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Sur les traces de Lévi-Strauss, Lacan et Foucault, filant comme le sable au vent marin...

L'Homme quantique

Récoltes et semailles # 11 Les portes sur l'Univers #5


Les portes sur l'univers
(appendice à "La clef du Yin et du Yang")

  1. Le roc et le sable
  2. Choses polyandres et choses polygames
  3. L'ambiguïté créatrice (1) paires, ribambelles et rondes
  4. L'ambiguïté créatrice (2) Le renversement des rôles
  5. L'ambiguïté créatrice (3) la partie contient le tout
  6. L'ambiguïté créatrice (4) les extrêmes se touchent
  7. Mes perplexités "contenant-contenu et "le lourd-le léger"
  8. La quête de l'unité
  9. Généralité et abstraction — ou le prix à payer
  10. Histoire d'icosaèdre et d'arbres de Noël
  11. Désir et nécessité — ou la voie et la fin
  12. Précision et généralité — ou la surface des choses
  13. L'harmonie — ou les épousailles de l'ordre et du mystère
  14. Le caractériel et le caractéristique  — ou l'accordéon cosmique
  15. Découverte ou invention ? - ou le scribe et l'autre"
  16. La fleur et son mouvement — ou : plus je m'éloigne, plus je m'approche
  17. Chaos et liberté — ou les soeurs terribles
  18. Le vague et le précis — ou l'épuisette et la mer
  19. Ordre et structure — ou l'esprit de précision
  20. L'abstrait et le concret (1) : naissance de la pensée
  21. L'abstrait et le concret (2) : le miracle de la simplicité
  22. L'abstrait et le concret (3) : les strates du langage — ou la peau et l'étreinte
  23. Abstraction et sens — ou le miracle de la communication
  24. La langue des images — ou le chemin du retour
  25. Les portes de l'Univers :
    • A) Portes et trous de serrure (répertoire)
    • B) L'Arbre
    • C) La fenêtre
    • D) Le biicosaèdre

Le 29/ 01/ 2024 : (suite du #10)

18/ Le vague et le précis — ou l'épuisette et la mer

- A.G. continue de passer en revue les couples qu'il a classés dans ses "attracteurs Yang", au second rang. (voir en 11/). Il s'agit des qualités :

Abstraction, Précision, Structure

Au risque de te paraître pinailleur, je trouve que définir la "précision" comme:

"Le moyen par excellence pour accéder au "simple", c'est-à-dire aussi, pour appréhender et pour cerner l'ordre, se dérobant derrière le déroutant chaos des apparences" p. 1227 (en gras dans le texte)

reste paradoxalement très vague.

- Tu plaisantes ?

- Non pas. Je constate seulement que son point de vue n'a pas la généralité qu'il lui prête. Décale-toi un peu, et, faisant fi du peu de goût —c'est un euphémisme— de A.G. pour la physique, parlons-en :

  1. En physique, on ne peut parler de "précision" que par rapport à un mètre étalon, et non de façon "absolue". Par exemple, en reprenant l'exemple de Mandelbrot : quelle est la longueur de la côte de Bretagne? Cela dépend essentiellement du moyen de mesure adopté. (voir ici)
  2. L'avancée en sciences n'est pas linéaire, et si la précision de la mesure amène de nouvelles questions, ce n'est pas cette activité qui apporte les réponses, mais bien souvent une rupture épistémologique. Quelques exemples :
    • La catastrophe ultraviolette :
      • les mesures indiquent que l'émission d'un corps noir ne correspond pas à la valeur attendue (infinie).
      • réponse : la théorie des quanta par Planck en 1900;
    • La relativité :
      • La société des chemins de fer Suisse cherche à améliorer la synchronisation des horloges du réseau.
      • réponse : la relativité restreinte d'Einstein en 1905
  3. En physique toujours, le "moyen pour aller au simple"
    • renvoie au principe de "moindre action" de Maupertuis, qu'il introduit ainsi : "voici ce principe, si sage, si digne de l’Être suprême: lorsqu’il arrive quelque changement dans la Nature, la quantité d’Action employée pour ce changement est toujours la plus petite qu’il soit possible." en 1744.
    • renvoie à un sens esthétique, c'est ce que revendiquait Dirac, c'est également la recherche d'une solution "élégante" à un problème mathématique.
  4. En parlant de précision, nous sommes dans la "mesure", donc au niveau 𓁝[♻], en parlant d'ordre, nous sommes au niveau [⚤], A.G. nous parle donc de la recherche scientifique comme d'un effort pour passer de [♻][⚤]. Nous venons d'en parler en détail dans "Bouclage de la quantité sur les nombres".  Cela implique en particulier de réduire une question à une seule dimension, afin de
    • "mesurer"
    • "ordonner".

