Sur les traces de Lévi-Strauss, Lacan et Foucault, filant comme le sable au vent marin...
30 Août 2021
Nota : La signification et l'usage de mes glyphes, comme le schéma général de l'Imaginaire du Sujet, sont présentés ici: "Résumé" (☯[∃]𓁝⇅𓁜[⚤]𓁝⇅𓁜[#]𓁝⊥𓁜[♲]𓁝⇆𓁜[∅]☯)𓂀 (♧) Pour le schéma développé de l'imaginaire voir: "Mettre un peu d'ordre dans sa tête"
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- Avant d'approfondir notre exploration de la pensée scientifique et mathématique, à partir de ce que nous en avons aperçu dans l'article #5 sur le rêve qui est tout sauf un "abstract nonsense", avec l'intuition que le langage catégorique amorce un développement du discours sur plusieurs modes, a priori 4, comme nous les avions identifiés (voir l'article sur François Cheng):
- Nous avons effectivement déjà parlé de parcourir l'Imaginaire du Sujet plusieurs fois, et nous nous étions arrêtés à 4 tours : ♧, ♢, ♡, ♤ (voir "Identité et équivalence de Morita")
Comme tu le vois, les "objets" de notre pensée sont de plus en plus évanescents, et nous cherchons toujours, derrière leurs structures identifiables, ce qui les "anime".
il est peut-être sage de revenir sur notre conception de la pensée mythique, et la forme canonique de Lévi-Strauss, pour voir si rien ne nous a échappé.
- Encore ? Tu y es déjà revenu à au moins 5 reprises, depuis L'Homme Quantique. (note 1)
- C'est absolument nécessaire. Si comme je le pense, les mécanismes du rêve sont acquis par l'homme depuis qu'il parle et pense, alors ils ont dû jouer, dans la pensée mythique la plus primitive, le même rôle que l'on peut encore repérer dans une élaboration aussi sophistiquée que la géométrie non-commutative d'Alain Connes, ou la théorie des "ponts" d'Olivia Caramello (voir "Identité et équivalence de Mojita"). Nous sommes en pleine archéologie de la pensée, sur les traces de Foucault.
Nous avons compris depuis, que la circulation du Sujet dans ce mode ♧, nous permettait de le comprendre et le décrire, en [♲]♧ comme un topos (voir "Le Sujet comme topos").
- C'et déjà pas si mal...
- Mais est-ce suffisant ?
Tous ces développements nous amènent à l'ego cartésien comme "objet final" en [∃]♧ (voir "Faisons le point de la méthode")... Autrement dit nous introduisons ici un mode de régression vers le Réel qui reste proprement Occidental, et pour tout dire extrêmement récent dans nos modes de représentation. (note 2)
Jamais un individu d'une société "froide" ou première ne se considérerait ainsi. Il se définirait par sa caste, sa lignée, son totem etc. dans une attitude 𓁝 tournée vers le groupe 𓁝[#]♧ et la loi 𓁝[♲]♧, et c'est encore très présent hors de notre espace culturel occidental. J'ai fait l'expérience, pour avoir vécu en Afrique, de la difficulté à ramener le vécu africain dans un tel carcan occidental, et c'est également ce que nous avons retrouvé dans la culture Japonaise, en discutant de la notion de Ma 間 (voir "Espace-temps / Ma"), ce qui m'a d'ailleurs conduit à cette réécriture à l'aide de kanjis des différents niveaux Imaginaires :
(☯[∃]𓁝⇅𓁜[時間]𓁝⇅𓁜[空間]𓁝⊥𓁜[間]𓁝⇆𓁜[無]☯)⇅𓂀 (♧):
Je n'y reviens pas, mais l'on voit aisément que la pensée Japonaise se développe à partir de [間], les kanjis 空間 et 時間 n'ayant été utilisés sous l'ère Meiji, que pour exprimer les notions européennes d'espace et de temps, étrangères à la pensée Japonaise.
- Je te vois venir avec tes gros sabots : tu veux en arriver au fait qu'originellement, et ce jusqu'à la Renaissance et Galilée, l'homme s'occupe davantage de ses "relations" avec son environnement, que de les analyser comme "objets".
