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Sur les traces de Lévi-Strauss, Lacan et Foucault, filant comme le sable au vent marin...

L'Homme quantique

La grande confusion de Philippe Corcuff # 02 - De l'Identitarisme

Lecture du 25/03/2021

Chapitre 1: Identitarisme

Nota : La signification et l'usage de mes glyphes, comme le schéma général de l'Imaginaire du Sujet  sont présentés ici: "Résumé"

[∃]𓁝⇅𓁜[⚤]𓁝⇅𓁜[#]𓁝⊥𓁜[♲]𓁝⇆𓁜[∅]𓂀 (1)

J'ai situé certains concepts, tels que Ma/Aïda 間, Mu 無, espace 空間 et temps 時間 dans cette grille de lecture, ici : "L'espace-temps / Ma"

[∃]𓁝⇅𓁜[時間]𓁝⇅𓁜[空間]𓁝⊥𓁜[間]𓁝⇆𓁜[無]𓂀 (2)

- Pourquoi cette carte des ethnies en Côte d'Ivoire ?

- Parce que Corcuff en se réfèrant par deux fois à Bourdieu, m'a rappelé de quelle façon l'administration coloniale s'est servi du découpage ethnique pour légitimer des chefs locaux qui se chargeaient en retour de gérer pour elle les populations dont ils étaient les représentants. C'était si efficace qu'elle n'hésitait pas à créer des ethnies à sa botte en coupant en deux ethnies distinctes des groupes homogènes, comme la création du peuple Wé en Côte d'Ivoire,  ou en s'octroyant le privilège de choisir et nommer les chefs tribaux Kanacs en Nouvelle-Calédonie.

- Selon le vieil adage "diviser pour mieux régner"...

- L'administration était beaucoup plus subtile que ça : en légitimant certains chefs, elle s'économisait la gestion directe des populations en renforçant leurs identités particulières. Il faut lire et relire Hampâté Ba, pour comprendre le système colonial...

- Tu nous éloignes du sujet.

- Pas tant que ça: les mécanismes se retrouvent dans le débat hexagonal...

Et puis je ne peux m'empêcher de te conter une anecdote qui sur le coup m'avait complètement scotché. J'étais à l'époque le représentant régional (23 pays d'Afrique de l'Ouest, basé à Abidjan) de ma société, en visite chez VRA (Volta River Autority, l'équivalent de EDF au Ghana), où je rencontre leur DGA en charge de la clientèle. Un EDF en délégation de poste. Je lui demande en quoi consistait son travail, et il me répond : "Je fais le Blanc". Devant mon étonnement il m'explique que les agents de recouvrement ont toutes les peines du monde à encaisser les créances, et que ça se passe en général ainsi :

" - Bonjour, je viens encaisser la facture.
- Aïe mon frère, c'est pas possible ce mois ci, c'est la rentrée des classes, et je dois payer un costume à ma fille, et puis la mère est malade.
- Désolé mais je vais devoir couper l'électricité.
- Mais je te connais, toi : tu es d'Abadakra, je t'ai vu là-bas. C'est quoi tu nom?
- Richmond Soumaré.
- Soumaré, mais je connais ta famille ! Ma grand-tante est une Soumaré, tu l'as certainement vu au village; mais si, elle s'appelle Dorothy, une grande au teint pale... Dis mon frère, tu ne vas pas prendre à la gorge un membre de ta famille, pratiquement du même village, non? Promis, je paie le mois prochain".

Maintenant le même agent a un chef Blanc, peu importe l'écart hiérarchique entre eux, ni même qu'il ne l'ait jamais vu de sa vie, ou reçu la moindre directive de sa part. Sa posture est totalement différente : au lieu d'accepter comme avant, sous la pression sociale qui le contraint, il va répliquer :

"- Si tu savais comme je voudrais pouvoir t'aider, mais tu sais, j'ai un patron, là-bas au district, c'est un Blanc, il ne connait rien à nos liens familiaux et si je ne fais pas rentrer l'argent, il va me virer, et j'ai besoin de ce boulot, sinon, c'est moi qui suis à la rue, alors il faut payer ou je coupe."

J'y ai fait attention ensuite, et je me suis rendu compte que bien souvent, je servais de référent dans des disputes où le mieux que je puisse faire était de ne surtout pas m'en mêler...

- C'est pas un peu une mentalité de colonialiste ?

- Pas spécifiquement. J'ai un vieil ami au Cameroun, devenu avec l'âge le vieux de son village, vers Yaoundé, et bien, il fait la même chose. Hampâté Ba le pointe d'ailleurs dans ses livres. La coloniale envoyait un homme seul pour administrer des territoires immenses où il n'avait comme lien avec les popluations que son secrétaire-traducteur Sénégalais. Or ce serviteur usait et même abusait de cette position d'intermédiaire, ce qui explique une certaine réserve, encore perceptible aujourd'hui des Maliens, Ivoiriens et autres francophones de la région envers les Sénégalais. (note # 0)

Mais, et c'est là l'important, le ressort est vieux comme le monde. Le principe de non intervention d'un référent exogène se retrouve déjà au Cameroun, avec le concept de "père de derrière" en pays Bamiléké. 

- Tu nous ressasses tes vieux souvenirs de boomeur, mais si tu revenais au texte?

- Ne comprends-tu pas qe je te parle de Bourdieu ?

"Par ailleurs, un impensé restreint le champ de l'émancipation: la fétichisation implicite du représentant républicain (dont Mélenchon lui-même serait [...] une des incarnations les plus élevées) aveugle à la tendance à la domination proprement politique des représentants sur les représentés, telle qu'elle a pu âtre analysé par Pierre Bourdieu." p. 91

et plus loin :

"On peut faire l'hypothèse que si Confavreux passe à côté des gains de connaissance que la notion d'identitarisme est susceptible de procurer, ce n'est pas à cause d'une insuffisance nationale-républicaine, comme Mélenchon, mais par culpabilité post-coloniale, ce que Bourdieu a caractérisé comme une "sorte de complaisance, à base de culpabilité, qui, autant que l'essentialisme raciste, enferme et enfonce les colonisés ou dominés en portant à tout accepter de ce qu'ils font et de ce qu'ils sont" p. 93

Ces remarques me semblent si fondamentales qu'il nous faut comprendre le mécanisme de domination en cause.

D'une façon très générale, le dominant s'en réfère au "docteur de la loi" au lieu de se référer à la loi elle-même pour justifier sa domination, la question est d'ordre psychologique, et pour bien en comprendre le mécanisme, il faut en revenir aux fondamentaux :

  • En position ex post[∃]𓁝⇅𓁜[⚤]𓁝⇅𓁜 etc., tourné vers le Réel le Sujet peut identifier en [⚤]𓁜 les objets comme les concepts.
  • En postion ex ante 𓁝⇅𓁜[#]𓁝⊥𓁜[♲]𓁝⇆𓁜[∅] le Sujet reste dans la stricte incapacité de pointer du doigt le concept auquel il se réfère, il ne peut que l'interpréter, et le "connoter" en tournant autour. La posture ultime étant de l'ordre de la foi, ou de la subordination au Symbolique 𓁝.

Un "docteur de la loi", prètre, shaman, rabin, mollah, professeur de fac, intellectuel (reconnu !), doctrinaire de tout poil ou maître à penser comme le professeur Raoult, se présente comme quelqu'un qui a pu faire le saut :

([♲]𓁝⇆𓁜[∅]⏩[♲]𓁝⇆𓁜[∅])𓂀

C'est-à-dire qu'il est en position d'édicter la loi. Son autorité permet donc à ceux qui lui font allégeance de le représenter aux yeux des dominés.

- Ce n'est pas clair, précise !

- Théoriquement chacun de nous se trouve à un moment de son développement intellectuel dans la position 𓁝. Cette situation d'attente et de doute est celle de la foi et de la communion avec l'Autre, mais elle peut être anxiogène, et mener à la névrose (voir "névrose et psychose une question de posture"). D'où pour beaucoup, la volonté de retrouver une posture "objective" 𓁜, quitte dans les situations extrêmes, à développer une théorie psychotique [♲]𓁜, (voir le cas du président Schreber) pour échapper aux incertitudes de la névrose.

Nous avons la même volonté générale en politique de retrouver une posture 𓁜 pour échapper à l'incertitude liée à la posture 𓁝.

Seulement ici, je ne suis plus au niveau des concepts de niveau [♲], mais dans une recherche d'appartenance : "j'appartiens au clan# du docteur de la loi", en [#]. Et l'économie intellectuelle est dans le mouvement [♲]↓[#].

Considérons un "docteur de la loi" 𓁝𓁜(notre Blanc), un Sujet dominant 𓁝𓁜1 (l'agent de VRA) et des Sujets dominés 𓁝𓁜2(les abonnés), le mécanisme est à double détente :

1/ Pour le dominant 𓁝𓁜1 :

  • Il est du clan de 𓁝𓁜0 : (𓁝1⇆𓁜0)𓂀1;
  • Pour les dominés 𓁝𓁜2, sa parole vaut celle de  𓁝𓁜0: (𓁝2[♲]𓁜1)𓂀1;

2/ Pour les dominés 𓁝𓁜2 :

  • Le dominant occupe la place du docteur de la loi :([♲]𓁝1⇆𓁜0[∅]⏩[♲]𓁝0𓁜1[∅])𓂀2
  • La soumission se pose en termes d'appartenance (il accepte la place assignée) :       (([#]𓁝2⊥𓁜2[♲]𓁜1)⏩[#](𓁝2𓁜2[♲]𓁜1))𓂀2

En termes d'économie d'énergie, le gain est énorme, pour le dominant, comme pour les dominés ! 

- Ce n'est pas évident, précise.

- Dans notre exemple de VRA :

1/ Celui qui "incarne" la loi, "le Blanc", en 𓁝𓁜0, n'a strictement aucune énergie à dépenser dans l'histoire, son utilité est d'être identifiable.

2/ L'agent, 𓁝𓁜1 (coincé entre 𓁝𓁜0 et 𓁝𓁜2 ) devrait théoriquement appuyer son action auprès de 𓁝𓁜2 sur un réglement traduisant une loi générale (qui consomme paie). Il devrait donc induire la transition ([♲]𓁝2⇆𓁜[∅]⏩[♲]𓁝⇆𓁜2[∅])𓂀1 chez le Sujet 𓁝𓁜2 pour qu'il accepte de payer. C'est exactement la même posture que celle du conteur récitant un mythe, ou du chaman instruisant un adolescent, ce qui peut mener ici à des palabres incertaines et sans fin.

