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Sur les traces de Lévi-Strauss, Lacan et Foucault, filant comme le sable au vent marin...

L'Homme quantique

Produit et coproduit

 

Nota du 26/08/2019

Je laisse cet article sur mon blog pour me souvenir de ma propre évolution, mais il n'aborde  pas le sujet de la bonne manière.

Voir au sujet de la "propriété universelle" des catégories, qui est la clef de tout, l'article de ce jour, avant de reprendre votre lecture...

Relecture au 25/08/2019 (note 3)

- Dans le dernier billet (voir ici), Nous en étions resté à ces définitions :

Produit

Soit

  • C une catégorie et (Xi)i∈I une famille d'objets de C,
  • On cherche un couple (X,(πi)i∈I) où X est un objet de C et (πi)i∈I une famille de morphismes π: X⟼Xi
  • Tel que pour tout objet Y de C et toute famille fi : Y⟼Xi il existe un seul et unique morphisme f : Y⟼X et tel que pour tout indice i on ait πi◦f=fi 
  • Si un tel couple (X,(πi)i∈I) existe, on le nomme "produit des (Xi)i∈I"

Coproduit (ou somme)

Soit

  • C une catégorie et (Xi)i∈I une famille d'objets de C,
  • On cherche un couple (X,(φi)i∈I) où X est un objet de C et (φi)i∈I une famille de morphismes telle que φi : Xi⟼X
  • Tel que pour tout objet Y de C et toute famille fi : Xi⟼Y, il existe un seul et unique morphisme f : X⟼Y et tel que pour tout indice i on ait f◦φi=fi
  • Si un tel couple (X,(φi)i∈I) existe on le nomme "somme des (Xi)i∈I"Et je terminais par cette remarque :
Produit Coproduit

fig. 1

"Dans ces définitions, quoique la "distance" entre la catégorie domaine et codomaine soit effacée, la problématique est semblable à celle que nous avons vue au sujet des foncteurs variant/ contravariant."

- Avoue que c'est un peu abscons ! J'aimerais bien faire le lien avec les opérations élémentaires d'addition et de multiplication apprises à l'école.

- J'ai essayé, de façon tout à fait naïve d'utiliser notre approche dans ce but il y a longtemps (note 1); mais je n'avais pas à l'époque rattaché la différence entre ces deux opérations à la relativité du point de vue du locuteur.

- Tu en reviens toujours à la différence entre pensée logique et topologique ?

- Oui, tout à fait. Dans mon dernier billet, je me suis attaché à pointer les ruptures de symétries liées aux différents outils de la théorie des catégories, et de quelle façon le passage descendant de la transformation naturelle au foncteur, puis du foncteur au morphisme en garde la trace.

Le dernier maillon de cette chaîne nous a mené au produit, le processus créatif le plus élémentaire, en deçà de la "topologie", qu'il convient donc d'examiner de façon purement "logique", le Sujet en Im gardant une position globale, ex post.

Le plus important est sans doute de comprendre le "produit" (je parle ici du produit cartésien au sens de la théorie des catégories) comme la véritable création d'un "objet" à partir de plusieurs autres (note 4). Partant de là, la question proprement philosophique qui se pose est celle-ci:

Si j'ai créé un objet, il doit être stable dans son environnement, quel que soit l'endroit d'où je le considère.

Et là nous retrouvons l'idée de "propriété universelle" vue dans le précédent billet.

- Sauf que tu n'as plus d'approche locale de l'objet.

- À la limite, je peux imaginer I'm chevauchant l'un après  l'autre les différents éléments X de la catégorie C, traduisant la permanence de P malgré ces changements de points de vue, autrement dit conserver le caractère universalité de P, avec le peu de moyens à ma disposition dans ce scénario extrême : I1<I01=I'm<Im.

- Mais concrètement?

- Le cadre étant ainsi défini, nous pouvons reprendre la lecture de "Conteptual mathematics" de Lawvere.  Reporte-toi au schéma de la figure 2. Cette fois-ci, comme nous sommes au ras des pâquerettes, dans la catégorie Ens, le schéma est aplati en I01, qui serait une simple feuille de papier, ou plutôt l'écran de ton ordinateur.

fig. 2

fig. 2

Ne te laisse pas dérouter par la différence de notation: Lawvere utilise "p" pour les projections, ce que nous avons noté π: X⟼Xi de façon générale. Mais le schéma est assez clair par lui-même: imagine que B1 et B2 ainsi que P ne soient que des ensembles de points, alors les flèches p1 et p2 lient chacun des éléments de P aux éléments de B1 et B2. 

Le sens de ces flèches est essentiel: comme le produit P est défini uniquement et complètement par B1 et B2, il est nécessaire que P soit le domaine commun à p1 et p2 (i.e.: chaque élément de P est défini). Les morphismes P→B sont donc surjectifs.

- Je comprends l'idée, mais comment en arrives-tu à ma bonne vieille multiplication ?