- Exactement. Dans la pensée mythique, l'objet du discours n'est pas tant de discuter de la potière en tant que femme ou artisan, mais de comprendre comme l'ordre (la poterie) peut advenir du chaos (la femme). C'est une question absolument générale, d'un autre ordre (ou "mode" pour reprendre notre vocabulaire), que l'on retrouvre par exemple, dans l'organisation sociale des Bororos avec l'opposition entre le bari et l'aroettowaraare. (note 3)
- Tu ne vas pas nous ressortir tout ton discours entre Réel/ Imaginaire/ Symbolique ?
- Non, je veux juste te montrer que derrière ce passage entre Réel et Symbolique, que nous avons péniblement arpenté en mode ♧, s'en profile un autre, qui mène d'un mode de pensée à l'autre ♧, ♢, ♡, ♤.
Le rêve nous permet de comprendre comment s'articulent entre eux ces deux mouvements, et même de l'expérimenter par nous-mêmes :
Et ce questionnement s'articule plus aisément dans le langage catégorique.
- Bon, soit, mais si tu en venais à la forme canonique de Lévi-Strauss ?
- Figure-toi que je n'en ai pas encore la moindre idée : j'espérais qu'en déblayant le terrain comme je viens de le faire, la chose s'éclairerait d'elle-même. Il faut que je mette sur pause un moment, ne serait-ce que pour déjeuner.
Le 31/08/2021 :
- Ne tournons pas autour du pot : prendre comme hypothèse que la pensée mythique s'articule comme un rêve, change radicalement le point de vue que j'ai adopté jusqu'à présent, et nous ramène à la discussion que Socrate avait eue avec Menon (note 4).
- On peut dire que tu sautes du coq à l'âne !
- C'est pour cela que j'écris au réveil : les idées qui me viennent alors sont plus radicales, car durant la nuit mes défenses tombent, ce qui me permet d'envisager de tout reprendre à zéro, sans m'inquiéter de devoir remettre encore mon ouvrage sur le métier.
Or donc, Socrate et Menon discutent de savoir si l'on peut acquérir de nouvelles idées ou connaissances (la position de Menon) ou si nos idées "neuves" ne sont que des réminiscences (celle de Socrate). Pour en faire la démonstration, Socrate fait prendre conscience à un esclave de Menon, que le carré de 4 n'est pas 8 comme il le croit d'instinct, mais 16. Pour arriver à faire accoucher l'esclave de cette pensée nouvelle pour lui, Socrate utilise sa fameuse maïeutique, qui lui vaudra la ciguë... De l'exercice, Socrate en déduit que si l'esclave a pu arriver à la réponse juste, en répondant simplement à ses questions, c'est qu'il connaissait inconsciemment la réponse, et qu'il "redécouvre" quelque chose de déjà là, tapi dans son cerveau.
Lorsque Lévi-Strauss présente sa "forme canonique", il se dégage l'idée que le mythe est une façon de résoudre un problème, et j'ai poussé le bouchon jusqu'à y voir la façon commune d'innover, jusqu'à Derrida et sa déconstruction dans l'Homme Quantique. Dans mon esprit, cette "progression" s'exprimait en 𓂀♧, comme une pensée immanente, partant du Réel pour atteindre le Symbolique (☯→[∃]→[⚤]→[#]→[♲]→[∅]☯)𓂀♧, c'est d'ailleurs ainsi que Freud se représente l'Imaginaire et en parle à Fliess.
- Oui, et alors ?
- Si la mécanique du mythe est semblable à celle du rêve, la "nouveauté" en question, ne serait qu'une interprétation consciente d'une mise en rapport inconsciente d'un matériau que l'on découvre. Non seulement inconsciente, mais ancestrale, voire génétiquement héritée de notre nature animale, que l'on retrouverait chez le chimpanzé, ou le bonobo par exemple. De même que nous n'avons aucune part dans notre façon de voir, de sentir ou d'entendre, si la fonction du rêve est d'ordre neurologique, nous n'inventons pas, nous ne faisons qu'amener à la conscience, des liens potentiels accessibles à l'inconscient, et nous nous retrouvons à suivre Socrate.