3/ La tactique de 𓁝𓁜2 est d'amener 𓁝𓁜1 à partager la même classe# que lui, comme "frère", dans une progression immanente, de l'idividu à la classe: ([⚤]𓁝1⇅𓁜[#]𓁝⊥𓁜⏩[⚤]𓁝⇅𓁜[#]𓁝⊥𓁜1)𓂀2;

4/ Pour contrer l'argument de 𓁝𓁜2, il suffit alors à 𓁝𓁜1 d'expliquer qu'il est de fait, dans la classe de 𓁝𓁜: ([#]𓁝1⊥𓁜[♲]𓁜0⏩[#]𓁝⊥𓁜1[♲]𓁜0)𓂀1

Si l'échange est purement dialectique entre 𓁝𓁜2 et 𓁝𓁜1 (i.e. de niveau [⚤]𓂀),  tu vois tout de suite que :

  • 𓁝𓁜0 simple référent n'a rien à faire;
  • 𓁝𓁜1
    • abaisse le niveau de la discussion, en la ramenant de [♲] à [#];
    • oppose un argument transcendant (i.e.: [♲]↓[#]) à un argument immanent de 𓁝𓁜2 (i.e.: [⚤]↑[#]), ce qui en fait toute la force;
  • Ce recul en [#] permet à 𓁝𓁜2 :
    • d'accepter l'argument transcendant en [#]𓂀1 sans perdre la face;
    • de ne pas se remettre en cause son système de valeurs en [♲]𓂀2.

De ce point de vue, le niveau [#] d'appartenance catégorique# est un niveau charnière dans un échange d'arguments transcendants/ immanents, et je crois qu'à partir de ce que nous venons de voir, on peut avancer dans ce que Corcuff nous dit de son concept d'identitarisme.

L'identitarisme et ses complications actuelles :

Le point qui m'a pris du temps à conceptualiser était la focalisation sur un seul axe de différenciation. En effet, pour moi, le niveau [#] est celui où l'espace est rapporté à des axes orthonormés ⊥, ce qui permet de concevoir une pluralité de groupes orthogonaux entre eux, nous en avons parlé dans l'introduction.

Mais ce que nous venons de voir à l'instant me permet d'avancer l'idée suivante : dans une confrontation⚤ d'ordre dialectique [⚤] entre deux individus, la supériorité s'acquiert en opposant un argument transcendant [♲]↓[#] à un autre immanent [⚤]↑[#], dans une catégorie donnée en [#].

Par nécessité, l'échange verbal ou écrit, est linéaire et ne peut donc exprimer qu'une catégorie définissant l'objet. La discussion doit donc se diffracter en [#] en autant de discussions élémentaires que d'axes de références.

De plus, et là ça m'avait complètement échappé en première lecture, lors de la première montée [⚤]↑[#], je garde la notion d'ordre, qui disparaît ensuite, lors des répétitions (note #1). C'est un autre argument pour comprendre qu'une discussion en [⚤] devant mener à un classement vainceur/ vaincu, passe nécessairement par la réduction de cette discussion à une seul axe, ou une seule catégorie en [#]. 

De fait on peut voir des défenseurs des libertés LGBT de droite, des gens de gauche peu soucieux d'écologie ou des écologistes qui se foutent du salaire minimum : chacun dans sa bulle... 

Or, Corcuff pointe que :

"La formation discursive (ou "formation idéologique") identitariste concerne des discours rabattant des individus et des groupes sur une identité unique ou principale, homogène et fermée. La notion d'identitarisme permet de traiter dans un espace commun des paroles et des écrits divers, voire opposés, sans les considérer pour autant comme identiques." p. 80

Je propose la lecture suivante :

  • le niveau [♲] est celui où s'exprime (en lois ou principes explicites) [♲]𓁜 les attentes ou la foi en 𓁝[∅]. Rien de magique ou de surnaturel là-dedans, c'est ce que les mathématiques voient en l'objet initial vide, pouvant mener par une application à n'importe quoi. Le docteur de la loi 𓁝𓁜0 doit donc répondre à toutes les attentes qu'il porte (et ce d'autant mieux qu'il s'abstient de parler !), c'est vrai dans les religions du Livre (qu'il s'agisse de l'Imam Chiite, du rabbin, ou du pape s'exprimant urbi et orbi) comme au tribunal où le juge dit le droit.
  • Nous avons vu que 𓁝𓁜1 rabat le discours de [♲]𓁜0 à [#]𓁜1, dans l'optique d'une confrontation dialectique avec 𓁝𓁜2, et donc dans une classe commune, pour faire valoir un argument ↓contre un autre↑, sur une classe commune aux deux en [#].

Mais du coup, je pense que Corcuff réduit une "formation idéologique" qui théoriquement devrait être de niveau [♲] de la loi (comme le "Ma" [間]𓁜 Japonais), à une discussion sur l'appartenance en [#]. En ce sens, je pense qu'il faudrait préciser de façon péjorative formation idéologique identitariste#.

Des identitarismes :

Tu t'amuseras à vérifier que notre contextualisation du concept te permet de retrouver toutes les variantes que Corcuff nous rapporte ici.

Je noterai juste que la notion de "fermeture" de l'identité de 𓁝𓁜2 est liée à la posture ex post de 𓁜1 la définissant.

De même : "la hantise du mélange, du métissage", selon l'expression d'Amselle, accompagne souvent cette construction des murs identitaires." p. 85 est-elle assez simple à comprendre : le métissage est une remise en cause du cadre [#]𓁜1 l'obligeant à se remettre en question: [#]𓁝⊥𓁜1[♲]⏩[#]𓁝1⊥𓁜[♲]... La rigidité dans la position 𓁜 allant croissante avec une attitude paranoïaque ou psychotique...

Par contre l'idée suivante me semble discutable : 

"Les identitarismes sont des essentialismes, en tendant à essentialiser les identités individuelles et collectives, à les transformer en essences, c'est-à-dire en entités compactes et stables." p. 86 

Si tu m'as bien suivi jusqu'ici (il est toujours permis à un auteur de rêver), l'essence d'une chose se comprend comme le volume de l'eau contenue dans un verre, et se conserve lors d'un transvasement dans un bol, et donc ce volume se conserve tandis que sa surface# (ce que l'on en voit) change.

Or, nous sommes ici en [#]𓁜 et ce qui est réifié dans le regard que le Sujet ex post 𓁜 porte sur l'objet, c'est sa surface#, en l'occurrence, son appartenance# au groupe#. et non son essence ou volume en [♲].

Ce qui est réifié et non essentialisé, c'est l'identité de l'Autre, aux yeux du Sujet  qui le classe, et non l'Autre lui-même ! À preuve : dès que l'Autre n'entre plus dans le cadre fixé, il est exclu, sans égard pour qui il est en dehors du groupe. L'individu n'est jamais l'Autre du Sujet classifiant, mais "l'objet petit a" de son discours (comme de son désir, of course, voir "point # 4").

Je pense qu'il serait bon de rectifier le vocabulaire pour prendre en compte cette différence entre "réifier" à un niveau quelconque, et "essentialiser" au niveau [♲].

Des résistances à l'analyse de l'espace des essentialismes.

"S'efforcer d'appréhender les identitarismes dans un espace commun suscite des résistances." p. 87

Vu comme c'est parti, avec cette imprécision sur le positionnement du terme en [#] ou [♲] le contraire m'eût étonné !

Premier type de résistances

"consiste en la sacralisation ultraconservatrice de "l'identité nationale", seul lieu politique qui ne serait pas justiciable d'une critique de l'identitaire". p. 87

Là, il s'agit bien du passage de [#] à [♲], avec effectivement, une "essentialisation" de l'appartenance à la nation. Reste en suspens d'expliciter "au nom de quel principe", on en arrive à : ([♲]𓁝⇆𓁜[∅]⏩[♲]𓁝⇆𓁜[∅])𓂀. D'où l'intérêt du recours à un docteur de la loi, pour éviter la discussion. En France, nous avons largement utilisé de Gaulle à cet effet...

Notre approche permettra peut-être de mieux rendre compte de l'opposition que Mathieu Bock-Coté voit entre aspects positifs et négatifs du concept dans "empire du politiquement correct":

" le qualificatif "identitaire" renvoie à certains moments à un positif divinisé (quand cela concerne "la nation" et "l'identité nationale") et à d'autres moments à du négatif diabolisé (quand cela vise "les revendications identitaires" et le "lobby identitaire" de l'horrible "multiculturalisme" avec à son avant-garde terrifiante : "l'ulta-gauche identitaire"), sans que ces usages antagonistes soient justifiés ou même explicités" p. 87

Les tenants d'une définition identitaire au niveau [♲]𓁜, voient certainement d'un mauvais oeil une quête de sens [#]𓁝⊥𓁜[♲]⏩[#]𓁝⊥𓁜[♲], qui fatalement  remet en cause les acquis. En effet, le dernier saut, permettant de répondre à la recherche 𓁝[♲] ⏩[♲]𓁜 conduit nécessairement à un sacrifice des idées reçues (i.e.: ([#]𓁝⊥𓁜[♲]𓁝⇆𓁜)⏩([#]𓁝⊥𓁜[♲]𓁝⇆𓁜)...cf.: "point #3"). Mitterrand ne pouvait que rejeter de Gaulle...

Les qualificatifs "positifs et négatifs", suffisent donc à classer Bock-Coté comme "conservateur" au sens où il n'accepte pas de remise en cause de ses idées au niveau [♲], mais il n'y a aucune incohérence contrairement à ce que Corcuff nous en dit. Ce qui pose question sur ses intentions !

- Comment cela ?

- Soit il ne voit pas la nuance, et c'est une faiblesse de son analyse, soit il la voit et il nous enfume...

- Soit tu n'as pas lu jusqu'au bout...