Dans l'affaire, je trouve que A.G. n'accorde pas à la précision sa juste place dans la démarche scientifique :

  1. Oui, elle est indispensable et ouvre à des questions. C'est par exemple Ticho Brahe qui passant sa vie à suivre la course des étoiles, offre la matière première aux calculs de Képler, calculs qui ensuite serviront de base à la théorie de Newton. Ensuite, les écarts entre calcul théorique et mesure de l'orbite de Mercure serviront de test à la théorie de la Relativité d'Einstein.
  2. Mais la précision est surtout féconde dans le développement d'une démarche scientifique, lorsqu'elle révèle une faille dans la théorie qui a conduit à la mesure en question. Par exemple, c'est en mesurant la vitesse de la lumière que l'on a découvert une faille dans la théorie de l'éther de Newton.

Comme tu le vois, c'est la deuxième fois que son mépris pour la physique lui joue des tours : ici il oublie le principe de moindre action, et précédemment (voir 11/) il était passé à côté du principe entropique à cause de sa phobie du chaos.

- OK pour ses précisions, j'ai compris que A.G. n'est pas physicien et nous parle seulement de son appréhension des maths; et si tu passais à la suite ?

- Effectivement : il nous parle de sa façon d'avancer en mathématiques :

"Ce moyen «précision» est mis en œuvre par la dynamique du «va-et-vient», du «double-mouvement-en-un», qui nous est désormais familière. Au commencement, la pensée se trouve confrontée «au vague» (alias «le flou»), à la substance inconnue (ou plus ou moins connue) qu'il s'agit de connaître (ou de mieux connaître). Le «travail» de prise de connaissance se manifeste alors comme une «décantation» du «précisément formulable», se séparant laborieusement de l'informe, et saisi aussitôt (comme par des mains agiles...) par la pensée, au moyen du langage. Et celui-ci se transforme et se recrée en même temps, comme des doigts nouveaux qui nous pousseraient, sous la poussée sans réplique des besoins." p. 1227 (en gras dans le texte)

Je trouve intéressant qu'il utilise le terme de "substance", qui, associé au travail des mains agiles, me renvoie à cette vieille métaphore des idées qui s'impriment dans la "substance" comme un sceau marque la cire.

- Ça tourne encore autour de Platon, et cette "décantation" me fait penser à l'oeuvre au blanc des alchimistes.

- Oui, quoi qu'il y ait ce "double mouvement" d'une croissance duale Yin/ Yang... 

- N'est-il pas en train de décrire le mouvement [♻]𓁜précis𓁝vague[∅]?

- Nous avons également celui-ci, dans une démarche purement immanente : ([#]𓁜⊥𓁝[♻]𓁜)(𓁝[♻]𓁜), où l'on passe de la surface de l'objet à sa "substance";

- Voire, pour en revenir au bouclage de la quantité sur les nombres:  [♻]→↑[⚤], (voir ici)

- Tous ces processus que tu décris marquent, chacun à sa manière un saut, une coupure, une rupture, que l'on ne retrouve pas dans le processus de décantation décrit par A.G.

- C'est le point aveugle découlant de son idée de départ d'un "équilibrage" entre Yin et Yang. Cela découle d'un emprunt conceptuel à la médecine Chinoise, dans une approche "bagua du ciel antérieur" (voir de Fuxi à Grothendieck) : il ne conceptualise pas les ruptures ou passages, qui pourtant sont omniprésents dans YinYang.

- Il parle bien de ce double mouvement YinYang, non ?

- Mais il fait tout pour le "lisser", en parlant de la "prise de conscience  [...] se séparant laborieusement de l'informe" comme d'une transformation continue. Non, la prise de conscience est par nature un choc, une rencontre. La pensée est un moteur à explosion, et non un ventilateur. Le rapport de l'Imaginaire au Réel commence sur le mode traumatique, et là je reste résolument dans les pas de Lacan, pour retrouver les quanta, jusque dans le fonctionnement de notre langue (synchronie/ diachronie), et de notre cerveau (voir "Les neurones de la lecture").

J'ai peur, à cette lecture, que lorsque A.G. parle du topos comme étant le "lit commun du discret et du continu", le dernier mot, pour A.G. reste au continu, quand en physique, il reste au discret.

- Il y a malgré tout, au terme de ce travail de décantation, création d'un "nouveau langage", et une évolution qui passe par l'oubli de l'ancienne façon de parler au profit d'une nouvelle...

- Mouais, nous verrons à l'usage ce qu'il en advient. Je retiens simplement que le "vague" se réfère à la posture 𓁝, et implique un automatisme de répétition [α]𓁜𓁝[β], jusqu'à la prise de conscience 𓁝[β][β]𓁜. pour accéder à une vision "simple" 𓁜.

Une remarque intéressante :

"Aujourd'hui comme il y a un million d'années, c'est le limité, le fini, s'efforçant d'appréhender l'infini, l'illimité— sans l'épuiser jamais, et sans jamais toucher fond ou rivage..." p. 1228 (en gras dans le texte)

- Tu veux parler du virtuel et du potentiel ?

