Sur les traces de Lévi-Strauss, Lacan et Foucault, filant comme le sable au vent marin...
30 Août 2020
- Aujourd'hui je vais te parler des groupes d'homologie, parce qu'au fond, ce passage d'un groupe à l'autre est une métaphore parfaite du mouvement diachronique du Sujet dans son Imaginaire. Mieux, c'est la trace dans le champ mathématique des mouvements du Sujet, un peu comme une chambre à bulle garde la trace des particules qui la traversent.
- Te voilà bien solennel tout d'un coup !
- Oui, et je te propose de laisser mes motivations et références en note 1, ci-dessous, pour te livrer ici l'extrait sec de mes cogitations, sinon je vais perdre le fil. Je suis toujours dans les vidéos de NJ Wildberger, qui nous offre une excellente introduction aux groupes d'homologie, même si elle semblera presque naïve au spécialistes. (voir "An introduction to homology").
Ce qui me frappe immédiatement, c'est qu'il part du "groupe fondamental" de Poincaré π d'un espace topologique, pour nous présenter l'homologie comme une extension de ce concept.
- Et alors ?
- Le groupe fondamental π tourne autour du concept de "vide" au sens propre, en ce sens que les éléments de π sont les boucles élémentaires que tu peux faire autour des vides d'un objet. Par exemple pour un tore, tu as deux boucles indépendantes , a et b dans ce schéma :
Or, cette description est rapportée à un point de vue local, le point P. C'est dire qu'en l'occurrence, le mathématicien explicite tout à fait son approche locale de l'objet, en spécifiant la place du Sujet: I'm en P, d'où il "cerne" ce qu'il ne peut tenir entre ses mains à savoir l'élément "vide" au-dessus de lui, ou encore, ce qu'il ne peut voir ni décrire.
Si tu prends un peu de recul, tu peux décrire en Im la position relative de I'm et du tore : I'm<Itore<Im<I0.
Maintenant, I'm scotché sur le tore peut se déplacer sur une surface 2D délimitée par a et b (que Im reconstituera en 3D en recollant les côtés opposés de cette dépouille).
Pour parler rationnellement de son expérience locale, I'm utilise le langage à sa disposition, c'est-à-dire, sachant que nous sommes ici en I01<I'm, un langage algébrique. Comme I'm et Im sont dans une même position ex post par rapport à I01, ce discours algébrique leur est commun.
La mise en scène générale du discours est donc : I1<I01<I'm≤Itore<Im<I0.
J'attire ton attention sur cette bascule dans le discours tenu localement par I'm :
- Tu nous as déjà parlé de cette bascule en I01 (cf. "Matrices").
- Il s'agit maintenant de voir ce qu'il en advient au-delà, entre I01 et IR, où s'articulent le discret et le continu, comme le dit Grothendieck (voir "Imaginaire et topos"), lorsque la répétition s'exprime en termes d'orthogonalité (voir note 1) et donc pour un objet topologique, lors du passage d'une dimension à une autre.
Le Sujet en I'm est situé au point P de dimension D0, sur une surface D2, les boucles a et b sont de dimension D1 et entourent un "vide" (vu par Im de dimension 3D).
Il s'agit pour nous de comprendre comment le Sujet articule entre elles toutes ces dimensions, en passant d'un discours topologique à un discours algébrique.
- Mais dans ton discours, quelle est la dimension propre au discours algébrique ?
- Il s'exprime en I01, avant le premier saut I01/IR. De ce point de vue, c'est un langage de dimension nulle: D0. En particulier, les "points" de la topologie peuvent se manier comme les éléments d'un ensemble.
Maintenant, le point extrêmement important, voire philosophique de la démarche est le suivant: en répétant les sauts I01/IR, le "vide" autour duquel tourne notre malheureux Sujet en I'm, monte en dimension.
- Que le "vide" puisse avoir une "dimension" peut sembler quelque peu saugrenu: le vide est vide, point-barre. Il n'existe pas et ne peut donc avoir aucune qualité, c'est ce qui s'exprime en I0.
- Mais nous avons dégringolé les niveaux Imaginaires pour nous retrouver limités à ce qui manque à Im.
- Je ne comprends pas ?
- Lorsque je dis que le cercle S1 fait une "boucle" qui entoure un "vide", j'imagine un vermisseau I'm sur S1, tirant derrière lui une corde pour effectuer un tour complet et revenir à son point de départ P. I'm n'a aucune conscience de ce "vide" qui lui échappe, pourtant il peut en faire l'expérience par le fait qu'il ne peut ramener sa corde au point origine P en tirant dessus car elle résiste, elle fait une boucle. C'est ce qu'exprime Im en disant qu'il y a un "vide" dans le plan D2 où il dessine ce cercle S1 de dimension D1 pour I'm.