- N'oublie pas que nous sommes en I01, qui se construit à partir de répétitions depuis le niveau élémentaire I1, où nous avons notre singleton (*). Pour plus de clareté, il conviendrait de distinguer deux étapes dans notre façon de représenter la flèche d'un morphisme:

  • Originellement, c'est un concept purement diachronique entre I1 et I01, la flèche va de bas en haut : (*)↑{*}, pour représenter (*) en I1 par {*}  en I01, avec I1<I01<Im (note 5).
  • Une fois réifié en I01, la flèche est "mise à plat", horizontalement (avec une symétrie imaginable à ce niveau entre → et ←). (note 2)

Soit B1 avec 2 éléments et B2 avec 3, alors P peut-être défini par 6 éléments:

B1 P
a ⟨a,α⟩ ⟨a,β⟩ ⟨a,γ⟩
b ⟨b,α⟩ ⟨b,β⟩ ⟨b,γ⟩
B2 α β γ

fig. 3

Nous avons donc entre I1 et I01:

  • 3 morphismes (*)↑B1
  • 2 morphismes (*)↑B2
  • 6 morphismes (*)↑P

D'autre part, si nous envisageons les potentialités qui s'offrent en I01 pour lier P à B1 et B2, nous avons : 

  • 26=64 morphismes potentiels de P→B1
  • 36=729 morphismes potentiels de P→B2 (note 2)

On voit donc assez simplement que la "création" de P  directement en I01, se définit par un "choix" particulier de morphismes parmi le nombre de ceux potentiellement imaginables en I01.

La multiplication provient d'un décompte de morphismes à partir de l'élément final (*)↑{*}, et le concept de multiplication est bel et bien rattaché à l'idée de répétition d'un mouvement élémentaire à partir de l'objet le plus basique qui soit; ce qui recoupe l'intuition naïve que je pouvais en avoir (note 1).

Puisque nous nous situons en I01, où il est possible de construire N à partir de la notion de "successeur" (i.e.: la succession des (*)↑{*} menant à une succession d'objets de Ens repérables par un indice), ceci donne un discours synchronique (c.-à-d. une suite de tautologies) : (1 fois).↑=1; (2 fois).↑=2... (i fois).↑=i...).

Nous pouvons donc indicer chaque morphisme ↑ de (*) par un élément de B1, B2 ou P, et comprendre la multiplication comme une opération sur ces indices...

Cette façon de passer d'une action entre I1 et I01 à son repérage en I01, peut ensuite être généralisée aux niveaux supérieurs: ce qui importe, c'est le passage d'un élément diachronique (morphisme, foncteur, fonction etc...) à son indice dans une catégorie dénombrable. (note 6). D'où l'importance de cet indice i dans les définitions de (X,(πi)i∈Iet de (X,(φi)i∈I).

fig. 4

fig. 4

L'objet S n'est plus construit à partir d'une répétition d'actes portant sur un objet, qui serait en l'occurrence l'objet initial, vide, puisque ce dernier reste inaccessible à partir de I'm, en position ex ante. Inaccessibilité  se traduisant par le fait que n'ayant aucun élément, il ne peut être défini par aucune flèche de quelque morphisme que ce soit.

Dès lors, S ne peut qu'être le lieu commun où repérer les codomaines des morphismes issus de B1 et B2. 

S
B1 B2
a α
b β
  γ

fig. 5

Dans ce contexte, l'image 0 de l'objet initial n'a aucune influence dans le site où il s'inscrit : a+0=0+a=a etc.

D'une certaine façon B1 et B2 regroupant des éléments de S peuvent être considérés comme une partition de S, vu non plus comme regroupement d'éléments, mais comme un tout que l'on découpe. Nous avons bel et bien une approche de l'objet S qui est déjà d'ordre topologie; d'ailleurs le concept de "tribu" utilisé en théorie de la mesure comme nous l'avons vu, conserve encore sa signification en I01.

Mais, bien entendu, cette "somme" définie localement par I'm, est définissable par Im comme un "produit" particulier, puisque les éléments de S sont liés à l'objet final par 5 morphismes, auquel il convient d'ajouter (*)⟼0.

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(reprise au 25/08/2019 - Note 3)

- Tu m'embrouilles avec ton co-produit qui serait représentable par un produit.

- C'est du à une différence de nature entre une vision ex post de Im et une vision locale de I'm d'un même objet situé en Ik, avec I'm<Ik<Im.

La rationalité du Sujet, en Im, consiste au sens le plus primitif du terme, c'est-à-dire logique, à rapporter une observation en Ik à une grille de lecture en Ik+1, avec Ik<Ik+1<Im.

Maintenant, il est loisible à Im de s'imaginer lui-même à travers son image I'm dans un miroir: I'm<Imiroir<Im et même, de situer cette image dans l'espace qui s'y reflète. Mais fondamentalement, toute cette reconstruction se rapporte à la surface plate du miroir.

Nous avons souvent recourt à ces images de nous-mêmes que nous plongerons à loisir dans des expériences de pensée, c'est ce que fait Einstein pour établir son principe d'équivalence; et nous le faisons, précisément pour oublier la profondeur de notre regard. Si par exemple je me pose la question de définir la courbure de notre espace de façon locale, j'imagine un être plat en 2D, pour me demander de quelle façon il pourrait la mesurer.

