Overblog Tous les blogs Top blogs Technologie & Science Tous les blogs Technologie & Science
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
MENU

Sur les traces de Lévi-Strauss, Lacan et Foucault, filant comme le sable au vent marin...

L'Homme quantique

La querelle des Universaux # 18 — l'Isagore de Porphyre

undefined
Le garage hermétique — Moebius

Le 03/ 11/ 2025 :

- Je ne suis pas très content de cette relecture (voir #17), il faut revenir au plan de travail de l'auteur:


Référence : 
La querelle des Universaux - Notes de lecture # 6 du 14/ 11/ 2021
(Liste de mes commentaires en note 1)

Alain de Libera

"Avant d’entamer la longue geste de l’universel, qui correspond à la longue marche de la philosophie d’Orient en Occident, il nous faut préciser davantage les trois phénomènes fondamentaux qui déterminent tout le processus :

  1. la formulation paradoxale du problème des universaux chez Porphyre ;
  2. le lien conceptuel qui unit la problématique des universaux à la doctrine des catégories à laquelle l’Isagoge est censée introduire ;
  3. les structures platoniciennes qui encadrent, d’un bout à l’autre du Moyen Âge, le déploiement de la pensée aristotélicienne sur le terrain des universaux :
    • a l’argument du Ménon, discours protofondateur de tous les réalismes,
    • b la théorie des Formes éponymes qui parasite en secret l’aristotélisme." p. 39

La formulation paradoxale du problème des universaux chez Porphyre

- Il me semble que tu as déjà traité le premier point, non ?

- Oui, mais à notre façon, ce que précisément de Libera réfute. J'ai tamisé le discours à travers notre grille de lecture, au risque de le dénaturer. Il faut reprendre et suivre le texte plus précisément pour voir s'il n'y a pas de résidu.

Porphyre pose 3 questions au sujet du genre et de l'espèce, relisons ce que de Libera en dit :

⟨1⟩ - Porphyre : si ce sont des réalités subsistantes (ὐφέστηϰεν) en elles-mêmes ou seulement de simples conceptions de l’esprit (έν μόναις ψιλαῖς έπινοίαις)
- de Libera : La question ⟨1⟩ s’inscrit dans le cadre d’un premier aspect du débat d’Aristote avec Platon : les genres et les espèces ont-ils une existence réelle («subsistance») au titre de formes séparées ou existent- ils seulement dans l’esprit du sujet connaissant ?

  • La première branche de l’alternative correspond clairement à la théorie platonicienne des Idée, modèles parfaits des choses sensibles qui en sont le reflet imparfait et ne réalisent que sur un mode déficient l’excellence de leur nature, modèles auxquels l’âme, qui les a contemplés dans une vie antérieure, avant sa chute dans le monde des corps, fait retour par l’anamnèse ou «réminiscence» (Phédon, 74A sq.).
  • La seconde branche correspond en partie à la thèse aristotélicienne standard qui fait de l’universel un concept «postérieur aux choses dans l’ordre de l’être», dégagé du sensible par un processus d’induction abstractive.

Il y a chez nous une distinction claire entre :

  • Ce qui existe, c'est-à-dire ce qui s'impose au Sujet, soit le "trauma" du Réel, d'où la bordure de l'Imaginaire balisée de [∃]𓁜 ;
  • Ce qui est "compris" comme subsistant,
    • Soit en se "constituant" en "objet" de l'attention du Sujet, en [♻], dans la voie R;
    • Soit en "prenant sens" aux yeux du Sujet, en mode ♡, dans la voie R.

Tentons de représenter ceci sur notre surface topologique :

Platon

P1 T4
[⚤] [♻] 
   
 
   •
   
[⚤] [♻]
  • La théorie platonicienne des idées concerne le mode ♡;
  • Les choses sensibles comme "reflet imparfait des idées", serait le raboutage [⚤]/[♻];
  • L'anamnèse ou réminiscence serait alors le raboutage dual [⚤]/[♻] passant directement de 
    • l'expérience du Réel en [∃]𓁜 au rappel 
    • de l'âme qui transcende le Sujet conscient en 𓁝[∅]

- Tu nous l'as déjà dit...

- Oui mais la suite est plus intéressante : dans la thèse d'Aristote, il y a un processus d'induction que nous n'avions pas caractérisé.

Aristote

Q1 P2
   • 
 
 
   ♡
 
 

Or ça nous pose problème : si la construction de l'idée est "postérieure aux choses dans l'ordre de l'être", comme peut-elle être covariante (1)?