- Tu as raison, continuons :

"Cette incohérence conceptuelle s'inscrit d'ailleurs paradoxalement dans un cadre narratif qui est encore celui du supposé "politiquement correct" pourtant remis en cause comme "idéologie dominante". [...] L'incohérence est double : au niveau du contenu (sur la question "identitaire") et de la méthode (dénoncer des adversaires en utilisant des instruments rhétoriques similaires à ceux que l'on dénonce chez eux)." p.87

En fait, le "politiquement correct" de Bock-Coté consiste à dire que l'idéologie dominante est celle qu'il dénonce. Il serait donc, lui, en 𓁝[♲] à l'attaque d'un bastion [♲]𓁜, et donc le "nom du père" qu'il doit tuer, c'est en gros l'ensemble de l'université Américaine où se déploient les études de genres en tout genre...

Là non plus je ne vois pas d'incohérence : il ne peut objectivement pas faire mieux que de retourner contre eux les mêmes arguments rhétoriques, puisqu'ils sont dictés par leurs positions relatives !

  • Bock-Coté se voit en 𓁝𓁜1 dans une action ((𓁝1[♲]𓁜2)⏩(𓁝2[♲]𓁜1))𓂀1
  • Ses opposants en 𓁝𓁜2 dans une action ((𓁝2[♲]𓁜1)⏩(𓁝1[♲]𓁜2))𓂀2

Ce qui me gène dans l'affaire c'est que Corcuff ne puisse s'opposer à Bock-Coté qu'en cherchant sa disqualification pour "incohérence"; révèlant à mon sens une faiblesse dans son analyse.

Second type de résistances : les communautarismes

J'ai du mal à entrer dans la différence "identitaire" / "identitarisme" qui n'est pas très explicite chez Corcuff. Je présume, pour avancer, que :

  • "identitaire", plus positif chez Corcuff relèverait d'une "recherche ou revendication identitaire", issue d'un regroupement, immanent par principe, portant de l'individu au groupe :

(([⚤]𓁝𓁜[#])⏩([⚤]𓁝𓁜[#]𓁝𓁜)⏩([#]𓁝𓁜))𓂀

  • "identitarisme" serait une étiquette plaquée ex post sur le groupe :

 (([#]𓁝𓁜[♲]𓁝𓁜)⏩([#]𓁝𓁜[♲]𓁝𓁜)⏩([#]𓁝𓁜​​)𓂀

L'idéal serait bien entendu que le sentiment d'appartenance ↑ rencontre sa reconnaissance ↓. La rencontre d'un percept ↑ et d'un concept ↓, marquant comme toujours la "prise de conscience", ici au niveau [#] on pourrait parler de "conscience de classe".

À l'appui de cette interprétation viendrait ceci :

" ... Or toutes les mobilisations d'une identité "musulmane", "juive", "noire" ou "gay", ne relèvent pas de l'identitarisme au sens de l'enfermement d'individus dans une identité principale..." p. 88

Le mot important est ici "enfermement", or l'enfermement est dans la définition ex post [♲]↓[#] de l'identitarisme, quand l'ouverture est dans la recherche identitaire ex ante [#]↑[♲]...

On comprend alors aisément, comment l'identitarisme ↓ au nom de la nation, est employé pour étouffer toute velléité de recherche identitaire ↑... C'est une variante du jeu que nous avons décortiqué en introduction...

- Et quel commentaire fais-tu de cette déclaration de  Natacha Polony ?

"faisant passer les lois de la République et l'appartenance à la communauté nationale avant leurs convictions religieuses" p. 89

- Tout simplement que l'appartenance# du citoyen à la République est de niveau [#]𓁜, quand sa 𓁝foi est une recherche de sens 𓁝[∅]. La cohérence doit donc se retrouver dans la bascule autour de 𓁝[♲]𓁜. Il faut qu'il y ait cohérence entre les dogmes enseignés et l'appartenance# à la République. Mais, que je sache, le docteur de la loi a pour tâche d'interpréter les mystères de la foi pour les fidèles dans leur rapport à Dieu, pas de gérer la chose publiquedes citoyens#.

Je pense qu'il faut en revenir à l'impératif catégorique de Kant :

"Agis de façon telle que tu traites l'humanité, aussi bien dans ta personne que dans toute autre, toujours en même temps comme fin, et jamais simplement comme moyen".

S'il en est ainsi, l'appartenance# d'un individu x à une communauté religieuse# et nationale# n'offre aucune difficulté : les 2 axes de définition étant strictement orthogonaux (i.e.: religion⊥nation), le Sujet x peut s'y référer pour se définir comme un produit x =(foi; nation) si ça lui chante... C'est le principe même de la laïcité... 

Maintenant, le classement que propose Natacha Polony :

  • Soit n'a pas de sens en lui-même puisque les deux axes en question sont sans commune mesure. (note #1)
  • Soit découle d'une norme édictée en [♲] et ce n'est plus une observation, mais un jugement de valeur : la religion n'a aucun sens. Ce n'est plus de la laïcité mais un athéisme imposé à tous, et nous ne respectons plus l'impératif catégorique kantien !

Le 27/03/2021 :

Troisième type de résistances : celle de Confraveux dans Mediapart.

- J'ai attendu d'être au matin de bonne heure et les idées claires, pour relire ce passage, qui m'a semblé à première lecture aussi clair que du jus de chaussettes.

Il y a tout d'abord un manque de compréhension de ce qu'est un "principe de symétrie". Ce qui nous oblige, désolé pour le détour, à revenir au Triptyque de Noether : (conservation; symétrie; incertitude). (note #2)

Après avoir retourné le texte en tous sens, il me semble que la symétrisation dont il est question ici relève en fait d'une différence de points de vue du Sujet :

  • Local ou ex ante 𓁝[α];
  • Global ou ex post [α]𓁜.

Autrement dit, la "symétrie" en question ne porterait pas sur l'objet ou le concept, mais sur les postures du Sujet, ce qui n'a rien à voir avec la notion de symétrie de l'objet ou du concept en lui-même...

Une fois nos lunettes correctives en place, essayons de rentrer dans le texte.

Lorsque Confraveux parle des "frauduleuses symétries sur l'identitarime" p. 92, il faut traduire par : un discours présentant comme équivalents :

  • Une quête de sens d'individus qui se reconnaissent dans une communauté, dans un mouvement immanent ↑ aboutissant à 𓁝[#]𓁜⏩[#]𓁜;
  • Le plaquage d'une étiquette sur un groupe d'individus dans un mouvement transcendant ↓ de la forme : [#]𓁝𓁜[♲]𓁜⏩[#]𓁝𓁜[♲]𓁜⏩[#]𓁜.

En ce sens, il est évident que cette équivalence est frauduleuse, et vise, comme nous l'avons vu, à écraser la démarche immanente par une catégorisation qui enferme les individus de la classe en question.

Corcuff poursuit :

"Une juste objection au recours à la notion d'identitarisme pourrait viser une symétrisation des identitarismes générés au sein des groupes dominants et au sein des groupes dominés comme supposant une stricte identité entre eux en appelant un même jugement négatif." p. 92

Je comprends :

  • Les "groupes dominés", comme étant en recherche d'identité dans une démarche immanente ↑ (exemple : la "classe ouvrière"),
  • Les "groupes dominants" s'arrogeant le droit de qualifier et classer de façon transcendante ↓ les groupes dominés, comme eux-mêmes (i.e.: la royauté est de droit divin et classe les sujets en Noblesse, Clergé, Tiers État).

La "symétrisation" (que je préfère appeler équivalence) consisterait à dire que la "Classe Ouvrière" est le "Tiers État". Il est aisé de comprendre que cette "équivalence" ne peut être vue que du point de vue normatif de la classe dominante.

Corcuff poursuit :

"Or, des fixations identitaires peuvent bien servir de ressources dans des résistances à la hiérarchisation stigmatisante, à la discrimination et/ ou à l'exploitation portée par les dominations de classe, de genre, racistes, homophobes etc. Ces identitarismes ne peuvent donc pas être mis exactement sur le même plan que les identitarismes justifiant un ordre dominant et infériorisant les dominés." p. 92

Il y a une difficulté pour les dominés dans leur quête d'un sens à leur identitéqui est de ne pas prendre en compte les autres dimensions du Sujet.

- Je ne te suis plus ?

- Prends par exemple la quête de sens du mouvement LGBT. Dans un premier temps, il s'agit de se repérer en tant qu'individus, puis de s'identifier# pour trouver un sens à ce qui les définit. Mais si la quête en reste là tu ne vas trouver qu'une symétrie, dans un discours : (𓁝⇆𓁜)𓂀 du style : "nous sommes tous égaux, quel que soit notre genre". Mais quel est le principe conservé au-delà de ça ? À ce niveau de discours, que j'assimilerais à une "revendication" en [♲]𓁜, je ferme la discussion sur cette problématique. Pour ouvrir la perspective, aux autres dimensions du Sujet, il faudrait passer en [♲]𓁜⏩𓁝[∅].

Tandis que les dominants, eux, ont déjà répondu : 𓁝[∅]⏩[♲]𓁜.

Dans la pratique ça donne un dialogue de sourds : le curée dit que l'homosexualité est interdite par Dieu, et les homos traitent le curé de vieux con, faute de mieux.

Poursuivons :

"Le sociologue Abdellali Hajjat justifie ainsi son double rejet de "l'essentialisme, qu'il soit dominant ou inversé" par l'impensé" de la singularité individuelle, en refusant "de réduire et d'être réduit à une dimension de l'identité, de dénier ou de se faire dénier la complexité de l'individualité et la multiplicité des appartenances." p. 92

Vu ce que nous venons de dérouler, ce point de vue me semble parfaitement clair, avec cependant un bémol : nous avons vu que lorsque la discussion a pour fin de déboucher sur une action, un programme d'actions, ou une séquence, en [⚤], il faut malgré tout, pour chacune des dimensions concernées, se focaliser sur une ligne d'action (i.e. : le déroulement, séquentiel par essence, et donc ordonné, s'incarne pour chacune des dimensions retenues, par un oubli des autres dimensions).

Pour terminer avec Confraveux (selon Corcuff) :

"Confraveux présente, cette fois de manière a-critique, la réhabilitation de "l'essentialisme" autour des notions "d'essence noire", et de "politique de l'essence" opposées aux théories d' "hybridité" identitaire, opérée par le jeune philosophe Norman Ajari, membre par ailleurs des indigènes de la République, sans pour autant marquer une adhésion à cette thèse." p. 94

Très sincèrement, je n'ai aucune idée ou expérience de ce que pourrait être la "négritude", n'ayant lu ni Aimé Césaire, ni Léopold Sédar Senghor. Je doute néanmoins que la question puisse se poser en dehors de la présence du "Blanc".