Autrement dit, Lévi-Strauss aborde le mythe à la façon occidentale, comme un outil pour résoudre une contradiction logique (i.e.: dans le mythe de la potière jalouse, la femme, facteur de désordre, crée de l'ordre). D'ailleurs, nous l'avions déjà relevé lorsqu'il oppose le fournier à l'engoulevent, quand, dans le mythe, ce rapprochement n'est jamais fait.
Nous voyons là encore un biais culturel dont nous commençons à prendre conscience au fil de ces articles, et qui devient de plus en plus évident, de plus en plus gênant.
- Tu nies le progrès ?
- Je rejette l'idée que l'on s'en fait, et je rejoins Grothendieck dans sa façon de procéder.
Pour résoudre un problème actuel, il vaut mieux se poser la question de façon plus générale, pour voir la solution comme simple conséquence d'une propriété de niveau plus élevé. D'où son apologue de la noix : pour en extraire le cerneau sans le casser, il est plus efficace de ramollir la coquille jusqu'à ce qu'elle s'ouvre et nous l'offre d'elle-même, plutôt que de s'y attaquer à coups de marteau.
- Mais c'est désespérant, n'est-ce pas faire preuve d'un fatalisme oriental ?
- Ça aussi c'est un biais occidental. Tous les développements que nous pouvons "inventer" sont déjà là, à l'état potentiel dans notre cerveau ? C'est ça la limite ? Soit : nous avons 10.000 milliards de synapses à disposition. Les possibilités de combinaisons sont largement plus grandes que le nombre d'atomes dans l'Univers. Nous ne cherchons donc pas de "nouvelles" possibilités, mais à trier les relations potentielles. Et le neurologue nous indique comment cela fonctionne : les circuits entre synapses se développent et se renforcent d'autant plus qu'elles sont utilisées. Nous avons là, au niveau neurologique l'automatisme de répétition repéré par Freud.
D'une manière générale, notre cerveau fonctionne en boucle, avec de temps en temps, quelques entrées provenant de l'extérieur, ou de notre corps lui-même. Et plus rarement, ça coince : il y a un hiatus entre le concept (déjà là) et le percept (le trauma du Réel), d'où la recherche d'un nouveau cheminement de la pensée. C'est là qu'intervient le rêve, c'est là qu'agit le mythe, c'est de cette façon que l'Occidental croit déconstruire l'existant pour "créer" du neuf...
- Bon, soit, et ça te mène où ?
- À l'idée générale suivante : ce que j'avais tenté d'inscrire en 𓂀♧, comme une relation entre les niveaux [⚤] et [#], "à l'horizontal", dans une approche "topologique" liant les 4 pôles de la forme canonique, je dois le redresser pour retrouver le carré commutatif entre les niveaux ♧, ♢ :
[⚤]𓁜 | ←[#] | 𓂀♢ |
↓ | ↓ | |
𓁝[⚤]𓁜 | ←[#] | 𓂀♧ |
Et sais-tu l'idée qui me vient, là, maintenant ?
- Dis-le moi, je m'attends à tout de ta part...
- Je repense à Sandrine Muller-Bohard, et ses recommandations pour demander quelque chose à son ange gardien !
- Tu es fou, qu'est-ce qu'elle vient faire là-dedans ?
- Elle insiste sur le fait qu'il ne faut jamais formuler de prière de façon négative: les "esprits" ne le comprendraient pas... Or nous sommes ici dans une pensée chamanique, et mythique pour tout dire, qui rejoint une logique non limitée au 1er ordre.
- Soit plus précis.
- Je reviens à la différence entre l'objet final de la catégorie des Ensembles et celui de la catégorie des graphes. Pour mémoire (voir : "Retour de Cerisy")
Le passage Ω⚤♢↓ {{*};{ }}⚤♧ ayant reçu le très joli nom de "foncteur d'oubli"(voir "Foncteur et transformation naturelle") :
Là où il n'y a aucun lien entre {*} et { } au niveau [⚤]♧, tu vois qu'il est possible de passer de {*} → { } et de { } → {*} dans l'objet discriminant Ω en [⚤]♢.
Si donc, à l'état de veille, le Sujet s'exprime négativement dans un pur langage de niveau [⚤]♧, c'est une "interprétation dichotomique" de relations plus complexes en Ω⚤♢. C'est d'ailleurs ce que remarque Freud dans le rêve : si je me refuse à exprimer qu'untel m'est antipathique, je vais le rêver comme un type formidable.