- Bien entendu : ça nous renvoie à Deleuze. Nous en avons déjà longuement parlé sur ce blog :

  • Le mode syntaxique ♢ est le mode du "potentiel", médian entre ♧ et ♡;
  • Le mode sémantique ♡ ne connaît pas cette limitation, c'est le domaine du "virtuel";
  • Le fond : Le passage 𓁝𓁜 exprime un "choix" du Sujet correspondant à une délimitation des "possibles" (i.e. dont la somme vaut 100%)
  • Le rivage : c'est le passage à la limite  𓁝[β][β]𓁜 dont nous venons de parler;
    • exprimable en mode ♢;
    • résultant d'un choix en mode ♡.

S'en suit un morceau de bravoure : 

"Et voici maintenant la chose vraiment dingue : dans la vaste littérature qui, depuis des siècles et des millénaires, est censée rendre compte de l'aventure de l'esprit à la découverte des choses, rien ne transparaît de ce mouvement, si ce n'est tout au plus entre les lignes. Toujours on nous livre «le précis», comme s'il était sorti d'un bond et habillé de pied en cap du cerveau du «Savant» (comme d'une trappe, ou de l'output d'un infaillible mégaordinateur...), pour se caser impeccable dans les cases-alinéas, paragraphes et chapitres spécialement prévus à cet effet, et constituer en ordre canonique les doctes mémoires, notes et communications où nous avons tout loisir d'en prendre connaissance." p. 1228 (en gras dans le texte)

D'où a-t-il pu sortir une telle idée ? C'est tellement à côté de la plaque, en dehors de toute définition de l'approche scientifique —je pense en particulier à la réfutabilité que Popper place comme critère du caractère scientifique d'une thèse— que j'en reste sur le c... Ça semble une approche tellement "ad hoc" pour venir "se caser dans les cases-alinéas, paragraphes et chapitres spécialement prévus à cet effet, et constituer en ordre canonique SES doctes mémoires" que j'en suis gêné pour lui !

19/ Ordre et structure — ou l'esprit de précision

"Mais je reviens aux deux «attracteurs yang» qui restent encore pour compte,
abstraction et structure.
Le premier (ou l'«abstrait») forme couple avec le «concret», et le deuxième est l'époux dans le couple
structure-substance..
L'épousée, la «substance», exerce une fascination puissante sur l'esprit, incapable qu'il est de jamais la «saisir» directement, au moyen de la seule pensée, si précise soit-elle. Aussi s'efforce-t-il de l'appréhender à travers les mailles de plus en plus serrées de structures de plus en plus tines, «collant» à la substance et l'épousant de façon de plus en plus étroite, On aurait envie de dire que l'«ordre» inhérent à la substance d'une chose (que celle-ci soit «concrète», «palpable», ou «abstraite», vivant dans un monde de concepts), aurait tendance à s'y manifester sous forme de «structure». Mais peut-être serait-il plus juste de dire que c'est par cet aspect-là du moins, l'aspect accessible au langage mathématique, que cet ordre peut être saisi par l'esprit et exprimé, communiqué et transmis au moyen du langage. Il s'agit ici, visiblement, de I'«esprit de précision», ou l'«esprit de géométrie» dont parlait Pascal - celui qui fait de la précision son
α et son ω pour appréhender l'inconnu et le mystérieux, à travers l'ordre manifestant en eux. On pourrait dire que la recherche de «la structure» est le mode privilégié de l'«esprit de précision» (et tout particulièrement, de la pensée dite «scientifique») pour appréhender l'«ordre», et à travers lui, la substance même des choses." p. 1229-1230

Aïe ! Il y a dans ce discours un embrouillamini qui nécessite l'usage de notre syntaxe pour y mettre un peu d'ordre. Pour mémoire je rappelle ici quelques caractéristiques de nos "niveaux" :

  [⚤] [#] [♻]
A.G. le nombre la forme la quantité
Noether l'indétermination les symétries la conservation
maths algèbre géométrie analyse

Trions les noeuds du discours de A.G. avec cette grille de lecture :

  • Chez Pascal, l'esprit de géométrie s'oppose à l'esprit de finesse, et désigne de ce fait la pensée rationnelle, attachée à une logique en [⚤], et non à ce que de nos jours nous appelons "géométrie", en [#]. (voir ici)
  • L'opposition entre les structures "collant" à la substance et la substance elle-même renvoie à la surface ou forme en [#] entourant le volume ou quantité en [♻] de la chose. 
    • [#] : Les outils d'appréhension de la surface ou des structures sont de l'ordre de la géométrie ou la topologie;
    • [♻] : les outils relatifs à la quantité sont de l'ordre de l'analyse ou de la mesure.
  • L'ordre en [⚤] comme la mesure en [♻] commandent de ramener l'observation de l'objet à UNE dimension (ou un "graphe" pour un "ordre partiel"). La logique s'exprimant en [⚤] par un "objet classifiant" et en [⚤]♧♡ par la logique du 1er ordre.
  • Donc, ce qui sert à "classer" les structures en [#] n'est pas directement la logique [⚤], mais la recherche de symétries. La structure de groupe d'Évariste Galois traduit algébriquement [⚤][#] des symétries géométriques. (au sujet de Galois, il est à noter qu'il parle T1 p. 217 de son "rêve" qui a pris corps avec le temps... Nous ne sommes plus dans la précision comme outil privilégié).
  • La structure de groupe implique la circularité, que l'on observe dans la circulation YinYang.