Autrement dit, mais cela reste un a priori de ma part, je doute qu'une recherche identitaire autour de la négritude ↑ ait un sens en dehors d'un refus d'un étiquetage ↓ de "nègre" par le "Blanc"... Ce qui me rend suspect tout "essentialisme" du "Noir". 

Je vais terminer sur cette anecdote qui n'avait interloqué au moment où j'en ai pris conscience. Après avoir tenu le poste à Abidjan dont j'ai parlé en introduction, je me suis retrouvé DGA de EDM (Énergie du Mali) à Bamako, et hormis les réunions de direction chaque lundi matin, je me retrouvais toute la journée entouré d'une cinquantaine de cadres tous Maliens, sauf un autre expat comme moi. Je ne sais pas trop comment le dire, mais, à un moment donné, la norme, c'est le "Noir", et je ne me pensais pas comme "Blanc", juste dans des relations de boulot. Or donc, après un certain temps d'acclimatation en milieu Malien, je représente EDM au sein d'une délégation Malienne pour aller discuter à Abidjan de la liaison électrique Sikasso-Ferkessédougou entre les deux pays.

Nous arrivons en délégation pour rencontrer nos homologues Ivoiriens, et je retrouve à cette occasion tous les gens que je connaissais de longue date, et j'ai eu l'impression de rentrer chez moi ! Je retrouvais chez les Ivoiriens des liens beaucoup plus directs et spontanés qu'avec les Maliens, plus réservés et qui demandent plus de temps pour être en familiarité avec eux.

Tout ça pour dire que je ne connais pas de "Noir", je connais des Maliens, des Ivoiriens, des Sénégalais, des Guinéens ou des Camerounais, et j'ai spontanément plus d'affinités avec tels ou tels mais je ne sais pas ce qu'est un "Noir" dans l'absolu; de même que j'ai spontanément plus d'affinités avec un Italien qu'avec un Allemand dont je ne comprends ni la langue ni les usages.

Et donc la notion d'"essence" en la matière me semble extrêmement "relative"...

Concurrences victimaires et ressentiment :

Je ne vais pas trop m'étendre sur le sujet. Se présenter comme victime, c'est en fait en appeler à l'humanité (commune) du vis-à-vis.

Tactiquement, il s'agit, pour qui est en demande 𓁝2[♲], de forcer celui qui domine [♲]𓁜1 à communier dans une même posture 𓁝 face à un Symbolique supposé commun 𓁝 en le "retournant ":

 ([♲]𓁝⇆𓁜1[∅]⏩[♲]𓁝1⇆𓁜[∅])⇅𓂀2.

L'idée, c'est que 𓁝2 se montrant "plus" victime que les concurrents, le dominant 𓁜se retrouve ensuite dans une position "plus" à l'écoute du dominé, que des concurrents ([♲]𓁝1⇆𓁜[∅]⏩[♲]𓁝⇆𓁜1[∅])⇅𓂀1. C'est le bébé criant pour focaliser sur lui l'attention de sa mère...

Dans ce schéma d'action, le ressentiment tiendrait à l'automatisme de répétition faute de succès. Tu peux lire le reste à partir de ça...

Paniques identitaires :

Corcuff s'intéresse en particulier à l'islamophobie.

"Dans une analyse globalement éclairante, De Cock et Mayran font toutefois l'erreur de mettre l'accent sur la place supposée centrale d'une intentionnalité manipulatrice dans ces paniques identitaires, notamment à travers le rôle des "entrepreneurs identitaires". p. 98

Effectivement : le sentiment de panique n'a pas besoin d'être coordonné pour que des individus se définissant comme d'un certaine classe1# se sentent agressés par une classe2#. Il suffit que les membres de cette dernière soient perçus par les membres de la classe1# comme plus déterminés dans leur propre recherche identitaire, et donc susceptibles d'appliquer avec succès la tactique vue précédemment... C'est le sentiment de rejet de l'aîné lorsque la mère s'occupe du petit dernier.

On peut même ajouter que la classe2# sera perçue comme d'autant plus soudée, et donc dangereuse, qu'elle sera minoritaire... Avec à la limite un phénomène de bouc émissaire...

Jean-Claude Kaufmann et l'ouverture-fermeture des identités contemporaines:

- Wouah ! Dire que dans nos sociétés occidentales les "identités de chaque individu sont davantage plurielles" me semble un contresens total ! (note #3). 

Il suffit d'aller faire un tour en Afrique pour se rendre compte de la complexité de l'identité d'un individu. Prends par exemple un Malien. Il y a, bien entendu, la religion très majoritairement musulmane, mais comptent également son ethnie, puis sa caste et son nom, avec des cousinages à plaisanterie (un Kante a le pas sur un Coulibaly), sans parler des classes d'âge, ni du village (ah! Les retours au village !). Ces différents axes definissent sa position sociale, et il pourra exercer tel ou tel métier ou se marier avec telle ou telle personne correspondant à son rang, sa caste, ou son ethnie. Avec un peu d'habitude, tu situes une personne dès qu'elle se présente ! Au regard de cette complexité, nous leur apparaissons comme des brutes, un peu comme à nos yeux les Américains sont tous des rednecks...

Maintenant, après ce bémol, nous pouvons peut-être entendre ce que nous dit Kaufmann: dans l'Occident post-cartésien, l'individu se construit à partir du cogito, dans un mouvement immanent ↑, et donc la recherche de ses appartenances#, comme d'un sens à celles-ci, se heurtent à un non-dit: l'ouverture sur le Symbolique est quasiment tabou dans le discours politique (exemple : les doctrines marxiste et capitaliste).

L'homme occidental serait donc en "recherche d'identité".

Par contre, hors ce cas spécifique qu'est l'Occident contemporain, la définition de l'individu se fait de façon transcendante ↓ à partir de critères auxquels l'individu ne participe pas.

- Il y a malgré tout en Occident des déterminations qui conditionnent l'individu : comme sa position sociale on son genre, et sa religion... En France, par exemple, on voit bien qu'il y a une fermeture des élites sur elles-mêmes...

- Oui et j'ai même peur que ce bouquin ne participe à cet "entre-soi"... Mais passons. 

Je veux juste pointer ici que la détermination sociale des individus par le haut est la façon la plus commune et la plus ancienne, pour un "individu", de connaître sa place dans la société. À l'opposé, en Occident, le questionnement et la remise en cause de ce déterminisme, vécu par "l'individu" comme injuste, sont très récents.

- Mais pourquoi une telle passivité hors de nos pays occidentaux ?

- Parce que la quête, lorsqu'elle n'aboutit pas, te laisse dans une position ex ante 𓁝[α] frustrante, et l'automatisme de répétition peut te conduire à la névrose. Ce n'est pas un hasard s'il y a tant de psychanalystes à New York.

Par contre, lorsque ta place dans la société est assurée par toutes ces contraintes sociales, ton acceptation [α]𓁜 t'évite la névrose... Cela a même été mis en évidence sur des rats par Henri Laborit (certains remplacent d'ailleurs les rats par des humains comme ici).

- Jusqu'à accepter des dictateurs ?

- Je vais te dire un secret : la psychose du dominant agit sur les dominés comme un remède à leurs névroses. Le remède aux névroses individuelles n'est plus individuel (chacun sa psychose) mais collectif (la psychose est portée par un référent extérieur), d'où le développement des théories complotistes, mais ceci est une autre histoire... (note # 6)

- Attends un peu, tu ne peux pas t'en tirer par une pirouette : les Noirs dans nos banlieues, comme les Beurs, sans parler des Juifs ont, malgré tout ce que tu viens de dire, un problème d'identité, tu ne peux le nier.

- Oui, un problème d'identité, par rapport à leur insertion dans nos sociétés occidentales, par rapport à un regard que l'on qualifie rapidement de "mâle blanc"... Comme je te le disais en ouverture, je ne suis pas sûr qu'Aimé Césaire aurait théorisé sur la "Négritude", sans un contexte qui l'y a poussé.

Lorsqu'un Noir de Harlem traite un autre Noir de "negro", il emprunte le point de vue d'un Blanc archétypique. C'est toute la problématique de "peau noire masques blanc".

- Donc, Kaufmann  a raison, malgré ce que tu en a dit.

- Ce qui me gène, c'est qu'il passe à côté de cette spécificité, tout occidentale, d'une définition de l'individu dans une démarche immanente ↑, à partir de l'ego, qui vient contrarier une démarche ancestrale, transcendante ↓, qui depuis toujours part de la tribu pour définir les individus. Dans le développement de chaque Sujet, la rencontre se fait en [#] (i.e. topologie: je peux passer d'une posture globale 𓁜 à locale 𓁝) dans la phase dite "du miroir" selon Lacan. Nous assistons, pour les nouveaux venus dans nos sociétés occidentales, à un phénomène du même type. Notre regard est comme celui du référent sur l'enfant qui se retourne pour le questionner:

  • "C'est mon image dans le miroir" 
  • "C'est ma place dans la société" ?

Et la réponse, dans l'un et l'autre cas, passe par un conflit avec la figure parentale, qui suit depuis toujours un schéma de pensée mythique, et passe par le sacrifice de cette figure (encore une fois : reporte-toi à "Point #3 la FCM de Lévi-Strauss").

- Comparaison n'est pas raison: tu ne peux pas limiter la question de l'intégration des minorités à cet aspect psychologique : il y a des conditionnements sociaux et des questions politiques à résoudre pour régler le problème de l'intégration sociale...

- Laisse-moi respirer un peu: nous en sommes à parler de l'identitarisme et de la recherche d'identité, chaque chose en son temps.

En nous limitant au sens post-cartésien de l'identité que nous venons d'évoquer, vu comme une question "ouverte", en posture 𓁝2[♲], la réponse "fermée" de ce que Kaufmann appelle "national-racisme" en posture [♲]𓁜1:

"contribue à faire de "l'identité", vue comme un problème adossé au couple "protection" / "menace" un des thèmes politiques principaux des débats publics dans le contexte identitariste. p. 100

"L'identité", nous venons d'en parler, la "protection" vient, bien entendu du sens donné par les dominants en  [♲]𓁜1 à cette recherche identitaire en 𓁝2[♲]. Quand à la "menace", nous l'avons vue comme une concurrence entre demandes identitaires entre groupes. 


