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Sur les traces de Lévi-Strauss, Lacan et Foucault, filant comme le sable au vent marin...

L'Homme quantique

Les limites d'une approche ?

Si un modèle n'offre pas la possibilité de discerner entre une représentation correcte et une autre erronée, alors c'est qu'il est insuffisant, et mon approche ne déroge pas à la règle.

- Mais de quoi parles-tu ?

- De ceci: dans mon billet "Nombres cardinaux et ordinaux", j'établis une hiérarchie Imaginaire entre les différentes figures géométriques, chacune sur un niveau synchronique propre, et j'indique la possibilité de caractériser cette hiérarchisation en la repérant d'un nombre cardinal :

Si l'on repère chaque niveau Imaginaire entre I01 et I0 par son rang, un cardinal, alors :

  • Le niveau I01 (l'ensemble N) est de rang  ℵ0
  • Le niveau IR (la droite) est de rang  ℵ1
  • Le niveau IR2 (la surface) est de rang  ℵ2

Le dernier saut, avant I0, étant de rang ℵ, le vide pouvant seul contenir (ou engendrer) une infinité d'infinis...

Puis je remets en cause cette structure dans le billet suivant "etc." au motif que la succession des nombres cardinaux, de même que la construction des différents objets de la géométrie résultent d'une répétition d'un même mouvement élémentaire :

Donc, ce niveau IR suffit à imaginer toutes les dimensions de la géométrie (hormis le point en I1 et l'ensemble vide en I0) comme l'ensemble des cardinaux 0,  ℵ1,  ℵ2,  ℵ3 ... etc.

Avec un recul d'une bonne semaine, je serais tenté de dire oui et non, ou "les deux mon capitaine".

Et là, c'est ma représentation toute entière d'une structure en couches offrant une hiérarchie bien propre sur elle qui vacille.

Bon, pas de panique : j'ai déjà connu des remises en causes aussi fondamentales, notamment en m'éloignant de la structure sénaire d'Abellio, après y avoir réfléchi la majeure partie de ma vie d'adulte ! Je sais déjà par expérience, qu'il y a toujours une sortie...

Il faut donc en revenir à la lettre 52 du 16/12/1896 de Freud à Fliess, dans laquelle je m'étais arrêté à ce passage:

« Tu sais que, dans mes travaux, je pars de l'hypothèse que notre mécanisme psychique s'est établi par un processus de stratification : les matériaux présents sous forme de traces mnémoniques se trouvent de temps en temps remaniés suivant les circonstances nouvelles »;

et au petit schéma ci-dessus, puisé dans "l'interprétation des rêves" de 1899. Une simple enfilade de feuillets, percutée d'un côté, indiquant une propagation de l'un à l'autre, comme dans un pendule de Newton. J'ai rapproché cette image d'un constat strictement linguistique (et logique) : il y a un "saut" pour passer du discours aux règles du discours, qui conduisit Saussure à distinguer entre synchronie et diachronie.

J'avoue en être resté là, sans plus approfondir l'approche de Freud, par soucis de développer ma démarche en limitant au strict minimum les briques élémentaires de mon Lego. Mais là je butte sur un obstacle, qui m'oblige à reconsidérer ce schéma plus attentivement: c'est le principe de réalité qui me rattrape !

Je reprends ici ce que j'ai trouvé sur le web, de M. Joël Bernat (qui voudra bien m'en excuser) pour expliciter ce schéma :

"Peu après, en 1899, ce système et ce trajet sont schématisés dans L’interprétation des rêves où les lieux psychiques sont organisés selon un axe (voir schéma) : 

(S) est l’extrémité sensitive de la psyché, le lieu où se produit l’excitation perceptive (c’est la « couche corticale originelle » pourvue d’organes de perception. Cette excitation est admise dans le système perceptif, (P), système qui n’en garde pas de traces durables. Si le perçu entre en contact avec les traces mnésiques (S1 & S2), cela produit un premier type de représentation – et donc une trace durable –, mais qui sera inconsciente (Inc.). Lorsque cette première représentation entre en contact avec un autre registre de traces mnésiques, les traces verbales, situé dans le préconscient (Préc.), la représentation est transformée en représentation verbale. Ensuite, nous atteignons l’autre extrémité de la psyché, l’extrémité motrice (M) où Freud situera bien plus tard l’épreuve de réalité."

Je me suis donc focalisé sur le début du processus : du côté de la perception, sans plus m'étendre aux autres considérations puisque, depuis Freud, l'investigation neurologique du cerveau nous a fait beaucoup progresser quant à la compréhension de ses modes de fonctionnement et de son organisation. J'en ai parlé dans plusieurs billets, il y a déjà quelque temps...

Autrement dit, ma représentation de l'Imaginaire dérive d'une approche procédurale : j'ai recherché le premier maillon de la chaîne, en prolongeant ma pensée d'un "etc" dont nous venons de voir les limites !

Limites qui deviennent évidentes, lorsqu'il s'agit de représenter une façon de penser qui n'est plus d'ordre procédurale, logique, c'est-à-dire au moment de parler de topologie ou de géométrie.

Et toute la construction se retrouve par terre...

Quoi que...

S'il en était autrement, si je pouvais réduire une pensée au-delà de la logique (entre I01 et I0) à une pensée itérative, temporelle et logique (entre I1 et I01), cette réussite montrerait l'inconsistance de la méthode, puisqu'elle ne rencontrerait pas les difficultés qu'affronte le matheux, dans son langage élémentaire pour ramener la topologie à la logique !