- Tu te réfères à A.G. dans ton tableau ?

- Oui, bien sûr puisqu'il démarre Récoltes et Semailles par ce rappel (Note 1):

"Traditionnellement, on distingue trois types de «qualités» ou d'«aspects» des choses de l'Univers, qui soient objet de la réflexion mathématique : ce sont le nombre , la grandeur, et la forme. On peut aussi les appeler l'aspect «arithmétique», l'aspect «métrique» (ou «analytique»), et l'aspect «géométrique» des choses." T1 p.50

- Peut-être assimile-t-il l'esprit de "précision" à la "rationalité" ?

- Dans ce cas pourquoi ne pas dire "rationnel" ? Non : précision renvoie à la mesure en [♻] et l'ordre aux axiomes de Peano en [⚤].

- À moins qu'il ne fasse référence à la façon de passer d'un "faisceau" à sa "fibre" pointant sur le "germe", par des inclusions successives ?

- Nous serions alors en [#], mais ce n'est pas le plus essentiel, qui reste la recherche de symétries.

- OK, mettons ceci de côté et avance un peu.

- Le passage d'"abstraction/ structure" à "structure/substance" nous renvoie quand même à notre façon d'interpréter l'apparition de la théorie de Galois comme marquant une rupture épistémologique avec :

  • L'irruption du niveau [#] entre le multiple en [⚤] et la substance en [♻];
  • L'individualisation de la syntaxe ♢ se détachant de la sémantique ♡.

C'est tout du moins ce que le lis dans cette structure s'intercalant ainsi entre l'abstraction et la substance, que ce soit :

  • Dans la profondeur : ♡/ / ♧;
  • En surface : [⚤]/ [#]/ [♻]

ce n'est qu'une hypothèse, bien entendu.

- Il arrive quand même à supprimer la Liberté dans cette histoire !

- Oui, mais là, je ne suis plus du tout.

- Passons à la site :

"Je crois à présent voir assez clairement les relations entre les qualités d'ordre, de structure et de précision. Il me reste seulement à examiner le dernier attracteur yang,
l'abstrait (ou l'abstraction),
dans sa relation aux quatre autres notamment. J'ai déjà eu l'occasion, d'ailleurs, de le regarder quelque peu, dans les deux sections consécutives « La quête de l'Unité» et «Généralité et abstraction — ou le prix à payer» (n° 8 et 9). Mais il était bien clair alors que je venais à peine d'amorcer le thème ouvert par cette chose assez étrange, en vérité, qu'est l«abstraction»."
p. 1231

- Toute notre démarche consiste à préciser les différentes voies qui s'offre au Sujet pour "s'abstraire" des son expérience immédiate du Réel en [∃]𓁜. Démarche aboutissant en 𓁝[∅]. nous pouvons simplement reprendre le schéma qui nous a servi à parler de la "pulsion Unaire" de Lacan pour baliser les différentes voies de l'abstraction : (voir 12/)

𓂀   𓂀
      [∅]   [∅]   [∅]      
           
[∃] [⚤] [#] [] [∅]
           
[∃] [⚤] [#] [] [∅]
           
[∃] [⚤] [#] [] [∅] 
           
    [∃]   [∃]#   [∃]    
𓂀   𓂀

20/ L'abstrait et le concret (1) : naissance de la pensée

"Dans l'esprit de la plupart des gens, il y a une assimilation pousse-bouton quasi viscérale, d'«abstraction» avec «complication». Chose remarquable, même les mathématiciens, ces soi-disant maîtres ou spécialistes de l'abstraction, n'y font pas exception. J'y vois surtout une rationalisation tacite de cette répugnance à «changer d'étage» (et par là; tant soit peu, d'Univers...). À un regard très superficiel et hâtif, cette assimilation peut paraître fondée. Elle consiste pourtant en une confusion très grossière, qui me paraît mériter d'être mise en pleine lumière." p. 1233

- Bon, A.G. fait bien entendu référence à l'accueil de ses travaux par ses pairs, on pourrait poursuivre la démonstration avec l'accueil réservé à la théorie des Catégories par Bourbaki, ou plus récemment à l'ostracisme qui frappe Olivia Caramello, mais bon, c'est malheureusement une attitude de paresse intellectuelle que l'on retrouve dans tous les domaines...

- Considérations pro domo ?

- Un peu, oui, à mon très modeste niveau je ne suis pas sûr que parmi les quelques dizaines de lecteurs de mes articles, plus d'un ou deux ne se soit donné la peine d'apprendre à utiliser ma syntaxe (voir ici). Ça m'a chagriné assez longtemps, à présent (et fort heureusement pour ma zénitude) je m'en fous royalement 😁

- Apparemment, A.G. n'est pas dans les mêmes dispositions que toi...

- Nous n'avons pas la même histoire familiale.

- OK, et si l'on revenait au texte ?