L'histoire se répète ensuite: la sphère S2 est une surface continue avec une courbure perceptible par I'm localement (en mesurant la somme des angles d'un triangle). Cette surface 2D localement "courbe" est vue globalement fermée par Im, avec un "vide" en 3D à l'intérieur. Comme tu le vois, le "vide" conçu par Im est toujours d'un degré supérieur à l'espace accessible à I'm.
=> Im est toujours en avance d'un saut diachronique I01/IR sur I'm.
- Mais tu l'as déjà dit en situant I'm et Im dans le feuilleté Imaginaire I1/I01/IR/I#/I0.
- Nous sommes ici dans la répétition du saut I01/IR (voir "etc."). Il ne s'agit donc plus de la complexification par paliers des concepts, mais de leur répétition, passant du concept de point à celui de ligne, puis de surface, et de volume ou de quaternion en utilisant toujours les même outils Imaginaires.
- D'accord, et si tu avançais un peu ?
- Le passage d'une dimension à l'autre se caractérise par une "bordure". Une ligne est "bordée" par deux points en ses extrémités, deux faces par un côté commun, un volume par une enveloppe. La topologie algébrique nous donne les outils pour doter chaque classe d'éléments d'une structure de groupes, et les bordures comme des applications entre ces groupes. Ce que nous voyons à un niveau donné, c'est l'image de cette application: les bordures des vides du niveau supérieur.
- Avance un peu, Wildberger le dit mieux que toi et tu en es à 5'21" de la vidéo #30 !
- D'accord, allons directement à la suivante #31, pour voir l'enchaînement de ces bordures de niveau en niveau.
La description de l'objet X au tableau est séquentielle:
Il y a donc, comme tu le vois, une façon d'opérer par strates successives qui rappelle fortement notre façon à nous de repérer la stratification Imaginaire.
La description de l'objet topologique consiste à repérer à chaque niveau de sa description, c'est-à-dire, pour chaque type d'éléments, quelles sont les "boucles" qu'ils forment pour entourer les "trous" du niveau supérieur.
Par exemple, pour les arêtes ou côtés de l'objet vus à l'étape X1 :
Les "bordures" sont des applications δn : Cn→Cn-1, il y a donc :
Le point fondamental est le suivant:
- J'ai du mal à suivre ?
- Suis attentivement la vidéo: lorsque à l'étape X2, Wildberger introduit une surface A s'appuyant sur (c-d), les boucles qui à l'étape précédente X1 s'enroulaient autour du vide ainsi délimité, se réduisent maintenant à l'élément neutre. En effet, pour reprendre notre image d'un vermisseau I'm tirant une corde derrière lui, il peut maintenant tirer sur la corde qui n'offre plus de résistance et la ramener à lui, puisqu'elle peut se mouvoir dans cet espace A.
Donc, et c'est là que j'ai calé un bon moment, preuve de ma rigidité intellectuelle due à mon grand âge: à l'étape X2, tu dois supprimer de l'ensemble des boucles déjà construites en X1 (i.e.: B1=<a+b+c,a+b+d>) celles qui délimitent maintenant une surface, en l'occurrence <c-d>, autrement dit l'image de A par δ2 : C2→C1 = Img δ2.
Puisque notre langage est ici celui des groupes, cette restriction effectuée au sein de B1=Ker δ1 s'exprime sous forme de quotient (note 3), d'où la définition du sous-groupe d'homologie H1 à cette étape X2 :
H1(X2)= Ker δ1/Img δ2.
Ici H1(X2)=<a+b+c,a+b+d>/<c-d>≈Z⊕Z/Z≈Z.
J'espère rendre visible l'aspect proprement dynamique de cette représentation de l'objet, étape par étape, car ensuite, lorsque j'introduirai les volumes à l'étape X3, certaines surfaces enveloppant précédemment un vide à l'étape X2 vont disparaître à leur tour, ce qui induira par contre-coup une évolution H1(X2)→H1(X3).
- J'espère que le processus a une fin ?
- C'est pratiquement une question d'ordre philosophique. Nous sommes ici dans une construction par étapes, vu essentiellement de I'm, initialement en position ex ante par rapport à un objet qui lui échappe, un vide. Il est donc, au sens Freudien du terme, dans un automatisme de répétition. Mais comme nous sommes ici au-delà de I01, cette répétition conduit à un développement orthogonal de l'Imaginaire (et non pas immédiatement temporel): tu passes de la dimension 0, à la dimension 1, et ainsi de suite.