Le 30/03/2021 :

Tropismes manichéens de la "question identitaire" :

- Ce que j'écris au fil de mes commentaires, dessine une conception du Sujet (ou de l'individu) qui s'arrête à Descartes.

C'est déjà assez difficile, comme nous l'avons vu, pour nos modernes penseurs, encore crispés dans une approche européo-centrée, pour ne pas dire de "mâle blanc dominant", tel qu'il peut se penser lui-même, condescendant à éclairer de ses Lumières le vaste monde, jusqu'au fin fond de l'Afghanistan, l'Irak, la Libye, et la Syrie, avec les résultats que nous constatons, pertétuant le travail séculaire des évangélistes qui ont civilisé les Indiens d'Amérique, et caché leurs femmes indigènes sous des robes missionnaires, après leur avoir enseigné la position du même nom, ou des marchands qui portèrent la guerre en Chine pour libéraliser la consommation d'opium..

Et pourtant, derrière Descartes, il y a Galois, qui bouscule toute cette logique pour déclencher une révolution conceptuelle dans le développement de la pensée mathématique jusqu'à nos jours. Révolution souterraine, dont malheureusement peu de philosophes perçoivent l'importance. À ma connaissance (certes très limitée), seul Alain Badiou perçoit l'importance de la théorie des catégories, et des topos...

- Tu te traînes ce matin, lâche le morceau !

- L'idée d'une construction par étapes en [#] conduit à voir la structuration progressive du Sujet à partir des groupes d'homologie ( voir "Les groupes d'homologie du Sujet - au-delà de Descartes").

- Et qu'est-ce que cela ajoute à ce que tu dis ici ?

- Je n'ai pas fini de travailler là-dessus, et c'est encore sur le feu, mais l'idée est celle-ci : il n'est pas sûr que l'on puisse exprimer par ses appartenances# un Sujet "mature" (i.e.: ayant une conscience de lui de niveau [♲]𓁜), à cause précisément de notre aspiration commune à la symétrie, se retrouvant dans une pensée cartésienne de niveau [⚤].

Je peux juste te donner une idée de la chose à partir d'une analogie avec le problème de la recherche des racines d'un polynôme de degré 5 (à l'origine de la théorie galoisienne). (note #4)

- Pour le dire d'un mot : la recherche identitaire libératrice de Corcuff a toutes les chances de tomber sur un os ?

- Ben oui... En un sens la phrase de Natacha Polony

"faisant passer les lois de la République et l'appartenance à la communauté nationale avant leurs convictions religieuses" p. 89

Sonne comme un constat d'échec de la pensée "logique" ou "cartésienne".

- Et donc, tu replies tes gaules ?

- Non, c'est juste pour t'indiquer la profondeur d'un problème qui ne se joue pas comme un match de ping-pong, mais passe par une réflexion de fond.

Pour reprendre l'analogie avec la recherche des racines d'un polynôme, il faut déjà avoir une idée de l'expression en [⚤] (l'équivalent de la définition d'un "groupe de symétrie") de la nécessité d'une symétrie♲ accompagnant l'émergence en [♲] comme la conservation d'un "corps social" stable (l'équivalent d'un "volume" d'eau pour le physicien).

- Ton exigence de symétrie peut s'exprimer simplement comme l'égalité en droit de tous les individus, qui est bien une pensée de niveau ([♲]𓁝⇆𓁜[∅])𓂀, et s'accorde, de plus à l'impératif catégorique de Kant, ainsi qu'au schéma général de maturation du Sujet (voir "Je est un autre"); tout en respectant l'ouverture finale du Sujet sur le Symbolique...

- Partons de là. Il faudrait trouver l'expression générale de cette nécessité, ou principes opératifs en [⚤], comme le droit de s'assembler, de circuler, de penser, de parler, de croire etc...

Mais tu vois déjà que ça coince. Comment légitimer dès lors que l'ensemble des citoyens soit amené, par un processus ou un autre, à financer à Strasbourg une mosquée où sont susceptibles de s'exprimer des "docteurs de la loi" remettant en cause ces principes républicains.

Tu as déjà là une extension religieuse (i.e.: (citoyen⊥croyant)) qui ne peut pas mener à la définition en [♲] de Sujets et d'une société stables (i.e.: principe de conservation), puisqu'il y a une contradiction dans son expression logique en [⚤] de leur définition...

- Tu reviens sur ce que tu as dit et tu es d'accord avec Natacha Polony ?

- Oui et non :

  • Non quant à la croyance des Sujets : [♲]𓁝⇆𓁜[∅], la recherche spirituelle étant inaliénable, et c'est ce qui, à mes yeux, donne tout sont sens au fait d'être "vivant";
  • Oui quant à l'expression de la loi par tous les "docteurs de la loi":  [♲]𓁝⇆𓁜[∅], qui doivent tous respecter le discours ([♲]𓁝⇆𓁜[∅])𓂀, pour permettre à la société d'être, tout simplement...

- Est-ce à ce niveau qu'il faut positionner la "formation discursive" que recherche Corcuff, là où les Japonais situeraient le Ma [間]𓁜 ?

- Absolument. Mais tu vois bien, ce disant, que l'idée très générale de Corcuff d'une recherche identitaire émancipatrice, avec l'idée anarchique d'affranchir l'individu de toute entrave sociale est une utopie.

C'est même un contresens formel, car dans sa montée Imaginaire , le Sujet vise à se "cadrer" un peu plus à chaque palier (i.e.: en restreignant ses groupes d'homologie), pour en arriver à une image de lui cohérente, une et "pleine" ([♲]𓁝⇆𓁜[∅]), avant son éventuel retournement final, d'ordre spirituel ([♲]𓁝⇆𓁜[∅])... (note 5).

- Tu pinailles: Corcuff parle de s'émanciper des tyrannies qui contraignent et maltraitent les individus, des migrants traités comme des marchandises, des femmes battues, ou des homos ostracisés....

- Tu mélanges tout ! Je ne te parle pas de cette lutte nécessaire en [⚤]𓁜, mais de l'idée qu'en multipliant les axes de définition# d'un Sujet, il va vers une sorte d'émancipation, d'une liberté de faire, ou d'être♲ qu'il "veut", comme bouquet final d'un feu d'artifice libertaire. C'est comme une pub, avec une fille à poil faisant des galipettes dans un champ de coquelicots, pour te vendre un parfum de liberté... La liberté de l'individu n'est pas dans cette image, mais dans la quête de son "identité", de sa "conservation".

En ce sens, le type qui se "trouve" est plutôt confit dans le formol, et prêt à te convertir à ses vues, kalach à la main, en résistant vent debout contre tout changement dans la "ligne du parti" !

Vouloir être gay sans entrave n'a rien à voir avec l'ouverture d'esprit. Essaye, juste par curiosité, d'entrer en conversation avec un maître à penser pour échanger des idées! 😀

- Tu renvoies dos à dos tyrans et révolutionnaires...

- Tant que les différents s'expriment par la dialectique, c'est foutu. Une réelle évolution de la pensée politique demande à chacun une réforme de son propre jugement.

- Amen.


Le 31/03/2021 :

- Et si tu en arrivais aux Tropismes manichéens de la "question identitaire" ?

- Pour le dire tout net, Corcuff ne formule pas le problème de façon correcte : la différence de points de vue entre une recherche identitaire émancipatrice et une fermeture autour d'une identité réductrice, oublieuse de la diversité, n'est pas d'ordre "synchronique", mais "diachronique".

- Là je pense qu'il faut être précis pour être compris.

1/ Opposition synchronie / diachronie :

- Le découpage dichotomique entre oui/non ou 0/1 est de niveau Imaginaire [⚤]𓁜, c'est le monde cartésien, celui des Lumières, et nous pouvons même pousser jusqu'à Marx et Engels avec leur dialectique : qui n'est pas avec moi est contre moi et les Bolchéviques font passer les Mencheviks à la trappe de l'histoire...

Mais, nous venons de voir que la différence se joue entre un questionnement ou une recherche en 𓁝[♲] et une réponse qui s'élabore en [♲]𓁜. La réponse en question étant le résultat :

  • Soit d'un processus immanent ↑  : ([#]𓁝⊥𓁜[♲]𓁜⏩[#]𓁝[♲]𓁝⇆𓁜)𓂀;
  • Soit d'un processus⚤ transcendant ↓ : ([♲]𓁝⇆𓁜[∅]⏩[♲]𓁝⇆𓁜[∅])𓂀.

La montée est un processus "ouvert" par nécessité, puisque la réponse n'est pas donnée, quand le second est "fermé" c'est ce que nous venons de discuter.

En conséquence, la dualité est celle des postures 𓁝 et 𓁜 et n'est pas due à une insuffisance conceptuelle !

L'erreur de méthode tient à l'incompréhension du fait que l'expression de cette différence est au niveau [⚤]𓂀 de l'auteur : i.e.: (...⏩...)𓂀. Pour être encore plus explicite, si besoin est : la "montée" ↑ comme la "descente" ↓, se traduisent au niveau [⚤]𓂀 par la succession historique de deux états:

  • ↑ : je me pose une question, et ensuite je trouve une réponse ;
  • ↓ : la réponse est une expression mondaine d'un principe intemporel.

À cette erreur tenant à l'incompréhension de la nature diachronique de l'opposition entre processus "ouvert" et "fermé", s'en ajoute une seconde tenant à l'idée d'émancipation : 

2/ L'émancipation vue comme fin :

La question est : de quoi l'individu voudrait-il "s'émanciper".

- Eh bien, des contraintes sociales qui le déterminent contre sa volonté, ou qui l'empêchent d'être qui il veut, voire d'un manque de reconnaissance en sa singularité.

- Oui, mais jusqu'à quelle limite portent ces revendications ? Nous avons vu assez clairement, il me semble, qu'il doit y avoir, malgré tout, une base commune sur laquelle tous les citoyens d'une même communauté doivent se mettre d'accord, c'est le "contrat social".