- Le reste, permettant juste à A.G. de lâcher un trop-plein, coule de source et n'appelle pas de commentaire :

"Le premier pas de l'esprit humain dans son aventure de connaissance, je le vois dans l'apparition du premier mot, avec la compréhension de sa signification : un « symbole », représentant quelque chose de « commun» à une multiplicité illimitée de situations différentes, qu'elles soient présentes, passées ou encore dans les limbes du futur..." p. 1233

- Je retiens que l'Homme est un animal parlant, ce qui ferait plaisir à Lacan...

21/ L'abstrait et le concret (2) : le miracle de la simplicité

- Laissons A.G. s'exprimer, car il n'y a rien à ajouter :

"... c'est vrai qu'il faudra bien dix pages entières, si ce n'est cent, pour fourbir tant soit peu un nouveau langage, se mettre à l'aise en somme, pour avoir l'impression de bien savoir au moins de quoi on parle. Cent pages pour développer un langage, plus une poignée d'énoncés lapidaires dans le langage nouveau — et voilà dix mille autres pages abracadabrantes, bonnes pour la Corbeille!" p. 1239


Le 30/ 01/ 2025 :

- Rien à ajouter ?

- C'est un constat que tout un chacun peut faire. Encore dernièrement, en survolant cette vidéo d'un cours de Pierre Colmez sur les nombres p-adiques (voir "Bouclage #2"), je tombe à 36'48" sur sa remarque : 

"Les gens sont incapables de comprendre des maths qui apparaissent après leur thèse."

On peut s'en amuser, ou le regretter, mais au fond, c'est vrai de tout. Moi, par exemple, j'ai envie, j'ai besoin d'apprendre le Portugais pour communiquer de façon plus fluide dans cette vie que je me suis choisie, et pourtant, malgré cette nécessité acceptée, je rame comme pas possible !

Il y a donc matière à réflexion : pourquoi est-ce si difficile de changer de langage? Pourquoi un enfant de 4 ans réussit-il là où l'adulte peine à la tâche? Pourquoi est-il plus facile de toujours répéter la même routine que d'en changer, tous les psys en font le constat.

Et même dans l'effort fait pour changer de langage, nous restons conditionnés par d'anciennes habitudes. En lisant Grothendieck par exemple, même lorsqu'il affirme avoir changé de perspective, pour explorer la partie Yin en lui qu'il découvre sur le tard, même lorsqu'il souhaite adopter une philosophie basée sur la dualité Yin/ Yang, il reste comme on l'a déjà remarqué à maintes occasions, profondément ancré dans une culture formatée par Platon,. Cela s'entend chez lui aussi clairement que mon accent Français dès que j'ouvre la bouche pour parler Anglais ou Portugais.

- Il est plus économique, intellectuellement parlant, d'utiliser toujours les mêmes routines, d'emprunter les mêmes circuits neuronaux, que de développer de nouvelles connexions. Il faut le comprendre en termes énergétiques. Pourrait-on le repérer sur notre topologie de l'Imaginaire ?

- C'est un champ à défricher. J'ai l'intuition que la voie des mots (♧𓁜𓁝♡)  est "structurelle", et qu'à chaque avancée en mode ♢, nous retravaillons nos circuits neuronaux, tandis que l'on apprend dès l'enfance à parcourir la voie des choses (𓁜𓁝).  Nous avions abordé le sujet en relisant l'art de la guerre (voir "Retour à Sun Tzu"),  et c'est proprement au coeur de ce que devrait être l' "entropologie" rêvée par Lévi-Strauss.

- À méditer, mais si tu revenais à tes amours, Jacques ?

22/ L'abstrait et le concret (3) : les strates du langage — ou la peau et l'étreinte

- A.G. est dans la même perspective économique que nous pour explorer la montée vers l'abstraction. 

"L'ivresse de la découverte n'est pas le privilège du géant, comme une tradition tyrannique voudrait nous le faire croire, mais bien celui de l'enfant..." p. 1239

Oui, certainement, et pour prolonger cette réflexion dans notre perspective "entropologique", on pourrait comprendre le shoot d'endorphine accompagnant le "eurêka" d'Archimède comme l'observable de la pulsion de connaissance, récompensant le saut 𓁝𓁜.

- La jouissance serait la manifestation d'une pulsion, particulièrement puissante chez l'enfant ?

- En l'absence ou pour supplanter cette motivation naturelle, on peut la socialiser voir Bourdieu en général, et Thomas S. Kuhn pour le milieu scientifique...

- Oui, bon, revenons au texte.

- Là où A.G. manque la marche, c'est dans sa compréhension du mécanisme, lorsqu'il parle "d'oubli". Il prend l'exemple de Képler, biberonné à l'idée des "sphères célestes" et au parcours circulaire des astres qui, un moment donné, "oublierait" ce formatage scolastique pour envisager un parcours elliptique.