- Tu retombes sur les critiques de Hume, et tu oublies ce que nous avons déjà vu : en R, il ne s'agit pas réellement de l'expérience du Réel, faite en R. Mais poursuis, car là tu radotes.

⟨2⟩ - Porphyre : s’ils sont corporels ou incorporels,

- de Libera : La question ⟨2⟩ , qui part de l’existence (subsistance) réelle des universaux, pose en langage stoïcien le problème de la nature de ces existants (subsistants) : s’agit- il d’êtres incorporels ou d’êtres corporels ? Les stoïciens admettant quatre sortes d’incorporels – le lieu, le temps, le vide et le λεϰτόν, c’est-à-dire l’«exprimable», ce que les médiévaux appelleront l’«énonçable» (enuntiabile) –, on bute, sous une autre forme et dans un autre registre ontologique, sur une contradiction implicite aux deux thèses opposées en ⟨1⟩.

- J'ai un gros problème pour suivre le développement car nous faisons très clairement la différence entre "existence" en [∃] et "substance" en [♻].

- Moi aussi ! Il faudra attendre un peu pour démêler le tout. Par contre les définitions des Stoïciens semblent éclairantes :

  • Le lieu [#] et le temps [⚤] se retrouvent chez Kant comme catégories a priori;
  • Le vide en duo avec l'exprimable renvoient à la dualité diachronie/ synchronie de Saussure.

Où tu retrouves effectivement une distinction entre :

  • La voie des choses avec [∃][⚤][♻][∅];
  • La voie des mots, qui s'amorce en ♧ par la distinction synchronie/ diachronie identifiable en [⚤] comme le "temps logique".

Par ailleurs "l'énonçable" médiéval me semble introduire le raboutage ♡/♧ qui donnera ♡[♻] et "l'observable" en Méca Q.

- Bref sans la distinction entre voies, ça te semble inextricable, c'est bien ça?

- La question étant de savoir si notre grille de lecture est suffisante !

  ⟨3⟩ - Porphyre : si, enfin, ils sont séparés ou ne subsistent que dans les choses sensibles (έν τοῖς αίσθητοῖς) et d’après elles, j’éviterai d’en parler : c’est là un problème très profond et qui exige une recherche toute différente et plus étendue.

- de Libera : La question ⟨3⟩ reprend l’ensemble du problème d’un troisième point de vue qui ramène directement à un second aspect du débat d’Aristote avec Platon. L’universel est-il une Forme séparée ou une forme immanente au sensible ?

  • Si c’est une Forme entièrement séparée, il y a un abîme infranchissable entre l’intelligible et le sensible.
  • Si c’est une forme immanente, il faut expliquer comment l’intelligible peut bien être «présent dans les sensibles». On retrouve alors l’opposition de Platon et d’Aristote.

Je pense que nous retrouvons sans problème la dualité entre :

  • Platon : Le monde des idées—♡/ ♧— le monde du sensible;
    • => l'abîme ne pouvant être couvert que par le Sujet lui-même dans [⚤]𓁜/[♻]𓁜.  
  • Aristote : immanence dans la voie des mots :
    • => là encore il faut une action du Sujet;
      • choisir 𓁝♡𓁜  une forme d'expression en ♢ —ce qui répond à (1);
      • qui met en relation les signifiants : ♧𓁜𓁝♢

- C'est ta lecture actuelle...

- Tu as raison, mais il faut bien chercher à comprendre de quoi il est question. Remarque que cette nécessité d'un cadre linguistique pour exprimer un concept se constate dans le texte lui-même, lorsque de Libera trouve nécessaire de rappeler en Grec les termes qu'il utilise... 

Ceci dit, nous retrouvons encore l'opposition Platon—R/R—Aristote.

- Te voilà rassuré ? On peut continuer ?

- Ce matin, en relisant le passage sur les 5 catégories d'Aristote, je retiens un lien entre genre et espèce qui ne m'avait pas frappé de prime abord : il y a de l'espèce au genre un mouvement passant du multiple vers l'Un, et réciproquement du genre à l'espèce, dans un processus fini. Par exemple la substance est un "genre suprême" (la borne supérieure) et l'individu "l'espèce simplisme" (l'élément). Ce que Platon lui-même avait dénoncé "comme un procédé purement logique incapable de conduire à une classification naturelle", qui marque encore la différence R/R.

le lien conceptuel des universaux aux catégories :

- En un sens, notre topologie Imaginaire est un "universel".