Autrement dit, l'individu fait au minimum partie d'une "classe#" donnée. À partir de là, ses autres déterminations doivent être vues comme des "extensions", et l'individu se définit alors comme un produit :

"je suis = (citoyen⊥croyant⊥sexué⊥genré⊥classé...)". 

Mais cette définition en extension est en quelque sorte l'enveloppe# du Sujet, qui sait bien, lui, en son for intérieur qu'il "est". Autrement dit sa conscience d'être, au-delà de cette surface#, tient à un principe de conservation, compris comme un "volume" sous la surface#.

- Où veux-tu en venir ?

- Au fait que l'idée d'une émancipation comme but est un leurre ! Ce ne peut être qu'un objectif tactique, un discours tenu en [⚤]𓂀, et non en [♲]𓂀.

D'un point de vue purement philosophique, je peux même avancer, à titre purement personnel, que l'idée de pouvoir "cerner#" l'essence♲ de ce qui pourrait être "moi" par la détermination de mes multiples "appartenances#" me semble vouée à l'échec; à la limite une pensée schizophrène.

- Le mot est un peu fort !

- Pense à ceci : les classes dont je peux me servir pour me définir, s'imposent à moi, avant que je les revendique ou m'y oppose. Le "Noir", n'est tel que dans une société de "Blancs", la question ne se posait pas en Afrique, avant l'arrivée des premiers Portugais. De même que ma sexualité ne pose problème qu'au regard des autres, etc... Or, donc, se voir comme au centre d'un caléïdoscope renvoyant en tous sens des reflets de mon être, est à proprement parlé une vision schizophrénique.

Le problème, et nous en avons discuté hier, c'est qu'il n'y a aucune chance de pouvoir accéder à cet "être" en [♲]𓁜, par une démarche même infinie d'addition d'extensions# à la classe# élémentaire de citoyen (retour à Galois...). Le gap à franchir (𓁝[♲]𓁜⏩𓁝[♲]𓁜) est techniquement hors de tout processus purement immanent ↑, et la conscience de soi demande une transcendance ↓.

- Quid du cogito cartésein ?

- Nous en avons déjà discuté : la conscience est ici dans un aller-retour ⇅ entre [∃] et [⚤]. Il n'y a pas de "monté" pure. La "prise de conscience" est dans la rencontre entre ces deux mouvements antagonistes (passant chez Descarte par le sacrifice de dieu). Nous l'avons  caractérisé au niveau du cogito en [⚤], nous l'avons également en [#] avec le stade du miroir, et nous le retrouvons ici en [♲].

Et cette "montée" imaginaire n'a pas pour objet une dispersion de l'être dans une foultitide indéfinie de "catégories#" où d'axes de définitions permettant de cerner sa propre personnalité, mais bel et bien de se refermer sur le sentiment d'être, comme principe de conservation en [♲]. L'ouverture essentielle du Sujet se faisant par rapport au Symbolique, dans le retournement final ([♲]𓁝⇆𓁜[∅]⏩[♲]𓁝⇆𓁜[∅]).

En résumé :

  • Le "Moi", si le Sujet arrive à l'exprimer, est au mieux fermé [♲]𓁝⇆𓁜[∅];
  • Le "Sujet" reste ouvert sur le Symbolique 𓁝⇆𓁜[∅].

- Tu nous répètes ce que tu avais déjà dit hier...

- Désolé de ruminer ainsi, mais j'ai l'impression que c'est important.

- Tant que cela ?

- Il y a des liens entre le combat politique et l'implication psychologique des acteurs.

Nous avions déjà pointé que la soumission des dominés au dominants peut être parfois une façon de ne pas se poser de question existentielle. Cela évite les angoisses de l'échec répétitif d'une quète 𓁝 sans fin (i.e.: conduisant à la névrose).

Réciproquement, le besoin de dominer 𓁜 peut être un remède à sa propre quète 𓁝, dont le ressort serait : "j'existe, puisqu'ils m'acceptent".

L'aveuglement même, que l'on voit trop bien chez nos dirigeants, totalement coupés de la réalité, et prenant des décisions hors sol, peut découler de la volonté de ne jamais être en position 𓁝, ouverte et incertaine. La rigidité pouvant être le symptôme d'une attitude psychotique 𓁜.

Et, pour en finir avec cette recherche d'émancipation, je me donne de quoi cette idée d'une "émancipation en soi" pourrait-être le signe ?

- Je ne comprends pas ?

- Si j'étais Noir, je voudrais m'émanciper du regard du Blanc, si j'étais lesbienne, je voudrais m'émanciper de la domination du mâle et me battre pour la reconnaîssance sociale de ma sexualité, mais qui revendique l'émancipation "en soi", comme but de son existence et de ses pensées ?

- Par principe, pour ne jamais être enfermé dans quelque assignation catégorique imposée... 

- Mais alors, ce n'est plus de l'ordre du combat politique pour quelque chose, mais bien de la rébellion contre quelqu'un, comme l'ado contre l'autorité parentale. Et nous ne sommes plus dans le discours politique, mais dans un processus initiatique où l'accession au nouvel  état passe par la mort de l'ancien.  L'idée n'est plus d'améliorer son sort dans une progression historique, par une suite d'actions sous forme d'un programme politique, mais de faire table rase de l'ordre ancien, en passant par un état révolutionnaire.

Arrivé à ce constat, ce qui me gène alors, c'est que Corcuff ne le revendique pas. Il ne peut pas afficher sa volonté d'une totale "émancipation" et  dans le même temps nous présenter ça comme découlant d'un jeu au sein d'une formation discursive partagée ! Là, il y a, soit de l'enfumage, soit de l'aveuglement !

- Pourquoi parles-tu d'enfumage ?

- Parce que l'articulation de son discours a la structure d'une arnaque dont nous avons discuté il y a fort longtemps : celle da la "proposition inacceptable" (voir "psychanalyse, arnaque et méditation").

L'idée est la suivante : un Sujet (1) veut amener en un Autre (2) a accepter de faire quelque chose, disons une action de niveau [α]𓁜2, alors qu'il s'y refuserait consciemment.

La tactique de 𓁜1 consiste alors à touver un terrain d'entente [β] sur lequel tous deux puissent se reconnaître comme "frères". C'est la tirade de Shylock dans "le Marchand de venise ":

"Si vous nous piquez, ne saignons-nous pas
Si vous nous chatouillez, ne rions-nous pas ?
Si vous nous empoisonnez, ne mourons-nous pas ?
Et si vous nous faites du mal, ne nous vengerons-nous pas ?"

Autrement dit, 𓁜1 cherche un accord dans un discours de niveau [♲] : ([β]𓁜2⇆[β]𓁜1)⇆𓂀1 (ici il s'agit de faire accepter une même formation discursive) jusqu'à ce que l'Autre accepte ce point de vue : ([β]𓁜1⇆[β]𓁜2)⇆𓂀2, pour en induire (grâce à la boussole) les mêmes conséquences que 𓂀1 : ([β]𓁜⏩[α]𓁜2)⇅𓂀2.

- C'est une argumentation tout à fait acceptable : on se met d'accord sur les principes pour en faire découler une ligne d'action...

- Sauf que cette idée "d'émancipation en soi" n'est pas discutable au yeux de Corcuff... Et qu'il se retrouve exactement dans la position de ceux qu'il dénonce...

- Paradoxe de Russel ?

- Oui, on en revient toujours là, d'une façon ou d'une autre, en se limitant à une pensée purement logique et ensembliste en [⚤]𓁜. 

- Et si l'on parlait plutôt d'ouverture en référence à la position ex ante 𓁝, et non comme opposition (dialectique) à quelque chose ou quelqu'un ?

- Ce serait déjà plus simple. Mais tu as l'air de trouver que je pinaille, ce que je conteste. La mise au point me semble nécessaire, lorsqu'en particulier Corcuff récuse les propos de Dupin, pour qui cette question identitaire n'est pas évitable :

"... Comme si la question identitaire n'était pas qu'une des façons manichéennes de problématiser politiquement le réel, en découpant d'une certaine manière dans les expériences et les imaginaires contemporains, en rassemblant des éléments et en les séparant d'autres... "

  • D'une part il limite explicitement la pensée à des "manipulations sur des éléments", c'est-à-dire des "ensembles" au sens le plus terre à terre des mathématiques, en [⚤]𓁜; (il parle ici de la logique des "autres", mais il ne nous montre guère une pensée qui s'en détacherait...)
  • D'autre part, il porte un jugement de valeur sans expliciter ses critères de jugement, avec une sorte de clin d'oeil à l'assistance "comme si ... n'était pas...", un rien désagréable, pour ne pas dire plus...

Non, je crois sincèrement que Corcuff a lui-même sur la question une réelle position manichéenne : "la question identitaire ne se pose pas, et ceux qui la posent ont tort, rompez" ! 

Si Corcuff ouvre le débat de cette façon, c'est pas gagné ! 


Le 01/04/2021 :

Risques "postfascistes" et dynamiques ultraconservatrices :

"Postfascistes"

Je  m'arrête juste sur la définition du "postfasciste" selon Corcuff pour tenter d'en caractériser la mécanique Imaginaire :

"Le nationalisme, la xénophobie, la conception homogène du "peuple", la place donnée au chef ou les accents autoritaires demeurent prégnants. Cependant, parmi les déplacements les plus importants de secteurs significatifs de l'extrême droite actuelle par rapport à celle des années 1920-1940, on doit noter l'appropriation rhétorique d'idiomes et de thèmes républicains (comme "République", "souveraineté populaire", fusionnée avec "souveraineté nationale", "liberté", "égalité", "laïcité", etc.) alors que les fascismes historiques étaient largement antirépublicains." p. 104

Je note en premier la place du chef, indiscutée au RN; en pensant à Mégret qui, tout X qu'il soit, doit s'en souvenir.