"Il faisait de son mieux pour faire comme on lui avait dit : il se bouchait les oreilles ! Jusqu'au jour où il s'est lassé au jeu de cette escalade délirante. Cela a été le jour où il a su oublier ce qu'il avait trop bien appris, et simplement écouter. Écouter non des livres, ou des maîtres, savants et péremptoires, mais l'humble voix des choses." p.1240

Non, l'idée nouvelle ne découle pas de la simple observation des choses, dans la voie (𓁜𓁝), mais d'une remise en cause formelle, dans la voie (♧𓁜𓁝♡) de ce qui a déjà été conceptualisé ! Dans le processus, l'observation tient le rôle de queue de détente du pistolet, mais l'explosion tient à la poudre contenue dans l'étui du projectile, en l'occurrence la doctrine qui "contraint" le phénomène étudié. Plus la doctrine est contraignante, plus forte est l'explosion. Et la liste est longue des révolutions qui se sont succédé en sciences.

Depuis l'école de Pythagoricienne, pour qui la démonstration de l'irrationalité de √2 était un scandale, en passant par les démêlées de Giordano Bruno et Galilée avec l'Église Catholique, la catastrophe ultraviolette, ou encore la théorie de l'évolution des espèces de Darwin.

Il ne s'agit pas d'oublier ce qui est su pour adopter un regard naïf, mais de prendre le contre-pied de ce qui est admis, pour le retourner. C'est d'une mise à mort de l'ancien, et non de son simple oubli que naît le nouveau. Derrida parle de déconstruction, mais plus fondamentalement, plus profondément ancré en nous, nous retrouvons la forme canonique des mythes de Lévi-Strauss.

Képler ne s'est pas "lassé" d'une doctrine inefficace, il s'est révolté, symboliquement, c'est le même acte que la révolte de l'adolescent contre la figure paternelle : Oedipe tue le père pour épouser la mère, c'est aussi universel que ça.

- Je crois que tout le monde a compris —sinon, pour les retardataires, voir "Moi-peau et forme canonique"—, continue.

- A.G. fait une remarque qui vient ici fort à propos dans la discussion :

"L'esprit humain serait plus enclin à déployer des prodiges de virtuosité technique, au point parfois de sembler défier les limites de l'humainement possible en puissance cérébrale et en endurance, plutôt que de faire ce «tout petit pas», le pas enfantin, par lequel on passerait comme en jouant à un autre niveau — le niveau qui rend superflu tout cet impressionnant déploiement de force ! En termes techniques, ce  se traduit souvent par ni plus ni moins que le passage à un "niveau d'abstraction" juste un poil plus élevé;" p. 1241

Bien sûr, A.G. nous parle ici de son expérience, dans un domaine qu'il a révolutionné grâce à une idée "bébête", dont il parle en début d'ouvrage. On peut l'entendre là-dessus et c'est ce qui fait son génie. Mais nous le voyons ici, loin de son terrain de chasse naturel peiner à la tâche, sans même se rendre compte qu'il tente de visser un boulon de 12 avec une clef de 8, et de contraindre Lao Tseu dans les chaussures de Platon.

- Tu te répètes.

- C'est dans le dessin de te montrer que plus on monte dans l'abstraction, plus les racines auxquelles on s'attaque sont profondes. C'est un paradoxe apparent, mais pourtant bien réel.

J'irai même plus loin : ceux qui, à l'instar de A.G., se sont battus avec succès pour faire valoir un nouveau point de vue, contre leurs pairs, épatés même par l'étendue des perspectives qu'ils ont mises à jour et occupés à défricher ce nouveau terrain d'aventures, ont du mal à leur tour à avancer d'un autre pas. C'est le phénomène dont nous parlions ce matin : les chercheurs s'arrêtent au niveau de leur thèse. Après, ils dirigent des équipes qu'ils voient comme autant de débroussailleurs...

- D'où les conflits de Freud et Ferenczi ou Grothendieck et Deligne ?

- Les fils deviennent des pères... Pour en revenir au "pas enfantin", oui, pour un enfant encore peu formaté, mais pour un adulte déjà formé, c'est une autre paire de manches. Or, dans les hauteurs où nous emmène A.G., ce sont les vérités premières, les croyances les plus profondes, qu'il faut mettre en lumière et discuter.

Matrix - le choix

- Accouche, de quoi parles-tu ?

- Du choix fondamental entre 1 et ∅ :

  • Platon choisit 1 pour l'Occident;
  • Lao Tseu et l'Orient balancent entre 1 et ∅.

Le paradoxe, c'est que les mathématiques, avec en particulier la théorie des catégories bascule de l'Occident à l'Orient, en théorisant une propriété universelle attachée aux "objets initial—∅/ 1—final", et que pas un matheux, que ce soit ici Grothendieck, ou encore dernièrement Alain Connes dans sa présentation (voir ici) ne va jusqu'à remettre en cause son accrochage résolument (voire revendiqué) platonicien !

- Il y a bien une montée en puissance des matheux Asiatiques... Mais que dire de cette pulsion Unaire Lacanienne ?

- Une pulsion 𓁝[∅], oui, qui te pousse en avant, pas une doctrine [♻]𓁜 qui châtre ton devenir. C'est la différence entre la foi de Saint Augustin et le combat de la Fraternité Sacerdotale Saint Pierre pour que la messe soit dite en Latin...

