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Sur les traces de Lévi-Strauss, Lacan et Foucault, filant comme le sable au vent marin...

L'Homme quantique

Les quatre discours de Lacan #2

Après une semaine oisive à ingurgiter non-stop la série "Blacklist" sur Netflix, et à me vider l'esprit, ce matin la nécessité de reprendre ce que j'avais écrit fin 2016 sur les 4 discours de Lacan (voir "d'un Autre à l'autre") s'insinue en moi.

- Pourquoi maintenant ?

- De tous mes articles c'est encore celui sur le schéma en L de Lacan qui est le plus visité, alors que je passe le plus clair de mon temps à écrire sur le langage mathématique. Il m'est donc venu à l'idée qu'il serait intéressant de restituer ce que nous avons développé dans une perspective psychanalytique.

- Mais qu'as-tu à proposer de neuf depuis l'écriture de cet article ?

- Sans aucun doute la prise en compte d'une différence radicale entre deux modes de pensée rationnelle :

  • Une pensée logique, s'organisant en séquences temporelles, ayant pour référé ultime l'objet final  {*};
  • Une pensée topologique, s'organisant en cribles spatiaux, autour de l'objet initial, vide  { } comme référé ultime.

Or, Lacan qui en tient pour la "topologie", introduit son analyse des quatre discours par une évocation de la suite de Fibonacci, adoptant implicitement une approche "logique". Autrement dit, il ne peut que se planter, et cela doit être repérable, par quelque "clocherie" dans son discours.

- Je ne voudrais pas te vexer, mais si Lacan n'est pas clair, ton texte ne l'ai pas plus, et pour tout dire, j'ai du mal à le relire.

- Il est vrai qu'il faudrait le reprendre en entier: ce jour-là Lacan m'agaçait et j'étais en colère... Mais revenons juste un instant sur ce passage de Lacan pour situer mon point de vue actuel :

"Si le rêve se présente comme un rébus, qu'est-ce à dire si ce n'est qu'à chacun de ces termes articulés qui sont signifiants d'un point de vue diachronique de son progrès où s'institue son articulation, le rêve de par sa fonction est sa fonction de plaisir, donc cette traduction imagée qui elle-même ne subsiste que d'être articulable en un signifiant, qu'est-ce que nous faisons alors en substituant à cette interprétation sauvage notre interprétation raisonnée"?

J'avais commenté ainsi :

  • Un rêve (en Id) d'un sujet (dont le "moi" est en Is) est porté par un système Symbolique situé en S. Alors Id ≤ Is < S. Le sujet, dans cette situation, manque du niveau imaginaire nécessaire pour y rapporter son rève, et en juger. Ce "manque de recul" signe l'inconscient.
  •  Maintenant, l'analyste (en Im) qui entend ce rêve (en I'd) peut se faire une idée du système symbolique du sujet (soit Isym le niveau de cette représentation). Alors, nous avons I'd < Isym < Im. Et ce recul par rapport au sujet, permet à l'analyste d'en faire une interprétation raisonnable, consciente. 

Ce qui est inconscient pour l'un est objet de discours, conscient pour l'autre, avec bien sûr un biais entre le rêve vécu (Id) et le rêve perçu par l'analyste (Id').

  • => l'interprétation du rêve est un élément du discours conscient de l'analyste;
  • => la définition de la fonction du rêve est une théorie de l'analyste; qui reste à démontrer.

Nous sommes revenus en détail sur cette différence, en reprenant aux mathématiques leur axiome de choix (voir ici: "axiome de choix et création").

Mais nous pouvons maintenant affiner notre façon de différencier "'interprétation sauvage" du Sujet et "l'interprétation raisonnée" de l'analyste. Ce dernier est irrémédiablement dans un mode de pensée "logique"; mais qu'en est-il du récit par le Sujet de son rêve ?

  1. Dans le rêve lui-même, la substance du rêve est un discours Id, et le Sujet, (représenté par Is) tout entier dans ce rêve n'a aucun recul par rapport à celui-ci, juste cadré par le Symbolique : Id=Is < S ;
  2. Au réveil, Is se remémore le discours, sans le "comprendre", puisqu'il reste en position ex ante par rapport à cette clé qui lui échappe : Id <​ Is < S ;

Maintenant, revenons à ce qui a été dit de la structure de l'Imaginaire: 

  • Nous avons vu que l'Imaginaire tout entier pouvait être circonscrit entre deux plans extrêmes : I1 et I0, avec entre les deux, le plan de bascule I01 entre pensée logique et topologique;
  • Nous avons vu également que la plus haute représentation du Sujet en Is était Is=I0;

La question est : "qu'est-ce que le rêve dit du Sujet, au Sujet lui-même" ?

Si Is' est l'avatar de Is mis en scène dans son rêve en Id, nous avons une situation de type : Is' < Id < Is < S où :

  • Il y a similitude entre Is' < Id et Is < S : les deux représentations du Sujet étant ex ante par rapport au discours qui le définit soit absolument (Is<S) soit relativement à Is (à savoir Is'<Id);
  • tu retrouves une problématique propre à la topologique, c'est-à-dire une approche duale : globale (vue de Is) et locale en Is' (i.e.: < Id < Is);

Il faut comprendre un rêve comme un "crible" permettant de cerner un objet idéalement vide, à savoir le Sujet, en Is=I0 dont l'entrée dans son Imaginaire à partir de l'inconscient ne peut se concevoir que sous forme d'un discours de type "topologique". En ce sens le terme de "rébus" est particulièrement bien adapté: la compréhension vient de rapprochements de type spatiaux entre éléments du discours.

À l'inverse, l'analyste parlant du rêve du Sujet ne peut le rejoindre qu'en partant du Réel, et donc l'approcher par la logique, dans un processus se déroulant en séquence, dans le temps.

Toute la question est liée à l'articulation entre les deux discours l'un immanent, l'autre transcendant qui, comme nous l'avons vu, ne peut se faire qu'en I01.

Nous ne commentons ici que la question finale de Lacan, il resterait à discuter de son assertion concernant la fonction de plaisir, or, j'ai le sentiment que cette fonction ne peut émerger qu'à un niveau plus élevé de la pensée, en I# sans doute, ce qui demanderait de revoir une troisième fois cette présentation pour tenir compte d'une structuration plus complète de l'Imaginaire :

I1 < I01 < IR < I# <I0

Comme vous voyez il y a encore à affiner l'analyse, mais le mieux étant ici comme en tout l'ennemi du bien, je préfère profiter un peu de ce dimanche !

À suivre, donc, ou pas...

Hari

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