Maintenant, la seule limite à cet automatisme de répétition dépend d'une "prise de conscience" en position ex post. Autrement dit, le processus est cadré par le Sujet en position Im.
- C'est bien compliqué.
- Absolument pas. Pour représenter une chaise, tu peux en dessiner quelques traits, ou peindre des à-plats sur une aquarelle, ou encore donner une impression du "volume" qu'elle occupe dans une perspective. Mais tu n'es pas forcé de te limiter à 3D car tu peux aussi la filmer pour rendre compte des déplacements qu'on lui impose ou de son délabrement progressif, ou encore donner une impression de mouvement sur une toile à la manière des Cubistes. Et bien ici c'est la même chose: tu t'arrêtes lorsque tu es fatigué d'embrasser du vide. C'est d'ailleurs en atteignant cette limite choisie par Im, que le processus se fige et pour ainsi dire fige l'objet.
- Y a-t-il une limite inférieure à cette représentation ?
- Bien entendu. Nous avons vu que le groupe fondamental π avait au moins l'élément neutre {e}, attaché au point P, où nous avons situé I'm. Ici le groupe d'homologie H0(X0) est généré par un certain nombre de points, e.i.: <x,y,z>. Nous sommes à ce stade élémentaire de la description en I'm≤I01. L'étape ultime, ramène I'm en I1, où tout est rapporté à l'objet final (*) : c'est la propriété universelle, qui se traduit ici par δ0=0 (0 étant l'élément neutre de l'addition) (note 4).
J'espère que tu es sensible à la beauté de la chose: notre objet se dévoile par étapes au Sujet, grâce à une procédure, qui commence par la prise de conscience locale en I'm d'une existence (δ0=0), puis au fur et à mesure précise les contours de l'objet en limitant les potentialités constituées au départ, pour l'inscrire finalement dans un vide Imaginaire (Hx=Hx+1=...=Hx+n=0), limité globalement par Im.
Je trouve remarquable que ces groupes d'homologies nous offre une si parfaite métaphore de ce que nous avons développé pour représenter l'Imaginaire du Sujet.
- Décompresse, tu vas nous péter une durite.
- D'accord. Je n'insiste pas, mais il y a toute une gymnastique à acquérir pour être à l'aise avec ces calculs, et "voir" littéralement "monter" et se "préciser" dans l'Imaginaire un objet au fur et à mesure qu'il prend consistance et acquière de dimensions. L'objet principal de la physique étant le "mouvement", avec trois dimensions d'espace et une de temps ; mais ceci est une autre histoire. Je te suggère de revoir la vidéo #33, pour acquérir la souplesse nécessaire à cette gymnastique.
Avant d'arrêter cet article, car je fatigue un peu moi-même, je voudrais revenir sur ce que je n'avais pas réussi à comprendre jusqu'à aujourd'hui dans la démarche d'Évariste Galois, à savoir, pourquoi, lorsqu'il étend le domaine de définition des racines d'un polynôme (les fameux sous-groupes distingués dont j'ai parlé dans le dernier article "Notes #3"), oui, pourquoi ceci correspond-il à une restriction du groupe de symétries des racines ?
En effet, tu as d'instinct l'idée que plus tu augmentes une domaine de définition, plus tu accrois tes potentialités. Si tu as un pâturage d'un hectare pour y faire paître ton troupeau de chèvres, tu te dis qu'en accroissant ton domaine, tes chèvres y auront plus d'espace pour s'ébattre et brouter. Eh bien là, non !
Et c'est là que le travail de Galois a une portée proprement philosophique, que notre écriture permet facilement de communiquer (je rappelle que l'idée initiale de Lévi-Strauss était de développer une "entropologie" afin de faciliter les échanges, la discussion).
Nous avions déjà compris que cette montée Imaginaire implique sa clôture (nous nous éloignons du Réel). La première clôture, la plus ancienne, c'est l'ajout d'un point à l'infini pour clore R, la seconde est due à Poincaré, lorsqu'il se rend compte que la géométrie "naturelle" de C est hyperbolique, avec ce point à l'infini pour horizon.
Maintenant, nous avons un processus qui nous montre de quelle façon cette restriction Imaginaire se structure étape par étape, entre I01 et IR.
Ouf, je vais enfin pouvoir terminer la série d'articles sur Évariste Galois, lorsque je me serai familiarisé avec ce qui vient de s'échapper de ma plume.