- Soit, mais où veux-tu en venir ?
- À la double inversion dans la forme canonique. Reviens au mythe de la Potière Jalouse :
Les Jivaros ont un problème d'identification : le totem de la femme, c'est l'engoulevent, parce que comme cet oiseau, la femme est facteur de désordre. Mais alors, comment comprendre qu'elle fasse également de la poterie, ce qui ne correspond absolument pas au caractère de l'engoulevent, qui pose ses oeufs à terre, sans aucune précaution?
D'où le mythe : Engoulevent, femme du dieu Lune le fatigue tellement qu'il décide de monter au ciel. Engoulevent le suit, mais tel Icare, elle tombe, non pas dans la mer mais sur terre, et en tombant son corps donne la terre à poterie.
Fjalousie(engoulement) : Fpotière(femme) : : Fjalousie(femme) : Fengoulement-1(potière)
La chute (décrite par le conteur comme le don de la terre à poterie), constitue en elle-même l’acte créateur, où il pourra ensuite rapporter son observation de la femme comme potière.
Reprenons-le à la manière d'un rêve. Les termes de "jalousie" comme de "potière" peuvent être compris comme caractérisant un ensemble de "relations" (ou foncteur), dans une pensée de mode ♢ :
- Tu pourrais avancer d'un pas :
- Et non ! cette idée d'un rapport direct aux choses, le regard tourné vers le Réel ☯[∃][⚤]𓁜 est fondamentalement occidentale, quand la pensée mythique est toujours régie par la loi ! Celle du clan, celle des Anciens, des dieux etc. Dans une pensée mythique, le rapport aux dieux, aux hommes aux animaux ou au choses est toujours ordonné par le Symbolique et la loi : 𓁝[♲][∅]☯.
- OK, revenons à tes réflexions.
- Donc, nous avons d'un côté deux types de "relations", et de l'autre deux "objets" :
Il est tentant de considérer l'ensemble des totems d'une tribu comme un objet classifiant en [⚤]♧, permettant d'ordonner les uns et les autres au sein de la communauté en [#]♧, tout ceci dans un langage de mode ♧. J'en veux pour preuve l'impossibilité d'articuler le fait que la femme puisse être "potière ET jalouse".
Tentons de schématiser les rapports qui s'établissent sous l'aspect de la jalousie :
[⚤] | ←[#] | La femme de l'homme [#] et celle du dieu Lune [⚤] sont jalouses | 𓂀♢ |
↓ | ↓ | ||
[⚤] | ←[#] | La jalouse [#] a pour totem l'oiseau engoulevent [⚤] | 𓂀♧ |
Le carré commute sans problème. Maintenant, pour la poterie, c'est une autre paire de manches ! D'où le mythe de la transmutation d'Engoulevent en [⚤]♢ en terre à poterie en [⚤]♧ :
[⚤]𓁜 | ←[#] | avec un changement {*} → { } en [⚤] de Engoulevent | 𓂀♢ |
↓ | ↓ | ||
𓁝[⚤] | ←[#] | La potière [#] utilise la terre à poterie [⚤] | 𓂀♧ |
Maintenant, le discours de niveau [⚤]♧ de Lévi-Strauss en ⇅𓂀♧, pour expliquer ce processus sur les 2 modes ♧ et ♢, donne :
Ce que nous traduisons en ces termes (en 𓂀♢) :
Comme on le voit, d'une expression en 𓂀♢ à son interprétation en 𓂀♧ il y a de la perte au feu !
- Attend une minute : en coupant son schéma en deux distincts, où est la pertinence de rapprocher jalousie et potière dans un même mythe ?
- Je pense que le premier schéma donne la logique recherchée :
- Et en quoi cette réécriture de la forme canonique est-elle pertinente ?
- Pour avancer dans notre compréhension du fonctionnement de notre Imaginaire, je pense qu'il est indispensable de comprendre que le rêve ne présente pas des caractéristiques particulières, éloignées de la pensée consciente, mais qu'au contraire, en nous coupant plus ou moins radicalement de l'accès au Réel, et en nous ouvrant à une logique d'ordre supérieur, il nous laisse entrevoir le fonctionnement intime de notre cerveau, voilé à l'état de veille.