Son erreur était de taille : il pensait pouvoir prendre la place du "docteur de la loi" en croyant que Le Pen était simplement là comme "dirigeant du parti", et qu'il lui suffisait de montrer une supériorité de gestionnaire ! Comme si le bedeau pouvait dire la messe... Tu auras compris que, par analogie avec ma petite visite chez VRA, Le Pen est dans la position du "Blanc" (il ne refuserais pas) en 𓁜0, qui a tout intérêt à en dire le moins possible (sa fille le confirmerais), quand Mégret, et d'autres après lui, étaient en position 𓁝1[♲]𓁜0. Il pouvait, certes, dire le droit aux abonnés (non pas au gaz mais au FN) au nom de le Pen dans un retournement [#]𓁝1⊥𓁜[♲]⏩[#]𓁝⊥𓁜1[♲], mais en aucun cas prendre "sa place".

- Tu t'amuses à rabâcher...

- C'est pédagogique, et puis, oui ça m'amuse un peu de voir nos politiques l'être aussi peu... Un Africain ne s'y serait pas trompé ! 

Plus sérieusement : nous avons vu en introduction l'économie pour tout le monde de s'en référer à un "docteur de la loi" plutôt que d'essayer de la faire sienne. Cela peut palier, en particulier, une absence de référence éthique ou idéologique ! 

- Peux-tu préciser ?

- Si un individu quelconque arrive à être vu et légitimé par ses fidèles dans la position de "docteur de la loi", alors la doctrine elle-même cesse d'être le référent. La différence entre une secte et une foi partagée, c'est que dans la secte, le gourou est en postion ex post [♲]𓁜 tandis que lorsqu'il y a "communion", tous le membres du groupe concerné se retrouvent en [♲]𓁝⇆𓁜[∅]. Écoute Saint Augustin, par exemple :

"...tout ce que j'avais à faire, c'était d'ouvrir le livre et de lire le premier chapitre sur lequel mon regard tomberait." Augustin ouvre le livre de saint Paul qu'il a sous la main et lit au hasard:..." (voir ici).

Comme tu le vois, il n'a rien du gourou...

- D'accord, mais alors, pourquoi choisir des thèmes xénophobes et nationalistes ?

- Si je ne sais pas m'affirmer en [♲]𓁜, faute d'ouverture spirituelle 𓁝[∅], à tout le moins puis-je me définir par mes appartenances en [#]𓁜. La démarche se caractérise par le désir de fermeture, comme on érige une clôture autour d'un paturage. À mon sens, cela vient de la peur de l'ouverture à l'inconnu, et le ressort de cette recherche politique est d'ordre psychologique avant tout. (note # 7)

Imagine le décalage entre un Lepéniste se claquemurant dans son appartenance à la race supérieure, à la nation choisie d'entre les nations, pour se cacher d'un vide intérieur proprement angoissant, et le bouddhiste faisant tous ses efforts pour ce dépouiller à l'extrême de ses oripaux culturels dans l'espoir d'être assez détaché de tout pour disparaître en rencontrant sa vacuité essentielle...

Par ailleurs, lorsque Corcuff parle de "conception homogène du peuple", je traduis par "une ensemble composé d'éléments semblables"; autrement dit, une pensée conditionnée au niveau [⚤]𓁜 concernant l'individu : il n'a pas de figure parentale à laquelle s'opposer, il n'a pas l'expérience du miroir, Freud n'existe pas (d'ailleurs il en Juif...), nous avons juste des "individus" rangés sur une étagère comme des soldats de plomb pour habiller les fantasmes d'un gourou.

Les classements xénophobes et nationalistes sont dichotomiques : "ami/ennemi", et s'articulent donc en [⚤]𓁜, dans un langage ensembliste élémentaire.

- Soit, mais il y a quand même cette rencontre avec des termes républicains...

- Parce qu'il y a un point de convergence, et nous en avons discuté ici: la République est basée sur l'acceptation d'un "contrat social" qui est le "groupe de départ" à partir duquel peuvent s'articuler tous les autres axes par lesquels un citoyen peut se définir : un LGBT en France doit être (citoyen⊥LGBT), un musulman sera (citoyen⊥mulsulman), et même, si ça lui chante (citoyen⊥musulman⊥LGBT), mais à la base, tu retrouves toujours cette appartenance commune à une citoyenneté découlant de l'acceptation d'un contrat social permettant de vivre en commun.

La récupération est d'autant plus facile en [♲]𓁜 que difficile à contrer en [⚤]𓁜 où se situe la réplique "dialectique" à une démarche qui ne l'est pas...

Ultraconservatisme plutôt que "populiste"

Corcuff nous invite à éviter le terme de "populiste", soit, je me range à ses raisons, par contre il ne définit pas "l'ultraconservatisme"... 

Brouillard idéologique, confusionniste et extrême droitisation

Si je comprends bien, le "confusianiste sera la frontière floue entre "droite" et "gauche", non pas par une sorte de raccordement par l'extérieur, comme un ruban de Moébius, mais par un passage graduelle au centre.

"Ce qui produirait les figures hybrides du "réactionnaire progressiste (lorsqu'il vient plutôt de droite)" et du "progressiste réactionnaire (lorsqu'il vient plutôt de gauche)"". p. 109

Cet espace confusioniste serait caractérisé par la "critique", de tout : médias, establishment, Europe, mondialisme, "politiquement correct, (anti-racisme, féminisme, lutte contre l'homophobie peuvent être visées), Corcuff parle:

"d'un hypercriticisme, suractif, qui court dans tous les sens, mais où l'analyse des contraintes structurelles générées par les raccords sociaux tend à être remplacée par celle de l'action d'intentions individuelles ou collectives malfaisantes. Les appuis émancipateurs de la critique sociale moderne, tendent, parallèlement à s'estomper". p. 110

J'aurais tendence à voir cette phase "d'hypercriticisme" comme une crise d'ado chez ceux qui veulent passer d'une recherche d'identité 𓁝[♲] à l'affirmation de soi en [♲]𓁜, retrouvant ainsi la posture déjà commentée de "docteur de la loi". Bein entendu, ce passage passe par le sacrifice de tout ce qui constitue aux yeux de 𓁝 ce qu'il perçoit ex ante comme s'imposant à lui, en [♲] et forme le "politiquement correct".

C'est dire aussi que ce type de personnage, n'a pas de doctrine à proposer, puisqu'il est personnellement en recherche d'identité... D'où la disparition de la critique sociale telle que le PC pouvait naguère la porter...

La remarque importante de Corcuff est la suivante: la compétition entre candidats pour être le premier à accéder à la place [♲]𓁜, à l'égal de Marine le Pen, voire en capacité de la détrôner, conduit à les voir tous équivalents...

Pire encore : en acceptant leur rôle de chalengeurs, ils légitiment la place évidente de maîtresse du jeu de Marine Le Pen...

Cerise sur le gâteau, à cette "place du Blanc" qui est la sienne, le moins elle en dit le mieux elle se porte, puisque toutes les agitations des prétendants ne font que valoriser la place qu'elle occupe effectivement, quand ils ne font qu'y aspirer...

Dans ces conditions, la droitisation du discours politique ne doit pas étonner, puisque tous galèrent à détrôner la prêtresse du RN !

"Ni l'extrême droitisation en cours, ni le confusianisme qui contribue à la nourrir ne constituent des réalités unifiées et conscientes d'elles-mêmes, qui seraient mûes pas une seule volonté allant dans une direction unique." p. 111

C'est l'évidence même, puisque cette évolution est la conséquence du positionnement relatif des acteurs en présence. 

Concernant l'impression de "synchronisation" que Corcuff tire de Bourdieu dans son analyse des crises, ou de cohérence du procesus tirée de Foucault j'ai plutôt l'impression que le RN se distingue comme une sorte de rocher, quand la campagne autour, se désagrège. Depuis la faillite de l'URSS, la PC n'a plus de doctrine, et la gauche socialiste s'est dissoute dans l'exercice du pouvoir. Quand à la droite, elle se disperse comme le vinaigre dans l'huile, de par sa nature même... Je pousserai même le raisonnement jusqu'à dire que le RN tire sa stabilité de ne pas chercher de justification logique, puisqu'il suffit aux membres de s'en remettre au "docteur de la loi".

D'ailleurs Corcuff en vient de lui-même à la conclusion que l'émergence des configurations qu'il décrit (i.e.: celle de 1930 et celle où nous sommes) tient plus "aux formes prises par les dynamiques idéologiques que par leurs contenus" . 113 

... Plus j'avance dans ma lecture, plus je me demande : pourquoi aucune référence à Slavoj Žižek ???

De la métaphore de l'aimantation et de sa reformulation sous un angle tactique :

Corcuff, avec Michel Dobry semble avoir redécouvert l'eau tiède ou la "réinsertion, dans l'analyse et dans l'explication, de l'activité tactique des acteurs". p. 114. Pensée un peu molle du genou me semble-t-il, je dirais que l'on doit prendre en compte l'ensemble de l'activité Imaginaire du Sujet [∃]𓁝⇅𓁜[⚤]𓁝⇅𓁜[#]𓁝⊥𓁜[♲]𓁝⇆𓁜[∅]𓂀 ! Et là encore, je me demande où est passé  Žižek, voire, plus banalement: Sun Tzu ?

Thomas Schelling et les points focaux

Corcuff en tient pour sa "tactique", autrement dit, d'entrée de jeu il se limite à [⚤]𓁜, soit, suivons-le à la trace.

"Ainsi pour Schellig, la stabilisation de "foyers de convergence" (ou points focaux)  dans la coordination tacite des anticipations d'acteurs diversifiés, voire opposés, associe "conflit" et "dépendance mutuelle" dans un processus dynamique d'ajustement réciproque". p. 115

La belle découverte ! J'en dis plus en situant Marine Le Pen en position [♲]𓁜 au sein de son parti, quand ses adversaires sont dans les leurs en position 𓁝[♲], non ? Quant :

  • aux "conflits", c'est l'expression rationnelle logique [⚤]𓁜 que chacun donne de cette situation;
  • à la "dépendance mutuelle#", on en a déjà fait l'analyse à partir des "appartenances#" de chacun en  [#]𓁜...
  • au "pocessus dynamique", c'est l'objet même de cet article !

Corcuff cherche à définir son "aimant" comme ce qui focaliserait le discours politique vers les "points focaux"... Il tente de créer un lien synchronique, là où la dynamique est essentiellement diachronique... 

- Je suis largué.