Mais, sans rire, crois-tu que l'on puisse encore philosopher sans les maths ?
Hari.
Note 1 :
1/ Pensée rationnelle
Tout tient à la définition de ce qu'est un "discours rationnel" tenu par un Sujet qui prends conscience de lui en se "représentant", dans son Imaginaire au niveau Imaginaire Im.
Par définition, une pensée "rationnelle" rapporte son discours sur un "objet du discours", voire même la perception de celui-ci à une grille de lecture, ou un "concept" déjà à sa disposition. Je m'en tiens à JP Changeux, pour qui la prise de conscience du Sujet tient à la rencontre d'un "percept" et d'un "concept".
Dire que le Sujet est dans une posture rationnelle signifie qu'il est capable d'exprimer ces deux niveaux de discours, dans une position que je qualifie "d'ex post". Ce que je représente par Ipercept< Iconcept<Im.
Le langage de la théorie des catégories permet une métaphore extrêmement puissante de cette situation avec le simple concept de "morphisme identité" de l'objet final (*) au niveau Imaginaire I1 vers le singleton {*} au niveau Imaginaire I01: (*)↑{*}.
L'idée que l'Imaginaire du Sujet se présente comme un ensemble feuilleté vient de Freud. J'en parle dans "Le Sujet à Livre ouvert", et de la notion de métaphore dans "Métonymie et métaphore - bis".
Dans ce schéma, il y a une hiérarchie naturelle des niveaux Imaginaires, qui se traduit par une "montée" vers le moi du Sujet, ou sa représentation en Im: le Sujet rapporte son discours à son point de vue, ce que je définis comme une position "ex post".
À l'inverse, une pensée irrationnelle se caractérise par une position du Sujet ex ante: dans ce cas, le Sujet se considère comme déterminé par un discours qui le porte ou le détermine. C'est typiquement la position du Sujet par rapport à sa culture ou sa religion lorsqu'il ne la "discute pas" : Im<S.
- Mais ce que tu appelles Symbolique ou S, sort de l'Imaginaire, non ?
- Oui, et là encore, la théorie des catégories nous offre une métaphore intéressante pour exprimer la limite Imaginaire à la frontière du Symbolique. Il s'agit du concept d'objet initial ou "vide" d'où tout peut advenir sans que rien n'y conduise par un morphisme (faute d'élément). C'est pourquoi j'ai considéré que la représentation limite, la plus haute que le Sujet puisse se faire de lui-même le porte à se situer au niveau Imaginaire I0 où il peut conceptualiser le vide ( ). Ce qui nous donne Im≤I0<S.
- C'est une philosophie Bouddhiste, non ?
- Disons que c'est un point de convergence évident, dans la limite où cet objet initial peut conduire n'importe où. Considère que c'est la représentation limite que je peux exprimer rationnellement.
2/ Dualité local/ global :
La difficulté de la représentation précédente tient à sa rigidité. En particulier, il est impossible de rendre compte avec ce type de morphisme ↑ de l'acquisition de nouvelles connaissances. Comment rendre compte du moment où l'élève "comprend" d'un coup la leçon du maître? Il y a un moment où l'élève passe d'une position ex ante à ex post, d'irrationnelle à rationnelle.
Il s'agit du passage Ipercept<Im< Iconcept<Imaître => Ipercept< Iconcept<Im.
J'en parle en commentant deux mécanismes assez célèbres pris chez Lacan et Lévi- Strauss ("Schéma en L et forme canonique des mythes").
Mais comment décrire rationnellement du seul point de vue du Sujet ce mécanisme essentiellement irrationnel pour lui ?
Le point important, c'est le stade du miroir chez l'enfant, qui lui permet de dédoubler sa propre représentation en I'm, ce dont j'ai abondamment discuté en définissant l'approche topologique, que je situe comme complémentaire à l'approche rationnelle logique.
D'une certaine façon, et c'est l'objet de cet article, le Sujet en se positionnant localement en I'm, inverse le sens de la rationalité. Ce qui était rapporté globalement à Im dans un mouvement ↑, est maintenant rapporté localement à I'm dans un mouvement ↓.
- Mais tu as dis qu'un tel mouvement ne pouvait pas être décrit rationnellement !
- Toute l'astuce est que cette vision est cadrée globalement par la position ex post de Im !
Le problème c'est que si, dans une position <Im du Sujet, ex post et globale, tournée vers l'objet final, je peux identifier les éléments d'un ensemble, dans la position ex ante, locale et tournée vers l'objet initial, I'm<, je ne peux parler que d'idempotence (voir "identité et idempotence"). Par ailleurs, faute de pouvoir dénoter les éléments d'un objet, considéré comme un ensemble, je ne peux que connoter les parties d'un tout qui m'échappe en son essence, en "tournant autour" : le vide vu comme un tout..