- Ou lire les maths dans le Saint Bourbaki; je crois que tout le monde a compris. La suite, please.

- A.G. tente de définir ce qu'il entend par "abstraction", après avoir compris le rapport étroit entre "parole et pensée". Là-dessus rien de neuf.

"En disant (sans autre précision) que pensée et langage sont par nature «abstraits», on sous-entend sûrement qu'ils le sont par rapport aux «objets concrets» au sens le plus strict du terme : tels objets que nous voyons devant nous, ou que nous touchons du doigt (au sens propre du terme). Cette qualité-là d'abstraction (qu'on pourrait appeler «absolue») est inhérente à tout mot du langage, sans exception." p. 1245

À ce sujet j'ai une proposition à faire : L'abstraction, c'est prendre les mots pour "objet de discours", en reportant sur eux notre attention.

- Autrement dit tourner de 90° et passer de (𓁜𓁝) à (♧𓁜𓁝♡), en utilisant les mêmes outils ?

- Ce serait une thèse à étoffer. Ensuite, passer d'un langage à son métalangage consisterait à répéter la permutation (𓁜𓁝)(♧𓁜𓁝♡), ce qui caractériserait le mode ♢ par cet automatisme de répétition .

- Et ça se traduirait comment ?

- Nous avons caractérisé ainsi la différence entre les deux voies (voir ici dans "covariance et contravariance") :

  • La voie des mots (♧𓁝𓁜♡) ou : 𓁜 ↑ 𓁜 𓁜  est contravariante ; 
  • La voie des choses (𓁝𓁜) ou :   𓁜 → 𓁜# 𓁜 est covariante.

Comme tu le vois, c'est là encore un vaste champ à défricher, mais au moins avons-nous un outil à disposition. Avec cette idée de processus répétitif en tête, je crois que A.G. fait ensuite un contresens lorsqu'il caractérise l'abstraction ainsi :

"Le processus d'abstraction, qui semble être (au point de vue de la formation de concepts, porteurs de sens) comme l'âme dans la formation progressive d'un langage de plus en plus complexe, de plus en plus «ramifié», apte à saisir des replis et des nuances de plus en plus délicats des choses de l'Univers — ce processus est cumulatif. Une fois un de ces pas accomplis, le nouveau concept, s'incarnant dans un mot nouveau, finit par faire partie des choses familières et «concrètes», au même titre, voire plus encore, que ces autres choses que nous avions qualifiées tantôt de vraiment concrètes." p. 1244

- On voit bien dans cette approche l'idée que tu viens de développer des concepts envisagés comme des "choses".

- Oui, mais ce n'est pas là-dessus que porte ma critique : A.G. parle d'un processus "cumulatif", or, "monter" ou "abstraire", c'est au contraire remettre en cause le déjà là, pour le retrouver ensuite, comme accessoire ou élément ou cas particulier d'une vision plus large. En ne retenant que l'aspect cumulatif, A.G. montre à l'envie qu'il passe à côté du mécanisme qu'il tente de décrire.

- Ça me rappelle une très vieille discussion que nous avions eu à propos de la différence entre efficacité et efficience. En marchant, si tu cherches l'efficacité, tu fais attention à chaque pas de ta progression, en contournant les flaques d'eau au risque de divaguer. Au contraire, si tu te concentres sur l'objectif, en prenant un repère lointain à la boussole, ta marche sera peut-être localement plus difficile, mais globalement plus sûre.

- Exact : l'aspect cumulatif dont parle A.G., c'est le côté "efficacité"; ce qui peut conduire, par exemple à décrire les mouvements des planètes en accumulant, étape par étape, une série de cercles tangents au mouvement observé. L'efficience commande au contraire, de renoncer à ces constructions (A.G. parle d'oublier), pour rebâtir la théorie à partir d'une ellipse.

- Il y a donc dans le discours de A.G. une contradiction interne.

- Oui, et à mon sens, il confond "répétitif" (notre mouvement  décrit plus haut) et cumulatif : la répétition en question n'étant pas de l'ordre de l'édification, mais plutôt de la refondation.

- Il y a du Sisyphe dans l'air...

- Plutôt Prométhée...

- Après le meurtre de Laïos par Oedipe, tu nous offres les entrailles de Prométhée ?

- On ne sort pas de la forme canonique mon ami... C'est notre humaine condition ! Ceci dit, je m'étonne que A.G. confonde le développement en extension, "formation progressive d'un langage de plus en plus complexe, de plus en plus «ramifié», apte à saisir des replis et des nuances de plus en plus délicats des choses de l'Univers" et le développement en profondeur, ce "tout petit pas" enfantin dont il parlait plus haut.

- Il y a bien quand même au final une "stratification du langage", comme le remarque A.G.

- Bien entendu, mais il ne faut pas s'y tromper : tout édifice patiemment construit est destiné à être dynamité pour être reconstruit. Et les constructeurs, conscients de leur fragilité sont enclins à vouloir dynamiter les dynamiteurs, pense à Grothendieck versus Bourbaki... 