- Il n'y a pas de "coordination tacite" des acteurs, mais une contrainte due à l'articulation du discours au niveau de la "dispute", à savoir au niveau logique de l'échange en [⚤]. Or, nous avons vu que ceci nécessite d'isoler les composantes# d'un individu se définissant par ses appartenances#, afin d'y retrouver la notion d'ordre liée au discours logique et ensembliste. Les discussions portent sur chacuns des groupes# qui s'expriment en termes d'ouverture et de fermeture. (note 7)

Exemple : Pour le genre# (homme/femme/ etc.). Comment la doctrine en [♲]𓁜 se traduit-elle en [⚤]𓁜 ? Tu vois bien que chacun vas y aller de son couplet, mais personne ne peut échapper à la nécessité d'échanger sur le thème puisqu'il s'agit d'une question d'appartenance de niveau [#]𓁜 ! La seule question réellement confuse sera la discussion sur la citoyenneté, puisque c'est le groupe de départ en République (le pôle Nord de la boussole de Corcuff).

Cet "aimant" de Corcuff, c'est un peu la "main cachante" d'Adam Smith, ou la recherche de "variables cachées" par Einstein en mécanique quantique : elle tombe du ciel!

 

Suspension pour cause d'apéro...

Hari

[∃]𓁝⇅𓁜[⚤]𓁝⇅𓁜[#]𓁝⊥𓁜[♲]𓁝⇆𓁜[∅]𓂀

↑↓ ∞ π

Note 0 :

J'ai oublié de citer Frantz Fanon, qui traite merveilleusement du rapport colonisateur/ colonisé, par exemple dans "Peau noire, masques blanc". Il y aurait tellement à en dire ! Notons simplement ici qu'il était psychiatre, d'où une certaine proximité  avec notre démarche, empruntant à Freud et Lacan...

Note 1 :

Je vais essayer de ne pas parler mathématiques, mais considère ceci :

  • Le 1er  passage de [⚤]𓁝↑𓁜[#] permet de passer du discret (les nombres entiers N) au continu (les nombres Réels R), en même temps qu'il permet d'imaginer les positions locale 𓁝 / globale 𓁜 du Sujet, propres à la géométrie, sans oublier la fermeture Imaginaire avec le point à l'infini ∞.
  • Les suivants (ou répétition) vont additionner des dimensions orthogonales à R, par exemple R2 (surface), R3 (volume) etc...

Le point important étant que la notion d'ordre (i.e.: 2>1) propre au niveau [⚤] est conservée lors du 1er saut (i.e.: π>2/3) mais disparaît ensuite: sur un plan (x; y) en R2, je ne peux pas dire que le point (3; 6) est "supérieur" au point (5; 7).

Pour réintroduire un "ordre", il faut monter en [♲] avec la notion de "norme", l'équivalent d'une "loi".

Note 2 :

Je ne peux pas ici reprendre tout ce que j'ai pu en dire au long de ce blog. Pour les plus curieux d'entre vous, voirici le dernier article en date : "Émergence du Sujet : de la pensée mythique à Emmy Noether".

Pour le dire d'un mot :

  • si l'on distingue deux concepts au niveau [α]𓁜 (par exemple temps# et espace# comme orthogoanux en [#])
  • et que l'on considère une invariance (ou symétrieβ) d'un "objet" de niveau supérieur [β]𓁜 composé à partir de ces deux conceptsα (comme le "mouvement" à partir du temps# et de l'espace#),
  • alors, il y a une quantité conservée correspondant aux symétries en question (ici la vitesse ou la quantité de mouvement).
  • Le passage [α]↑[β] est marqué par une certaine indétermination (dans notre exemple  [#]↑[♲] il s'agit du principe d'incertitude d'Heisenberg).

Note 3 :

Ça m'a tellement énervé que je suis sorti prendre un peu l'air du côté de Royan et Talmont. Je me suis demandé si Corcuff ne citait pas le maximum de noms dans son livre, pour être tout simplement cité en retour pas ceux qu'il épingle. Un échange de politesses entre universitaires, qui ramènerait sa recherche d'une "formation discursive" à une discussion autour d'un café à la terrasse du Flore !

Puis je me suis calmé en lisant la bio de Kaufmann

"Spécialiste de la vie quotidienne, et pionnier de la microsociologie, il a ensuite replacé ses premières analyses dans la problématique plus large de l'identité, qu'il a de ce fait contribué à renouveler. Il travaille aussi, dans le cadre général de ses recherches au CNRS, sur la socialisation et la subjectivité."  (Wikipedia)

J'en déduis qu'il s'intéresse à l'homme dans son environnement Occidental actuel, au pied de son immeuble. Bon, soit, mais quand même, le concept d'individu n'est pas intangible ! Il suffit de lire un peu Lévi-Strauss ou Foucault pour en avoir une vague notion.

- Mais qu'est-ce qui te chiffonne finalement ?

- Tu ne peux rien y comprendre si tu n'as pas intégré l'importance de la révolution cartésienne, avant même les Lumières auxquelles Corcuff n'arrête de se référer sans les définir. 

Je te la fais très courte ici, parce que je rabâche toujours les mêmes choses (pour les détails voir sur le blog, en remontant les liens à partir de l'article "Le Sujet, être de parole et au-delà") :

1/ Sur l'individu :

  • Avant Descartes, en Europe, comme hors d'Europe, le Sujet se définit pas ses appartenances et non comme individu, dans une démarche transcendante à partir du Symbolique 𓁝 (pour faire court : l'homme est "à l'image" de Dieu)...
  • Après Descartes, et seulement en Europe au départ, l'Homme se définit de façon immanente à partir du Réel 𓁜.

Pour les détails sur cette révolution voir "Le cogito Cartésien", même si l'article date un peu, mais c'est repris dans l'article cité précédemment.

Avant Descartes, la pensée est essentiellement située dans cette partie de l'Imaginaire : [⚤]𓁝⇅𓁜[#]𓁝⊥𓁜[♲]𓁝⇆𓁜[∅]. Nous avions depuis des temps immémoriaux une pensée mythique qui ne varie pratiquement pas jusqu'à cette révolution cartésienne : voir

Descartes se limite à cette partie Imaginaire : [∃]𓁝⇅𓁜[⚤]𓁝⇅𓁜; en tuant Dieu.

2/ Sur la définition du Sujet :

Avant Descartes en Occident, comme hors de l'Occident actuellement, le Sujet se définit par ses appartenances !

C'est encore vrai majoritairement dans le Monde hors des pays Occidentaux dérivant de cette expérience Européenne...

C'est vrai en Inde avec les castes, en Afrique (j'en parle dans le texte), mais également au Japon (nous venons de le voir avec les concepts de Aïda et Ma), et je parie que c'est pareil en Chine, pour des raisons liées comme au Japon, à l'apprentissage du langage écrit, et de façon générale partout où la religion est omniprésente, comme au Moyen Orient...

Donc, dire que l'individu a des problèmes d'identité dans les pays Occidentaux, c'est vraiment penser que l'on est à la plage en prenant son bain de pieds dans un bidet !

Note 4 :

 Le fil du développement est celui-ci :

1/ Pour trouver les racines d'un pôlynome sur un corps K de départ, Galois considère les symétries entre les racines qu'il recherche.

2/ Il procède étape par étape en adjoignant à ce corps K, une "extension", qui lui est "orthogonale" ou "distinguée" (par exemple α), et les racines vont s'exprimer sur cette "surface" (i.e.: (K;α)).

3/ À chaque étape de la procédure, le groupe de symétries auquel est soumis l'ensemble des racines cherchées, est un sous-groupe de celui défini à l'étape précédente.

Et c'est là que ça coince pour les polynômes de degrés 5 : à partir d'un certain seuil, on tombe sur le groupe "A5", qui n'a pas de sous-groupe... Ce qui indique que l'on ne peut pas trouver l'extension suivante pour se rapprocher des racines à l'aide d'une approche "par radicaux".

La métaphore avec la représentation d'un Sujet me semble assez explicite : les différents axes grâce auxquels se définit un Sujet, sont comme les extensions galoisiennes#. Le besoin de symétrie se traduit en [⚤] par une notion de "regroupement" structuré des individus.

La leçon à tirer des mathématiques, c'est que cette réduction des Sujets à une représentation "logique" ou "cartésienne" à partir d'une "catégorisation#" selon  différentes compsantes# indépendantes entre elles (religion⊥ sexe⊥ race⊥ classe....) peut se heurter à une impossibilité d'ordre théorique.

Note 5 :

Cette "fermeture" progressive de l'Imaginaire se repère assez bien en mathématiques.

Par exemple : N est indéfini, mais l'on "ferme" R par le point ∞ à l'infini. Par ailleurs, en passant de R à R2, ou C, Poincaré a été surpris de comprendre que C est "naturellement" un espace hyperbolique.

En physique également, l'esprit se construit en opérant des "fermetures", comme la vitesse limite de la lumière...

Note 6 :

Par hasard, je tombe ce matin sur les taux de suicide par pays.

Dans les "pays pauvres" et pas particulièrement dans la joie et l'allégresse d'une société libérée des problèmes de survie pour nager dans la démocratie, je note les taux de suicide (pour 100.000 habitants) suivants :

Niger : 4,6
Irak : 3
Pakistan : 2,9
Liban : 3,3
Madagascar : 3,9
Mali : 4,8
Turquie : 7,1

Que je compare à ceux de nos régions éclairées par les Lumières et des régimes qui se donnent en exemple : 

Allemagne : 13,6
France : 17,7
Suisse : 17,2 (La Suisse !)
Où la Côte d'Ivoire avec 14,5 pose question.

À mon humble avis, c'est lié à un "mal-être" d'ordre psychologique et non à la pauvreté et/ ou la subordination à un régime contraignant, voire dictatorial...

Note 7 :

Pour creuser la différence entre "ouvert" et "fermé", il conviendrait, comme toujours en philosophie, d'en  revenir aux définitions mathématiques ! Ici, en l'occurrence aux différentes façons de définir un "espace topologique#" (i.e.: des objets de niveau [#])

Voir : "Le point #8 Logique-topologie".

À la relecture de l'article, je me rends compte toutefois qu'il faudrait le reprendre car je n'ai type discours de [⚤]𓂀, qu'il faudrait compléter des deux autres [#]𓂀 et [♲]𓂀 pour être satisfaisant. Je le note ici pour y revenir, sinon je n'en finirais jamais de ce chaptitre 1 de Corcuff !

 

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