3/ Circulation diachronique du Sujet :
Nous avons discuté de la possibilité pour le Sujet de se situer au niveau élémentaire I1, voir "Le cogito cartésien", nous venons de voir que la position ultime du Moi se situe en I0, de ce fait, le Sujet peut à loisir circuler de I1 à I0 en passant par étapes de l'un à l'autre. On peut dire que ces deux niveaux relèvent plus d'un discours philosophique que du langage mathématique.
Les mathématiciens débattent entre eux de l'axiome d'existence, et font preuve de beaucoup d'imagination pour tenter de s'abstraire du concept d'objet (par exemple en le définissant comme une flèche de morphisme sur elle-même) mais en reviennent pour ce qui est de la logique, peu ou prou à Descartes. Ce qui marque s'il en était besoin qu'en I1, nous touchons à la philosophie plus qu'aux maths.
Par ailleurs, cette idée d'un vide d'où tout procède sans que rien n'en sorte (i.e.: impossibilité d'avoir un morphisme y conduisant ou en partant), frise la philo.
Et donc, en bornant le domaine Imaginaire de notre Sujet par I1 et I0, de fait, je transcende complètement les pures mathématiques, et je me raccroche à Lacan en écrivant R<I1≤Im≤I0<S.
Maintenant, pour décrire très généralement la circulation du Sujet dans son Imaginaire, entre I1 et I0, j'essaie d'utiliser le langage mathématique. Mon hypothèse étant qu'il est possible de ramener par une série de métaphores, un mouvement Imaginaire quelconque du Sujet, dans quelque domaine que ce soit, à la circulation canonique de son Moi (en Im) entre les niveaux Imaginaires : I1<I01<IR<I#<I0 avec le sens que je leur donne en termes mathématiques.
- Ça fait dix ans que tu rabâches la même chose...
- Oui, j'étais à peu près dans cette vision en écrivant L'Homme Quantique, mais j'ai besoin de me rassembler avant de sauter à l'étape suivante, à savoir le parallèle que je fais dans cet article entre les groupes d'homologie et la circulation diachronique montant et descendante du Sujet dans son Imaginaire.
Parce que le point important est là : le Sujet est toujours en mouvement, changeant sans cesse de niveau Imaginaire, et de point de vue I'm/Im, pour s'adapter à son objet de discours ou d'observation.
Nous l'avons vu à plusieurs reprises, mais je résume ici pour ceux qui débarquent: l'automatisme de répétition se manifeste de façon spécifique à chacun des niveau Imaginaire où se situe le Sujet.
Tout d'abord, parler de "répétition", c'est parler de "mouvement", ce qui nécessite pour l'exprimer de conjoindre un principe "synchronique" ou objet en Ik et un autre "diachronique" entre Ik/Ik+1, la prise de conscience de la répétition se faisant ex post Ik<Ik+1<Im.
J'ajoute qu'a priori, tout le discours mathématique qui nous intéresse ici se construit entre I01 et IR, c'est dire l'importance de cette notion d'orthogonalité, comme de symétrie, de miroir ou de réflexion.
- Et au-dessus, entre IR et I# ?
- On y aborde les notions de conservation, et d'équivalence, qui passent par l'idée de "mesure" comme de "conservation" dans un sens très large; mais nous n'en avons pas besoin pour ce qui nous concerne aujourd'hui.
Note 2 :
La représentation du temps est un vaste sujet, je ne m'y arrête pas ici, pour en avoir discuté maintes et maintes fois.
Note 3 :
Voir mes dernières notes sur les groupes dans
"Le sous-groupe H=3Z, avec les deux "co-ensembles" H+1 et H+2 recouvrent entièrement Z, sans qu'il y ait de doublon. Il montre aisément que les trois sous-groupes (H, H+1, H+2) forment un ensemble muni d'une structure de groupe isomorphe à Z3, qu'il explicite au tableau, ce qu'il note: Z/H=Z/3Z={H,H+1,H+2}≃Z3 (add. modulo 3)."
Note 4 :
La notation "0" renvoie à l'élément neutre de l'addition, qui en toute rigueur est l'image de (*) en I1, par le morphisme identité (*)↑{e} en I01. Tu vois que la description d'un objet par ses groupes d'homologies respecte parfaitement ce que nous avons déjà vu des changements de posture du Sujet autour de l'objet :