Je te laisse méditer là-dessus !
Hari
Note 1 :
J'ai abordé cette étude en 2011, pendant les évènements d'Abidjan, en écrivant mon livre "L'Homme Quantique", à une époque où je découvrais Lévi-Struass dans "La Pléïade".
Le dernier article reprend le thème avec en tête la notion de "transformation naturelle" en théorie des catégories, qui ont suscité de nombreuses relectures et notes.
Note 2 :
Je retrouve ceci de Lacan qui recadre un peu la prétention Occidentale à n'être que rationnelle ::
« Quoi que puissent en penser les esprits qui s’en tiennent aux apparences, ce qui est souvent le cas des esprits forts vous auriez tout à fait tort de croire, même disons ceux qui constituent les esprits les plus positivistes d’entre vous, voire les plus affranchis de toute idée religieuse, vous auriez tout à fait tort de croire que du fait que vous viviez à ce point précis de l’évolution des pensées humaines, les éléments stables ne participent pas de ce qui s’est très franchement et très rigoureusement formulé dans la méditation de Descartes, comme Dieu en tant qu’il ne peut pas nous tromper{86}. » » Extrait de: Alain Simon. « L'Homme Quantique - Essai sur les fondements d'une entropologie. » Apple Books.
Note 3 :
Voir dans L'Homme Quantique :
« Chez les Bororos, par exemple, deux personnages particuliers font le lien entre la société et l’univers.
D’une part, le bari, est lié aux forces naturelles :
« … Le bari est aussi dominé par son ou ses esprits gardiens, ils l’utilisent pour s’incarner. (…) Celui-ci est comptable envers l’esprit de ses flèches cassées, du bris de sa vaisselle de ses rognures d’ongles et de cheveux. Rien de tout cela ne peut être détruit ou jeté, le bari traîne derrière soi les détritus de sa vie passée. Le vieil adage juridique : le mort saisit le vif, trouve ici un sens terrible et imprévu. (…) On voit donc que, pour les Bororos, l’univers physique consiste dans une hiérarchie complexe de pouvoirs individualisés ».
La société se situe en dehors du monde physique :
«À côté de l’univers physique, l’univers sociologique offre des caractères tout différents. Les âmes des hommes ordinaires (je veux dire ceux qui ne sont pas sorciers), au lieu de s’identifier aux forces naturelles, subsistent comme une société ; mais inversement, elles perdent leur identité personnelle pour se fondre dans cet être collectif, l’aroe, terme qui, comme l’anaon des anciens Bretons, doit sans doute se traduire par : la société des âmes. »
L’intermédiaire entre la société des hommes et la société des âmes c’est le maître du chemin des âmes ou aroettowaraare.
« Il se distingue du bari par des caractères antithétiques. (…) Le bari est possédé par les esprits, l’aroettowaraare se sacrifie pour le salut des hommes. »
La société des hommes, située entre ces deux mondes, gère son équilibre par l’intercession du duo antagoniste aroettowaraare / bari. Et, pour assurer son identité, pour survivre à l’existence particulière de ses membres, elle traite la mort des individus comme un «passage» entre ces deux plans.
On retrouve ce dispositif hiérarchisé, cette double opposition société / ciel et société / terre dans les idéogrammes du Yi King : les deux traits supérieurs représentent le Ciel, les deux du milieu l’Homme, les deux du bas la Terre.
Le « Grand Commentaire » du Yi King, attribué à Confucius, commence par :
« Le Ciel est élevé, la Terre est en bas
Ainsi sont déterminés l’Initiateur et le Réceptif
À travers cette disposition de bas en haut
Le plus et le moins de valeur sont en place. »
Caractériser l’Homme, comme nous l’avons fait, par sa capacité à parler, à se constituer un Imaginaire nous conduit donc naturellement à placer l’Imaginaire entre ces deux instances. Ayant ainsi esquissé les frontières de notre Imaginaire et précisé sa place, la place de l’Homme entre ce qui est en haut et ce qui est en bas, il nous reste à en préciser la structure. » Extrait de: Alain Simon. « L'Homme Quantique - Essai sur les fondements d'une entropologie. » Apple Books.
Note 4 :
Voir les deux articles à ce sujet :