- C'est pour raccrocher ce processus d'abstraction à son pôle Yang "Précision":

"Je pensais surtout au langage plus ou moins scientifique (par exemple, celui du mathématicien), au service donc de ce que j'appelais l'«esprit de précision». Mais il m'apparaît à présent que ce processus d'affinement, par superposition de «strates» successives, n'est nullement limité au langage tant soit peu «technique», propre à la «précision». Je suis persuadé que c'est là une particularité remarquable, qui doit pouvoir s'observer dans tout langage sans exception." p. 1245

Comme tu le vois, focalisé par ces couples, et les pôles qu'il a sortis de sa méditation, pour ne pas dire de son chapeau, il force ensuite les concepts à entrer dans les cases, contrairement à sa pratique en mathématiques !

- Je crois qu'il y a confusion entre montée/ descente et Yin/ Yang, car il réifie dès l'origine les deux pôles d'une mutation —seule permanente— d'où des embarras de langage.

"Passer d'un degré d'abstraction au suivant, c'est «monter» d'une strate à une autre «plus élevée», c'est une démarche ascendante, une démarche à très forte tonalité yang. Et d'autre part, cette démarche est aussi notre moyen pour un approfondissement dans notre connaissance des choses, donc pour une progression descendante, pour une «descente» dans le yin. Il y a là un double aspect d'un même mouvement. C'est le mouvement, assurément, apparu dans la réflexion il y a déjà une semaine, dans la section «Désir et nécessité - ou la voie, et la fin» (n° 11)." p. 1246

- Explique ?

- Il y a un enchevêtrement qu'il convient de démêler pour y voir clair :

  1. La montée; par exemple ♧♡ signifie que "d'un point de vue" plus élevé, le champ observé est plus large, c'est ce que A.G. vient de constater. L'approfondissement dont il parle, c'est par exemple :
    • Faire un choix de structure ♡♢ (ex un corps k en [⚤] ou une topologie en [#]);
    • Pour définir dans un langage ainsi cadré en ♢,
    • Des relations entre objets ♢♧:
  2. Ce que A.G. appelle "approfondissement", ce sont ces "retours  ♡♢ et ♢♧, qui ne sont en fait que la médiatisation (syntaxique) du sens donné au choses;
  3. L'approfondissement sous-tendant la "montée", tient précisément au rapprochement du Symbolique où, à un moment donné et au plus haut des cieux, le Sujet se trouve à poil devant le choix fondamental,  intime, philosophique, dont nous avons parlé plus haut : le 𓁝[1] de Platon ou le 𓁝☯ !
  4. À chaque pas de sa progression entre le Réel et le Symbolique, le Sujet 𓁝𓁜 passe successivement par des postures ex ante—Yin 𓁝/𓁜 Yang—ex post.

Que ceci passe par le langage, oui, bien entendu :

"C'est le «désir», la soif de découvrir, qui sans cesse nous pousse à fouiller plus avant dans la juteuse profondeur des choses. Quant à la «nécessité», ou la «voie» pour l'assouvissement du désir (renaissant de ses cendres aussitôt qu' assouvi...), nous voyons à présent qu'elle consiste surtout, en termes concrets, à réinventer un langage : un langage de plus en plus souple, de plus en plus délicat et délié, apte à sonder toujours plus profondément, plus intimement l'inépuisable chair des choses." p. 1246

Belles et fortes paroles !

- Oui, et je te propose de terminer l'article sur ces mots :

Au niveau du visible et du tangible, l'acte créateur est celui de concevoir, de nommer, d'abstraire - de faire apparaître et de «monter» une strate nouvelle, par-dessus ces strates anciennes qui sont comme l'assise et la chair de notre pensée explorante. Ou pour mieux dire, c'est l'acte de former comme une peau nouvelle, plus délicate et plus sensible encore, se superposant à celle qui l'avait précédée." p. 1246

Ce qui n'est pas sans rappeler le "Moi-peau d'Anzieu (voir  "Moi-peau et forme canonique")...

- On tourne en rond ?

- Signe qu'il est temps de faire une pause, en attendant la suite.

- Amen !

Hari

Note 1 :

- En feuilletant le Tome 1 à la recherche d'une référence précise, je tombe  sur "forme et structure ou la voie des choses" p. 47 qui me conforte dans l'idée que le passage d'un niveau à l'autre [∃][⚤][#][♻][∅] caractérise bien ce que je désigne à présent par "la voie des choses" (𓁝𓁜).

- Tu lui as piqué l'idée?

- Non, je partais du duo Les mots/ les choses repris du titre du livre de Foucault.

Il faudrait sans doute que je revienne sur ces premières pages, qui après une année de maturation, prennent pour moi un sens bien plus précis.

- À quoi penses-tu ?

- Il parle par exemple p. 50 de "La géométrie nouvelles ou les épousailles du nombre et de la grandeur", qui renvoie directement à notre exploration récente des nombres p-adique (voir "Bouclage de la quantité sur les nombres")

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