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Sur les traces de Lévi-Strauss, Lacan et Foucault, filant comme le sable au vent marin...

L'Homme quantique

Olivia Caramello à Shanghai - La place des topos en mathématiques

Article paru dans ICCM notices Vol.10  de Nathan Thomas Carruth
Article paru dans "International Consortium of Chinese Mathematicians Notices" Vol.10 Déc 2023 de Nathan Thomas Carruth

- Je reçois ce matin, à point nommé, un lien du site "Around Toposes" vers cette interview d'Olivia Caramello par Nathan T. Carruth.

- Pourquoi "à point nommé"?

- Parce que je suis dans le plus grand trouble quant à la pertinence de mon approche, après mon constat d'échec, ou tout du moins d'insuffisance (voir ou pas "Plus qu'en roue libre"), parce que nous avons discuté d'IA vendredi soir jusqu'à plus soif, et parce que cette lecture m'a redonné espoir en cette journée d'attente avant de retourner à Saintes.

- Holà ! Qu'est-ce qui t'as arrêté en premier ?

- Depuis que je représente l'Imaginaire comme une surface topologique (voir ici), je me suis arrêté, un peu rapidement, il faut bien le dire, à 4 modes ♧ ♢ ♡ ♤, en réservant le 4e mode ♤ aux ponts d'Olivia Caramello que je ne me voyais pas en mesure d'aborder avant longtemps. Dans une métaphore mathématique, je caractérise les deux premiers modes par leur objet final :

  • Le singleton (*) en [∃];
  • Le monoïde • en [∃].

J'ai attaché à l'idée de "flèche" d'un morphisme celle de "relation" entre "objets", d'où la caractérisation suivante :

  • Le mode ♧, ou "objectif";
  • Le mode ♢, ou "relationnel".

Et, en cherchant une logique évolutive dans mes libellés, j'ai qualifié le mode ♡ de "syntaxique".

- Tu rabâches, mon, vieux, tu radotes...

- Comprends bien l'enchaînement : je prévoyais le mode ♤ comme celui du sens le plus élevé, ce qu'Olivia Caramello appelle "sémantique". Par ailleurs, je me rends de plus en plus compte que j'ai une tendance "naturelle" à surcharger le mode ♧ de structures, qui dénaturent ma démarche, de même que j'ai tendance à utiliser un langage de mode ♢ pour exprimer des concepts de mode ♡ qui le dépassent.

- Autrement dit, tu as du mal à respecter les coupures que tu instaures toi-même ?

- Oui, je l'avoue.  Et donc, plus j'avance et plus je me rends compte que le mode ♢ est celui où s'articule explicitement, à l'aide du langage catégorique, ce qui antérieurement, voire très primitivement, donnait du sens ♡ à nos expériences ♧.

- Tu en reviens à la relation trinitaire entre modes?

- Oui, plus j'avance et plus je me conforte dans ce schéma:

- Bon, mais pourquoi y revenir à propos de cette interview?

- Parce qu'il me semble possible de resserrer l'Imaginaire à 3 modes en redéfinissant ainsi les modes ♢ & ♡ :

  • Mode ♢ : Syntaxique;
  • Mode ♡ : Sémantique.

- Mon pauvre ami, tu redécouvres la sémiotique, ou plutôt la sémiologie de Saussurre, puisqu'il s'agit, avec ton schéma de l'Imaginaire, d'échanger socialement grâce à son utilisation. Tu ferais mieux de remplacer le terme "objectif" par celui de "signifiant" pour caractériser le mode ♧.

- Oui, il va me falloir m'y habituer —d'ailleurs, ça nous rapprochera de Lacan. Nous constatons donc, après bien des détours, que le langage catégorique est la syntaxe permettant, à notre époque post-Galoisienne, de donner sens à ce qui se présente à notre Imaginaire, comme dans nos échanges, avec le Réel (nos observables) et nos semblables (nos re-présentations).

Sémantique  ♡   =>   ♢ Syntaxe
     
       
Signifiant

- Et tu trouves tout ça dans cette interview ?

- Olivia Caramello l'exprime très clairement :

"You have to think in terms of the syntax-semantics duality: you can have different syntaxes that talk about the same semantics. It’s like different languages that we might use to describe what happens in the real world: we can talk in Chinese or in English or in Italian, and each of these languages provides a different syntactic presentation for what is going on in the world. In mathematics what we have is the formal analogue of this..." p. 5

Et pour se représenter ces changements de syntaxe, je n'ai sans doute pas besoin d'un 4e mode ♤, il suffit de répéter le mode ♢ :

            ♢ Syntaxe 3
          ♢ Syntaxe 2
Sémantique  ♡   =>   ♢ Syntaxe 1
     
       
                                          Signifiant

Lorsque Olivia parle de passer par le sommet d'une montagne pour aller d'une vallée à l'autre, il vient assez simplement le passage :

sommet       vallée
          ♢ Syntaxe 2
Sémantique  ♡   ←    ♢ Syntaxe 1

La différence entre les deux mouvements ♢1♡/♡2 renvoyant en mode ♢ au mouvement dual cohomologie —/—homologie.