Autrement dit ces petits avatars de nous-mêmes n'ont que des rapports de voisinage avec leur environnement, et si nous tentons de leur attribuer une "rationalité", il ne peut s'agir, comme nous l'avons déjà vu, que d'une rationalité que j'ai appelée "topologique".

- Merci pour la piqure de rappel, mais si nous en revenions à notre addition ?

- Nous sommes ici à l'extrême limite de l'exercice, puisque ramené en I1, I'm ne peut plus rien discerner, faute de toute possibilité de se situer dans un espace, limité à lui-même, dans un éternel présent, faute d'horloge pour décompter une fréquence. Autrement dit, pour dire quelque chose de I'm, le Sujet dans son discours ne peut le descendre en dessous de I01.

Et donc, si Im veut exprimer une propriété d'universelle à partir de I'm, il n'a d'autre choix que de situer I'm successivement en chaque élément Y de notre ensemble C.

 

 

En conclusion

Il me semble que la différence dans la construction d'un objet, soit comme "produit", soit comme "coproduit" nous renvoie à la différence que Spinoza indiquait déjà entre les entendements de première et seconde espèces:

  • L'immanence renvoyant au produit, à partir de l'objet le plus élémentaire (*);
  • La transcendance, renvoyant au coproduit à partir d'un objet qui s'échappe ( ).

Autre point: Grothendieck voyait son topos comme le "lit commun du discret et du continu". Je pense que l'on peut prolonger sa pensée, en-deça du niveau Imaginaire IR où elle peut s'exprimer, en comprenant qu'au niveau discontinu, en I01, il subsiste encore une différence sensible entre produit et coproduit et que la façon de concevoir ce dernier préfigure l'idée de topologie.

Enfin, la jonction sur un niveau donné des "produits" résultants de deux mouvements antagonistes, l'un montant, l'autre descendant, renvoie à l'idée qu'une "prise de conscience" selon J.-P. Changeux est du même ordre.

Pour reprendre l'image dont je me suis servie dans mon dernier billet d'un oeuf dans son nid (voir ici), le produit permet de concevoir l'oeuf, et le coproduit de déterminer son environnement, le nid.

Toute la difficulté tenant à ce que les deux restent bien situés l'un par rapport à l'autre lorsque le Sujet change de posture, ou lorsqu'il fait un mouvement diachronique (forcément ascendant, puisque nous sommes ici au niveau le plus élémentaire de leur rencontre, en I01).

Je pense qu'à partir de cette base, nous pouvons reprendre notre discussion concernant les foncteurs.

Bonne méditation.

Hari

PS du 06/01/2020 :

Il faut lire la suite dans "Matrice".

Note 1

Note 2

Je ne reprends pas ici le cours de Lawvere, mais c'est assez évident. Soit A et B deux catégories de Ens et #A et #B les nombres d'éléments respectivement dans A et B, le nombre potentiel d'actions de A vers B représentées chacune par un morphisme du type A→B, est #B#A, c'est facile à vérifier.

Note 3 du 25/08/2019

Mes lectures estivales concernant la mécanique quantique aussi bien de la relativité (voir les articles de juillet et août) me convainquent de l'importance de parfaitement comprendre les notions de covariance et de contravariance d'un tenseur et de quelle façon ceci est lié aux notions de variance/ covariance des foncteurs. 

Le second pas de cette régression Imaginaire nous conduit donc aux plus élémentaires des notions : celles d'addition et de multiplication. C'est pourquoi, fait assez inhabituel, j'ai complètement repris cet article du 16/06/2019 qui ne me semble pas assez rigoureux.

En espérant qu'il sera plus facile ensuite de remonter les barreaux de l'échelle!

Note 4

Lawvere prend comme exemple de "produit" le repérage d'un oiseau dans l'espace à partir de sa hauteur mesurable sur un piquet et de son ombre sur un plan. Nous avons l'habitude, quatre siècles après Galilée, de comprendre ces mesures comme les projections d'une position dans l'espace donnée, déjà là, mais primitivement, en procédant ainsi, Galilée a créé son l'espace comme le produit de deux mesures, l'une sur le piquet, l'autre sur le sol.

De même peut-on voir un cylindre comme le produit d'une droite que l'on déplacerait parallèlement à elle-même en suivant un cercle tracé sur un plan perpendiculaire.

D'un point de vue épistémologique, voire psychologique, il faudrait situer correctement ce processus de création, par rapport au seul processus réellement créatif que nous avons vu jusqu'à présent, à savoir la forme canonique des mythes. Ce n'est pas ici le lieu de s'y attarder, mais gardons ceci en tête pour une éventuelle mise en perspective.

Note 5

La rationalité d'une flèche descendante I01=>I1, est sujet à caution, puisque dans la position I'm=Im=I1, le sujet ne peut que tout ramener à sa propre existence, étant dans l'incapacité de se situer faute d'une définition de son espace, ou de son temps.

C'est l'éternelle immobilité du photon.

Note 6

À cette différence près qu'ici (i.e.: dans cette rationalité logique) l'indice est nécessairement d'un niveau conceptuel supérieur à ce qu'il repère.

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