le changement est profitable, plus rentable que le maintien dans l'Union.
Et tous les moyens sont bons pour arriver à en faire la démonstration. Ce qui retient mon attention dans ce processus c'est la position relative des acteurs:
Cette situation est potentiellement celle d'une arnaque. En effet, il s'agit d'obtenir une modification irréversible de statut (en Ip) en utilisant une théorie absolument invérifiable (en Ie), provoquer un mouvement Ie => Ip avant que l'indépendance produise ses effets, c'est à dire un mouvement Ip => Ie. Or nous avons établi que ce changement de posture est par essence entaché d'une incertitude.
Compte tenu de cette mobilisation au niveau Ie, pour obtenir un changement radical au niveau Symbolique du niveau Ip, les conséquences du prochain vote ne sont pas symétriques:
Ce que je retiendrai de cette aventure, c'est qu'elle diffère essentiellement d'un mécanisme révolutionnaire, et qu'elle résulte avant tout de la volonté d'un homme, qui amplifie artificiellement une velléité de changement. Et je considère excessif d'y voir une expression populaire, pleinement éclairée, sur une alternative qu'on lui donne à trancher.