- Ou, pour en revenir à Spinoza entre entendement de 1er espèce S et de 2e espèce S ?

- Bien entendu, à ceci près que le philosophe n'utilise pas le mode ♢ pour exprimer ses idées, il passe directement de l'immanence à la transcendance, de la sémantique au signifiant, du Réel ☯ au Symbolique ☯ etc.

  • S : ♧♡ / ☯↑;
  • S : ♡♧ / .

- Donc rien de changé sous le soleil du topos ?

- Sauf qu'ici nous avons une syntaxe ♢ pour en parler, et un principe de répétition à mettre en évidence. La difficulté étant qu'il nous faut utiliser une syntaxe ♢𓁜 pour connoter un concept 𓁝♡ dépassant ladite syntaxe.

- Ce n'est pas ce que dit Olivia :

"... In mathematics what we have is the formal analogue of this: you can have different mathematical theories, possibly belonging to different branches of mathematics, that describe in different languages the same structures; but if you want to extract the semantic content, actually the object that does this job for you is the classifying topos. It’s a kind of DNA of the theory that removes all the inessential aspects of the theory by extracting its fundamental kernel, the “essence” of the theory, to use Grothendieck’s words." p.6

Si le topos "donne le sens", alors il est en mode ♡, cependant il reste limité à la syntaxe de mode ♢!

- Il y a effectivement un problème de logique qui n'est pas levé. Et ça tient à mon sens à quelque chose que j'avais déjà relevé chez Alain Connes, lors du séminaire "Lacan et Grothendieck - l'impossible rencontre".

- Précise !

- Comme Alain Connes, géomètre avant tout, comme Saunders Mac Lane (voir "formes et fonctions"), Olivia Caramello insiste sur l'importance de penser en termes de "formes", beaucoup plus riches que les seuls "nombres". Mais, et s'était déjà ma critique d'Alain Connes à l'époque, il me semble qu'il faille avancer d'un pas: ce qui me semble primordial dans la notion de "forme", c'est la possibilité pour le Sujet, de l'appréhender soit localement 𓁝, soit globalement 𓁜, en fondant mon argumentation sur une donnée psychologique, à savoir l'expérience du stade du miroir où l'infant, intimement relié à sa mère, passe d'une posture 𓁝, à son identification comme "autre" en posture 𓁜.

- Mais cette différence fait partie du langage catégorique, avec les propriétés universelles attachées aux objets final— 𓁜/ 𓁝 —initial.

- Oui, mais cette syntaxe n'est que la traduction actuelle d'une dualité 𓁝𓁜 ancrée dans l'expérience de chaque individu depuis la nuit des temps, se déployant par étapes de l'objet final [∃]𓁜 en mode ♧ jusqu'à l'objet initial 𓁝[∅]☯ en mode ♡. (Voir "Comment faire tourner Suzanne dans sa cage")

- Je relève le terme de "kernel"...

- Il faudra y travailler mais on pourrait rapprocher les termes "topos" et "kernel" dans un renversement de ce type: topos— 𓁜/ 𓁝 en mode ♡. Mais à ce stade, la seule justification que je puisse en donner est d'ordre esthétique. La possibilité d'identifier 𓁜 un "topos" sémantique en mode ♡, par une répétition 𓁝 de mode ♢, nécessite sans doute de limiter la topologie, ou ce qui en tient lieu en J dans l'expression T=(C,J), à une série dénombrable. Bref, je vois tout un développement à faire autour de ces divers mouvements du Sujet entre modes ♡ & ♢. 

- Ça fait deux fois que tu nous parles de répétition, la première au sujet des ponts entre diverses syntaxes, et la seconde à l'intérieur d'une syntaxe particulière qui serait la théorie des catégories.

- Oui, oui, je sais, et ça nous renvoie à toutes nos discussions de ces derniers temps (voir ici et) autour du concept d'orthogonalité. Il faudra bien le traiter à fond un jour ou l'autre, car la nécessité s'en fait sentir depuis le début. Souviens-toi de ma présentation des foncteurs adjoints au CLE d'Anatole Khelif en 2019; avant même d'avoir distingué entre "modes" et "niveaux" Imaginaires, ou lu quoi que ce soit concernant les groupes d'homologie / cohomologie voire les faisceaux!

Bon, j'arrête là pour aujourd'hui et t'engage à lire l'interview en entier. Il donne beaucoup à méditer, en particulier sur l'IA ! Je m'amuse en pensant qu'il faudrait refonder l'informatique, pour avancer sérieusement, en particulier avec les ordinateurs quantiques qui pointent le bout de leur nez ! Qui parmi les GAFAM s'y lancera le premier?

- Suspens... Un Chinois qui sait ?

Hari

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