Je vais l'exprimer d'une autre façon, pour vous familiariser avec l'idée: je ne peux pas, moi, avec un langage moins simple que la théorie des catégories, esquiver une difficulté qui apparaîtrait à ce niveau élémentaire du langage. La complexification du langage ne peut en aucun cas résoudre une difficulté, mais juste emmailloter le bébé. Et c'est précisément pour cela que je m'intéresse tant aux mathématiques, pour y voir de la façon la plus claire, la plus élémentaire, la plus irréductible possible l'anthropomorphisme de toute représentation.

Et c'est ce que j'expérimente actuellement: la brisure logique / topologie me renvoie à ma propre démarche, en me mettant sous le nez ses propres limites...

Maintenant, il faut laisser flotter les rubans quelque temps pour voir la suite...

L'idée qui me vient, tout de suite, c'est qu'il doit être plus facile d'aborder la topologie à partir de la mécanique des rêves et de l'inconscient, au contact du Symbolique (et de I0 donc), tandis que la logique s'aborde du côté du Réel (et de I1).

- Pourquoi ?

- À cause du principe de dualité en géométrie.

- Tu peux préciser ?

- Nous avons vu qu'à partir de IR, nous pouvons relativiser notre propre position, de même que l'on peut aborder une représentation d'un point de vue soit global, soit local.

Eh bien, ceci me renvoie à mes propres démons, aux limites de ma zone de confort. J'en reviens au choc que j'eus en taupe pendant une colle de début d'année, lorsqu'un ami noir, face à un tableau vert, avait fait une inversion de matrice pour résoudre un ensemble d'équations. Les lignes devenaient colonnes, les constantes prenaient la place des variables et inversement, plus rien n'était à sa place, comme dans un rêve, ou tu ne sais plus si tu es le rêveur ou le papillon...

C'est la même chose lorsque tu prends les droites pour des points, les points pour des droites, et inverses les propositions: une droite passe par 2 points, un point est la rencontre de 2 droites, ou lorsque tu prends l'indice pour sa représentation...

Tu n'es pas loin du rêve, ou de l'écriture hiéroglyphique, présentant sur un même plan signes-mots (idéogrammes) et signes phonétiques (phonogrammes). D'ailleurs, les Chinois (cf.: Les neuf chapitres sur les mathématiques, environ 2 siècles av. J.-C.) n'ont pas attendu Leibniz pour explorer ce qui allait devenir le calcul matriciel avec Arthur Cayley en 1854... Je vois dans cette avance Chinoise, voire Japonaise, avec Seki Kowa (1642-1708), un lien avec une écriture utilisant des sinogrammes se référant soit à une idée, soit à son expression. quand la nôtre reste une transcription de notre expression orale, qui par nécessité se déploie dans le temps...

Je sens bien, là ma propre difficulté à sauter le pas, et je suis en cela terriblement Occidental, pis peut-être: un Français accroché au Siècle des Lumières, comme une bernique à son rocher.

- Bon d'accord, belle introspection, et après ?

- Le relativité dont nous parlions s'applique à la représentation même de notre Imaginaire. L'idée qui se dégage est peut-être la suivante : sans remettre en cause une démarche qui me semble nous avoir passablement été utile jusqu'à présent, il convient peut-être de faire notre mue de la façon suivante : à partir de l'introduction de IR, la démarche procédurale, logique qu'impliquait notre vision de l'Imaginaire, doit, aux niveaux supérieurs (entre I01 et I0) être comprise comme l'actualisation d'une potentialité, et nous en revenons à Deleuze.

- Concrètement ?

- Très simple : mes deux façons d'organiser hiérarchiquement mes figures géométriques, de façon pour ainsi dire "orthogonale" (comme les lignes et les colonnes d'une matrice), ne s'excluent pas, ce ne sont que des possibilités, des "façons de parler", et il m'est loisible, de choisir celle qui me convient le mieux, en fonction de mes intentions. Et cette liberté va s'accroître au fur et à mesure que je "monte" vers I0, niveau à partir duquel, je te le rappelle, tout est imaginable...

- Il faudrait malgré tout un critère de choix, sinon, qu'est-ce qui nous garderait de dire n'importe quoi ?

- Oui, bien entendu, et ce guide, je pense que nous l'avons déjà trouvé: c'est Emmy Noether, nous venons d'en parler dans la mécanique de l'Imaginaire.

- Mais cette relativité de la description de l'Imaginaire, rapportée au Moi du Sujet (en Im, donc), elle était déjà là, il n'y a donc pas grand-chose de neuf là-dedans, n'est-ce pas ?

- Sans doute, mais je l'avais seulement postulée au début de ma démarche (transcendant mon approche), quant elle s'impose maintenant, d'elle-même à partir de IR (dans une démarche immanente). J'avais un peu perdu de vue, que nous ne sommes ici que dans du langage, et à force de m'intéresser à ce qui nous connecte au plus près du Réel, à la logique et à l'aspect procédural de la pensée, j'en venais irrésistiblement à projeter sur le Réel ce qui reste notre façon de l'approcher, et à prendre l'ombre pour la proie... La topologie en nous éloignant de l'expression orale se déployant dans le temps, pour nous renvoyer à l'écrit, se déployant dans l'espace, me renvoie directement à ces questions portant sur l'articulation de la sémiotique à la linguistique..

Tout ceci pour dire à quel point l'approche de Grothendieck, avec ses topos, va nous être utile pour comprendre comment rabattre la  topologie sur la logique !

Bonne méditation,

Hari.

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