- Tu peux préciser ?

- N'est-ce pas un "concept général pouvant s'appliquer à plusieurs cas particuliers" ?

- Si fait, et donc ?

-  Il me semble important de rapporter à cet universel, d'ordre disons "surplombant", les différents types d'universaux, et les postures de ceux qui en parlent. Ils sont, depuis l'antiquité jusqu'à la fin du Moyen Âge (et plus encore, bien évidemment) au nombre de 3. Je te passe les détails pour arriver à ce résumé de l'auteur :

  1. "Le terme φωναί d’abord rendu par voces, «sons vocaux», a cédé progressivement la place à d’autres vocables : sermo, voire nomen, avec Abélard, puis terminus, avec la logique «terministe» du XIIIe siècle, et terminus vocalis, avec les nominalistes du XIVe;
  2. Le terme νοήματα a été remplacé par conceptus, intentiones ou d’autres expressions plus proches d’Aristote, comme affectiones ou passiones animae, ou terminus mentalis au XIVe;
  3. Le terme même d’ ὂντα a cédé la place à celui de res, «choses»." p. 57

Ce que je te propose de représenter ainsi :

concepts    
[⚤] νοήματα   B [♻]
  ↑♢       
[⚤] φωναί
[#]
ὂντα [♻]
mots   choses

- Mais voir les mots, dans leur expression vocale, si près du Réel, a-t-il encore un sens pour nous actuellement ? (2)

- Au sens le plus neurologique qui soit, oui. Ce qui est au plus près du Réel pour nous, ce sont effectivement les signes que nous en recevons, rapportés à quelques neurones auxquels ils sont déjà associés par l'expérience dans notre cortex. Une réalité qui garde tout son sens, même en Méca Q : ce que nous recueillons du Réel nous apparait comme des séries de fréquences, bien proches des "sons vocaux"...

Tu remarqueras par ailleurs que le "concept" est rattaché à la présence du Sujet, dans les termes employés (intentiones, affectiones, passiones animae), ce qui va bien avec notre entendement moderne, en particulier :

  • Les choix de Sujet dans 𓁝♡↓♢♧𓁜 (en maths : choix d'une algèbre, d'une topologie, d'une mesure);
  • Le questionnement de Dirac menant à l'observable : ♡𓁜↻[♻]𓁜. Ce qui nous permet de comprendre, rétrospectivement, que "Les avatars des νοήματα entre les mots et les choses sont un révélateur structurel, une marque de l’évolution des problématiques" p. 58

Une fois établie cette grille, il suffit de lui superposer celle des catégories (hypothétiquement en  ou [#]) pour se faire une idée de toutes les sources de discussions potentielles.

Le déclencheur si je puis dire, qui a posé l'Isagore en posture si déterminante pour la pensée Occidentale, étant l'utilisation par Porphyre du terme «catégoroumène»:

"En définissant le genre comme l’attribut essentiel applicable à une pluralité de choses différant entre elles spécifiquement, Porphyre avait employé le mot «catégoroumène», assez souvent synonyme chez Aristote de «catégorème» et de «catégorie». La distinction latine entre praedicamentum (catégorie, prédicament) et praedicabile (prédicable) montrait sans en expliciter la nature la ressemblance et la différence entre ces deux registres. Tout était lié à la prédication, autrement dit, pour faire assaut d’ambiguïté, à la «catégorisation», mais il pouvait sembler par moments difficile de comprendre pourquoi les genres et les espèces étaient des prédicables et les substances ou les qualités des prédicaments." p.56

- Bref, comme le dit Wittgenstein, il n'y a pas de problème philosophique, juste des embarras de langage...

- No comment. 

- Amen

Hari

Note 1 :

Repris dans notes de lecture #17 du  31/ 10/ 2025 :

  • La querelle des Universaux - Notes de lecture #1 du 12/ 10/ 2021
  •  La querelle des Universaux - Notes de lecture #2 du 06/ 11/ 2021
  • La querelle des Universaux - Notes de lecture #3 du 09/ 11/ 2021
  • La querelle des Universaux - Notes de lecture #4 du 11/ 11/ 2021
  • La querelle des Universaux - Notes de lecture # 5 du 12/ 11/ 2021

Repris dans le présent article # 18 

Repris dans notes de lectures # 19 du 05/ 11/ 2025 :

À suivre

Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article